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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

mercredi 12 mai 2010





Patrick Pelloux: "L'objectif de Sarkozy est de casser la sécurité sociale"

Par Alex Lemarié de La rédaction du Post

le 11/05/2010

Sur Le Post, le médecin urgentiste fustige "l'épouvantable" proposition d'Alain Minc pour financer les dépenses de santé des "très vieux" (lire son interview ci-dessous).

Vendredi, Alain Minc a dénoncé sur France Info "l'effet du vieillissement sur la hausse des dépenses d'assurance maladie". Pour "récupérer les dépenses médicales des très vieux", qui sont selon lui "un luxe", le proche conseiller de Nicolas Sarkozy propose de "mettre à contribution ou leur patrimoine, quand ils en ont un, ou le patrimoine de leurs ayants-droits".

Son intervention sur le sujet commence à 21,04mn: (Source: France Info)

Pour illustrer et appuyer son argumentation, Alain Minc a cité l'exemple de son père, âgé de 102 ans, qui a été "hospitalisé quinze jours en service de pointe".
Coût total de son hospitalisation, selon Alain Minc: 100.000 euros.

Le hic, c'est que Libération a démontré que le conseiller élyséen avait exagéré sur les chiffres, en multipliant par cinq les dépenses liées à l'hospitalisation de son père. Ce que Alain Minc a reconnu dans les colonnes du quotidien, avouant qu'il a "délibérément pris un chiffre qui frappe" pour donner du poids à son argumentaire.

Contacté par Le Post, le médecin urgentiste Patrick Pelloux s'élève lui aussi contre la proposition du conseiller de Nicolas Sarkozy.

Que pensez-vous de la proposition d'Alain Minc pour financer les dépenses médicales des personnes âgées ?

"Déjà, il est intéressant qu'Alain Minc reconnaisse lui-même qu'il manipule et utilise le mensonge pour faire avancer ses arguments... Cela en dit long sur l'état d'esprit du sarkozysme, prêt à tout pour faire passer ses idées."

"Après, je n'ai pas de mot assez dur pour qualifier cette proposition d'Alain Minc. C'est juste épouvantable et d'un cynisme... Cela lui va bien à lui, qui est riche, de proposer ça... Grâce à ce monsieur, nous allons redécouvrir la lutte des classes. La seule réponse que l'on peut et que l'on doit apporter, c'est le combat démocratique."

Alain Minc dit qu'il va en toucher un mot à Nicolas Sarkozy...
"Qu'ils arrêtent de nous prendre pour des cons! On connaît bien leur stratégie: ils envoient une balle et ils attendent de voir comment elle revient. Il est clair que la sortie d'Alain Minc sur ce sujet vise à préparer les esprits avant une éventuelle réforme des régimes d'assurance maladie. Je pense qu'à terme, l'objectif de Sarkozy est de casser la sécurité sociale. S'il casse la sécu, il casse le gaullisme."

"Avec son intervention, Alain Minc distille la pensée ultra-libérale du sarkozysme, qui est de dire: l'homme est au service de l'économie et pas le contraire. Cela crée une concurrence entre les êtres humains effroyable. Pourtant, Alain Minc étant un brillant économiste, il devrait savoir que ce qui a sauvé la France pendant la crise, c'est son système de sécurité sociale."

- Dans une interview accordée au Post, ce mardi, le député PS Jean-Marie Le Guen -spécialiste des questions de santé- se dit "totalement opposé" à la proposition d'Alain Minc et dénonce "des propos irresponsables" (lire son interview).

- Contacté par Le Post, le ministère de la Santé n'a pas souhaité réagir.
- Contacté par Le Post, le ministère du Budget n'a pas encore réagi.




