Le numérique opère par renversement. Le renversement le plus fréquent est celui de la charge de la preuve. Celui également des processus d’engrammation, des processus mémoriels. D’autres renversements sont à venir.

D’AUTRES SONT DÉJÀ LÀ

Avant, nous voulions sans cesse poursuivre plus loin la navigation. Alors après avoir inventé les navigateurs - qui évitèrent de se souvenir des adresses IP - on inventa les moteurs de recherche. Aujourd’hui, on veut stopper le défilement incessant, ici des infos sur nos murs, là du scrolling infini. Alors on invente, alors Facebook rajoute le bouton, la «fonction» de sauvegarde, pour nous permettre de retrouver des contenus plus tard. Laquelle fonction s’additionne aux autres boutons et fonctions permettant d’en faire de même : «Read Later» par ici, «Watch Later» par là. Et s’étendent et s’emplissent toujours davantage nos étagères infinies, étagères sans perspective, de livres que nous ne lirons pas, de vidéos que nous ne visionnerons pas, de contenus sur lesquels nous ne reviendrons pas. Parce que nous n’avons déjà pas assez de temps pour encaisser et endiguer le défilement du présent. Parce qu’ils nous aiguillent déjà sans cesse, à force de recommandations, de prescriptions, de notifications, vers d’autres contenus, vers d’autres étagères.