Sécu : les chiffres fantaisistes d'Alain Minc

LEMONDE.FR | 11.05.10

"Il y a un problème dont on ne parle jamais (...) c'est l'effet du vieillissement sur la hausse des dépenses d'assurance-maladie et la manière dont on va le financer". Alain Minc a proposé, vendredi 7 mai, que les dépenses de soins des "très vieux" soient imputées à leur patrimoine ou à celui de leurs ayants droit. (Voir la vidéo ci-dessous)

Invité de l'émission Parlons Net, il a pris pour un exemple le cas de son propre père. "J'ai un père qui a 102 ans, il a été hospitalisé 15 jours en service de pointe. Il en est sorti. La collectivité a dépensé 100 000 euros pour soigner un homme de 102 ans. C'est un luxe immense, extraordinaire pour lui donner quelques mois ou, j'espère, quelques années de vie. Je trouve aberrant, quand le bénéficiaire a un patrimoine, ou quand ses ayants droit ont des moyens, que l'Etat m'ait fait ce cadeau à l'œil."

Pour Alain Minc, cette proposition "progressiste" devrait figurer au programme des socialistes.

Le problème, c'est que cet exemple familial a suscité des interrogations. Sur le blog de Jean-Daniel Flaysakier, spécialiste des questions de santé à France 2 et sur LibéOrléans, le blog du journaliste Mourad Guichard, des internautes s'étonnent de la somme évoquée par M. Minc.

En effet, la tarification à l'activité empêche d'atteindre de tels montants. Libération a contacté Alain Minc, qui précise : "Écoutez, c'était illustratif. Ce montant est sans doute plus élevé que la réalité. (...) Seize jours de service de pointe, ça doit être 20 000 ou 25 000 euros […]. J'ai délibérément pris un chiffre qui frappe ; le montant que j'imaginais qu'on puisse me réclamer."

Le Monde.fr



libeorleans.fr

http://www.libeorleans.fr/libe/2010/05/d%C3%A9penses-de-sant%C3%A9-minc-veut-pr%C3%A9senter-la-douloureuse-aux-tr%C3%A8s-vieux-malades.html 

Dépenses de santé: Minc veut présenter la douloureuse aux «très vieux» malades

SANTÉ. La manière dont l’économiste Alain Minc entend régler une partie des déficits de la sécurité sociale ne laisse pas le mouvement Ensemble pour une santé solidaire de marbre. Vendredi 7 mai 2010, à l’occasion d’un «Parlons Net», le rendez-vous médiatico-politique de France Info, Rue89, LePoint.fr et Dailymotion, l’homme qui parle à l’oreille des décideurs a proposé que les dépenses de soins des «très vieux» soient imputées à leur patrimoine ou à celui de leurs ayants-droits. Une proposition qualifiée de «monstruosité» par Éric Taillandier, le porte-parole du mouvement qui milite pour le maintien d'un système égalitaire.

«Il y a un problème dont on ne parle jamais (...) c’est l’effet du vieillissement sur la hausse des dépenses d’assurance maladie et la manière dont on va le financer», explique Alain Minc appuyant sa démonstration sur un exemple très personnel: «Moi j’ai un père qui a 102 ans, il a été hospitalisé 15 jours en service de pointe. Il en est sorti», rassure-t-il. «La collectivité française a dépensé 100.000 euros pour soigner un homme de 102 ans. C’est un luxe immense, extraordinaire pour lui donner quelques mois ou, j’espère, quelques années de vie».
Alain Minc propose alors une mesure qu’il qualifie lui-même de «progressiste»: «Je trouve aberrant que quand le bénéficiaire a un patrimoine ou quand ses ayants droits ont des moyens que l’état m’ait fait ce cadeau à l'oeil. Et donc je pense qu’il va bien falloir s’interroger sur le fait de savoir comment on récupère les dépenses médicales sur les très vieux en ne mettant à contribution ou leur patrimoine quand ils en ont un ou le compte patrimoine de leurs ayants droits».

«Comment un homme aussi intelligent qu’Alain Minc peut-il en arriver à proférer une telle monstruosité et de la qualifier de progressiste alors qu’il s’agit d’une régression sans nom ?», s’interroge Éric Taillandier. «Pour lui, quand on est très vieux, on n’est plus un homme ou une femme comme les autres, puisqu’on n’a plus le droit à la solidarité nationale. Cela rompt avec le principe d’égalité», dénonce-t-il.

Pour clore son propos, Alain Minc précise qu’il va faire cette proposition - qui devrait, selon lui, figurer dans un programme socialiste - à Nicolas Sarkozy. Ce que redoute Éric Taillandier: «Si cette proposition aberrante était reprise (...) cela constituerait une brèche irrécupérable dans le principe même de la sécurité sociale universelle».

Dans le même temps, le militant associatif se rassure: «Je doute qu’aucun politique ne mette le doigt dans cet engrenage infernal».

En réaction à cette sortie, Martin Hirsch, l’ancien haut commissaire, estime qu’Alain Minc «pose une question intéressante», tandis que Jean-Daniel Flaysakier, spécialiste des questions de santé à France 2, dénonce «une proposition à très haut risque».

Mourad Guichard






UNE SOCIÉTÉ A SOIGNER «Hygiène et salubrité publique en France au XIXe siècle»

Gérard Jorland










Gérard Jorland
Gallimard, «Bibliothèque des histoires»
360 p.
27 €

L'avis de La Croix

Tout va mal, mais on se soigne

Qu'est-ce donc que la santé publique à l'âge des masses et de la vitesse ?

La médecine du XIXe siècle, nous dit Gérard Jorland, a voulu prévenir la maladie et surtout l’épidémie (celle du choléra en 1832 est restée très présente), en développant l’hygiène publique par l’application des découvertes scientifiques accumulées depuis Lavoisier. L’obsession, en cet âge industriel d’échanges humains et de vitesse accrus, fut de supprimer les foyers d’infection et d’enrayer la propagation des maladies infectieuses, causes principales des hausses de la mortalité, si inquiétantes dans une France où le taux de natalité périclitait.

D’où l’action inlassable de médecins, de savants et de «travailleurs sociaux» devenus passionnément «hygiénistes», pour plaider la bonne cause auprès des pouvoirs publics, des institutions privées ou religieuses d’aide et de charité, des propriétaires et des industriels.

Il s’agit d’aérer, de désinfecter, de vacciner, d’améliorer la voirie et les égouts, d’assainir les lieux et espaces publics, d’imposer une médecine du travail, d’étendre à toute la société les bienfaits de l’hygiène sociale. Dans les «villes tentaculaires» menacées de dégénérescences de tous ordres, il s’agit aussi, disent-ils, de promouvoir une hygiène morale qui devra irradier l’école, l’éducation populaire et l’aide sociale, et qui aidera à contenir les miasmes que sont la prostitution, l’alcoolisme, le crime et le suicide.

Gérard Jorland compare la France avec le reste de l’Europe et révèle ainsi que la question de la salubrité publique a été posée chez nous avec moins d’urgence, puisque nos campagnes et nos bourgades surabondantes nous tenaient à l’écart des ravages sanitaires entraînés par la concentration urbaine.

Il ajoute que l’État libéral en France est resté trop dédaigneux du social pour vouloir participer pleinement à la bataille (contre la tuberculose, par exemple: la France a inventé le sanatorium bien après ses voisins): il s’est contenté de saluer d’assez loin les initiatives religieuses et celles des collectivités locales. Si bien que la République n’a installé un ministère de l’hygiène et de la prévoyance, puis un de la santé, qu’en 1920 et 1930.

C’est dire qu’il a fallu attendre l’envol de l’État providence à partir des années 1940 pour que la santé publique prenne l’ampleur sociale, politique et budgétaire que l’on sait aujourd’hui, mais sans que l’hygiène publique progresse au même rythme. Christian Chevandier le montre en explorant à fond, pour la première fois, le meilleur espace public mis désormais au service de la santé de tous : l’hôpital, lieu jadis d’accueil en urgence et de relégation sociale devenu à la fois une énorme machine à soins, une caisse de résonance de la société et un lieu d’exercice–souvent difficile, mais en progrès–de la citoyenneté et, sans doute, le dernier havre pour naître et mourir ensemble dans une société d’individus.

Évolutions de la médecine, de l’économie et du droit hospitalier, sociologie des professions hospitalières et des malades devenus des patients: Christian Chevandier synthétise à merveille, ouvre toutes les fenêtres. Il distingue les grandes étapes qui ont fait l’hôpital d’aujourd’hui: l’héritage de l’hôtel-Dieu, la sécularisation jusqu’aux années 1920, le dévouement des soignants jusqu’en 1945, la spécialisation des soins jusqu’en 1975 et, depuis, l’irruption dans ses services de la société tout entière, en urgence ou non.

Tandis que l’hygiène publique, l’équipement de proximité et les soins à domicile, la médecine sociale et la médecine généraliste n’ont pas assez progressé pour éviter que les hôpitaux ne soient désormais dramatiquement surchargés. Surtout, il nous fait comprendre l’immense mutation sociale qui a fait de l’ancien refuge pour démunis le point de passage obligé de tout un chacun, à la vie à la mort.

JEAN-PIERRE RIOUX

A voir aussi : L’hôpital dans la France du XXe siècle de Christian Chevandier, Perrin, 490 p., 25 € http://www.bibliosurf.com/Une-societe-a-soigner-Hygiene-ethttp://www.bibliosurf.com/Une-societe-a-soigner-Hygiene-et

Présentation de l'éditeur

Faute de pouvoir soigner les maladies, la médecine du XIXe siècle s’est employée à les prévenir. D’où le rôle central qu’y joue l’hygiène publique. Se donnant pour mission de supprimer les foyers d’infection qui minent la société, elle s’étend à tous les domaines : égouts et voiries, orientation et hauteur des bâtiments, alimentation et travail, pollution industrielle et urbaine, prisons, casernes, hôpitaux, mais aussi prostitution, alcoolisme, crimes, suicides, etc.

Les préconisations des hygiénistes sont toujours les mêmes : faire circuler l’air et l’eau, désinfecter, vacciner. Mais ces avis ne sont pas toujours suivis d’effets. Dans nombre de pays européens, la vaccination et la revaccination sont obligatoires. En France, non. D’où ces deux paradoxes : qu’un pays qui a créé le mouvement d’hygiène publique moderne soit si lent à en appliquer les mesures ; que dans ce même pays, synonyme de centralisation et d’État fort, le gouvernement joue un rôle si limité dans la santé publique.

À la fin du siècle, les médecins finissent par se faire élire eux-mêmes au Parlement afin de faire voter une législation sanitaire. Mais pour imposer les contraintes de santé publique, il leur faut abandonner l’idéologie libérale et en construire une autre, le solidarisme. La législation perdurera, pas l’idéologie. Aujourd’hui, les politiques de santé publique appliquées en France et en Angleterre sont diamétralement opposées : libérale chez nous, étatique là-bas, contrairement à toute attente.

Philosophe et historien des sciences, Gérard Jorland est directeur d’études à l’EHESS et directeur de recherche au CNRS. Il a déjà publié aux Éditions Gallimard La Science dans la philosophie. Les recherches épistémologiques d’Alexandre Koyré (Bibliothèque des Idées, 1981).




Publié le 10/05/2010
FESTIVAL / THÉÂTRE 71

Honneur aux filles !

Par Nedjma Van Egmond

Esprit de famille, un rendez-vous délicieux initié par Pierre Ascaride, au théâtre 71. On y court parce que c'est l'occasion de spectacles (ou d'ébauches) réjouissants, de petites formes, de rencontres parfois surprenantes.
Et parce que Pierre Ascaride quitte la direction du lieu en décembre 2010. Il a choisi de consacrer cette troisième (dernière ?) édition aux femmes.

"J'ai voulu rassembler des regards féminins sur le monde comme il va : l'amour, ce qui ne veut pas dire forcément le triste, la lutte des classes, ce qui ne veut pas dire forcément le stalinisme, la politique dans tous les sens du mot qui n'est pas un gros mot.
Des trucs de filles, la vie quoi, vu du point de vue des filles...". Au bar du théâtre ou sur scène, des solos, souvent, des formes courtes, mais denses, des thèmes durs ou doux, dont vous raffolerez, Mesdemoiselles, mais pas seulement...

Valérie Puech se penche sur le baiser, Dominique Charpentier tire une foule de portraits, Marie-Ève Perron (actrice chez Mouawad) raconte un réveillon de Noël chez Marion.

Enfin, la géniale Meriem Menant, alias Emma la clown, partage la scène avec Catherine Dolto pour une conférence improbable où le clown se risque à la psychanalyse, et la psy se penche sur le clown.


Esprit de famille, honneur aux filles, les 28 et 29 mai, théâtre 71 de Malakoff. Spectacles : 5 et 8 euros. Pass deux jours : 21 et 28 euros. 01.55.48.91.00.




Culture et santé, alliance renouvelée


Une nouvelle convention a été signée par les deux ministères concernés, étendant le champ de leur coopération.

Onze ans après la signature de la première convention, les ministères de la Santé et de la Culture ont tenu à réaffirmer leur engagement en matière de culture en milieu hospitalier.

Ils vont même un peu plus loin qu’en 1999, puisque le texte signé le 6 mai prévoit l’expansion du dispositif aux centres médico-sociaux, maisons de retraite et centres de convalescence. Quatre régions pilotes devraient être désignées prochainement. Lors de la signature, Roselyne Bachelot et Frédéric Mitterrand ont rappelé les bienfaits de la culture pour « tous les acteurs » : les patients et leurs proches, mais aussi les soignants. Le volet de la formation des intervenants a d’ailleurs été évoqué, les deux ministères s'engageant à faire des « efforts importants » pour inclure « des modules pédagogiques » consacrés à la culture, notamment pour les cadres hospitaliers.

Améliorer la coordination

Les initiatives culturelles à l’hôpital, extrêmement diversifiées, peinent à se coordonner et se faire connaître. Toutes ne sont pas aussi médiatisées que Les Toiles enchantées ou Musique et santé, par exemple. Pour une meilleure visibilité et pour solliciter la participation du public, un site Internet sera créé, qui devrait faciliter le partage d’expériences entre les acteurs.

Un chargé de mission national sera mis à disposition par l'agence régionale de santé d’Île-de-France pour veiller à la bonne exécution de la convention et coordonner l'animation du réseau des référents et correspondants régionaux et locaux.

Au demeurant, la convention ne livre aucune mention d’un éventuel accroissement des aides financières de l’Etat. Le texte réaffirme l’importance du mécénat, et notamment du mécénat de proximité. Il encourage également la création d’une fondation ayant pour objet de réunir, d’administrer et de distribuer les contributions de donateurs privés.

Astrid Moors

Photo: Didier Plowy (ministère la Culture)
www.letelegramme.com

CÔTES-D'ARMOR

Psychiatrie. La CFDT craint le retour «à la prison»


11 mai 2010

Face à un déficit prévisionnel de 700.000 €, la direction de la fondation BonSauveur (qui gère le centre de Bégard) prévoit notamment 11,5 suppressions de postes. La CFDT se dit «très inquiète» pour un secteur de la psychiatrie déjà en crise.

«Nous allons vers la maltraitance». Cette annonce alarmiste est signée Francis Urvoy, le délégué du personnel CFDT du centre hospitalier spécialisé de Bégard (550 salariés). Il y a quelques jours, le syndicaliste et ses collègues ont appris que leur direction envisageait la suppression de 11,5 postes et le gel des bas salaires pour faire face au déficit prévisionnel de 700.000€. Un déficit dû à la non-augmentation de la dotation allouée à l'établissement par l'État. Et ce pour la deuxième année consécutive. «L'inflation est de 1,5%, les charges d'entretien et sécurité informatique, ainsi que les salaires augmentent. Nous devons nous adapter aux données budgétaires, nous n'avons pas le choix», explique Henri Terret, le directeur général de la fondation. «Mais les ajustements que nous avons effectués ne remettent absolument pas en cause la qualité des soins pour les patients. Parler de maltraitance, c'est faux. Il faut raison garder : les effectifs sont en nombre suffisants et tout est fait pour que les patients soient le mieux soignés possible».

Situation déjà dégradée

La sérénité du responsable de la fondation tranche avec l'inquiétude d'Yves Le Bivic, le secrétaire du comité d'entreprise du centre hospitalier de Bégard. «Nous sommes dans un contexte où la psychiatrie est fréquemment mise sur la sellette, notamment avec des fugues de patients qui débouchent sur des faits dramatiques. Si on réduit le nombre de personnels, on risque de revenir à des méthodes du siècle dernier. C'est-à-dire la prison». Et pour Yves Le Bivic, ces suppressions de postes sont d'autant plus mal venues que la situation est déjà dégradée:«Aujourd'hui, nous n'avons plus le temps de connaître les patients. Le personnel infirmier ne fait que les croiser».

Discours schizophrénique des financeurs

Secrétaire départementale du syndicat CFDT Santé Sociaux, Véronique Lautredou est persuadée que d'autres établissements risquent de rapidement connaître les mêmes difficultés que Bégard. «Tout le secteur médico-social (personnes âgées et handicap) du département va être touché. Les deux financeurs, l'État et le conseil général, n'augmentent pas leurs dotations. Mais les dépenses, elles, sont en hausse. Et la variable d'ajustement, c'est le personnel». «Nos financeurs tiennent un discours schizophrénique», embraye Francis Urvoy. «D'un côté, ils nous demandent de plus en plus de qualité dans les soins et la prise en charge des patients, mais de l'autre, ils nous donnent de moins en moins de moyens».

Julien Vaillant





Huit Français sur dix sont satisfaits de l’hôpital public

La Fédération hospitalière de France (FHF) a rendu publics ce mardi les résultats de son traditionnel baromètre « Les Français et l’hôpital ». L’attachement de l’opinion à l’institution ne se dément pas mais, sur certains points (prise en charge des personnes âgées, disponibilité des personnels), son taux de satisfaction est en chute libre.



PLUS DE HUIT FRANÇAIS SUR DIX (81 %) sont satisfaits de l’hôpital public : le très fort attachement de l’opinion à cette institution est une nouvelle fois mesuré par le « baromètre » que publie tous les deux ans, dans la perspective d’Hôpital Expo, la Fédération hospitalière de France (FHF).

Réalisé le 7 et 8 avril par TNS-Sofres auprès d’un échantillon national de 1 011 personnes interrogées en face à face à leur domicile, l’édition 2010 de ce sondage montre que les Français demandent d’abord (à 56 %) à l’hôpital d’être « accessible à tous, quel que soit son niveau de revenu ». Ce critère d’équité sociale arrive bien avant celui de la proximité géographique (retenu par 19 % des personnes sondées), celui des « délais d’attente très réduits » (mis en avant dans 9 % des cas seulement), celui du libre choix de l’établissement (7 %) et celui du « faible montant de la participation financière demandée aux malades » (7 %).

Pour choisir un hôpital, les Français font massivement (à 93 %) confiance à leur médecin traitant, les classements des établissements par la presse (sur la foi desquels 37 % peuvent se déterminer) ou des sites Internet de santé (21 %) étant sensiblement à la traîne. Néanmoins, au moment d’aller dans tel ou tel établissement, 46 % seulement des sondés s’estiment suffisamment informés.

L’institution hospitalière dispose-t-elle des moyens humains et financiers de son fonctionnement ? Non, répondent les Français : pour les trois quarts d’entre eux (77 %), ces moyens sont insuffisants. Interrogés enfin sur leur taux de satisfaction par rapport à une série de missions de l’hôpital public, ce sont la qualité des soins (83 % de satisfaits) et l’accueil du patient (74 %) que les sondés plébiscitent en premier lieu – suivent la modernité des équipements (73 %), les services de chirurgie (71 %), la prise en charge de la douleur (68 %). « La prise en charge des personnes âgées » ne fait que 43 % de satisfaits ; quant à « l’accompagnement des personnes en soins de vie et les soins palliatifs », ils constituent la mission que les Français jugent la plus mal remplie par l’hôpital public, avec un taux de satisfaction de 40 %.

« Si nous sommes satisfaits de voir que le taux de confiance des Français dans l’hôpital reste très élevé, nous constatons aussi qu’il y a, dans ce sondage, des indices d’insatisfaction qui ne sont pas négligeables dans une période de tension économique, financière et sociale », commente le président de la FHF, Jean Leonetti.

KARINE PIGANEAU


Quotimed.com, le 11/05/2010

dimanche 9 mai 2010




Zoom sur la nouvelle loi en psychiatrie
09 Mai 2010

Par guy Baillon

Édition : Contes de la folie ordinaire

 
"ILS" ONT PERDU LA TETE ! La nouvelle loi va "punir" ses fous ! Comble de la dérision !

La ministre de la santé, les psychiatres, les familles ont perdu la tête. Ils traitent les personnes présentant des troubles dits psychotiques comme s’ils étaient des "enfants désobéissants" que l'on doit remettre dans le droit chemin, en les obligeant à se faire soigner. Tout va se réduire à "surveiller et punir" ! La psychothérapie est exclue de la loi !

Comment ces différentes catégories de responsables en sont arrivées à considérer la folie comme un caprice de gamins ? Qu’est ce donc que traverser un moment de folie pour eux ?

Les professionnels de la psychiatrie ont inversé les faits : ils présentent la folie comme étant d'une complexité extrême à décrire, et d'une simplicité totale à traiter. C'est tout le contraire. En fait la représentation de la folie peut être décrite simplement, c'est le traitement qui est complexe et demande une profonde et patiente compétence associée à un réel amour de l'autre, amour de la personne qui souffre. Simplement les psychiatres qui se disent les plus "responsables" (car ce ne sont pas tous les psychiatres qui ont pris cette décision ce sont leurs représentants les présidents de CME) démissionnent de leur rôle, trop menacés, trop dévalorisés, trop divisés, ils sont tout à fait soulagés de se protéger derrière une loi qui punit et oblige. Il en est de même des familles : elles expliquent le simplisme violent de cette loi par le fait qu'elles n'arrivent pas à obtenir des soins auprès de la majorité des psychiatres quand elles font cette demande pour leurs proches ; ainsi découragées elles pensent qu'en obligeant leurs enfants à se faire soigner, cela va amener les psychiatres à soigner enfin, le monde à l’envers !

Quant à la Ministre bien évidemment elle est ravie de trouver des alliés inattendus pour appliquer la répression demandée par le Président de la République, continuité de sa politique sécuritaire, qui n’a en fait rien à voir avec la folie. Il faut d’abord montrer que l’Etat est fort : il enferme, donc punit, avant même de "parler".

Au total nous nageons dans l’absurde, un absurde né chez les personnes dites sensées.  Mais quel désastre ! Quel massacre de ce qui a été créé pour recevoir la folie !

Ces acteurs refusent de voir la réalité des troubles psychiques tout en ne réfléchissant pas aux conséquences de leurs décisions. En quelques lignes reprenons l'essentiel de ce qu'ils veulent ignorer. La représentation des troubles psychiques graves peut se résumer à trois grandes données : l'angoisse et la dépression, comme troubles de base qui chez certaines personnes vont prendre des proportions extrêmes et durer au point de rendre la vie insupportable, jusqu'à l'apparition d'un délire. Celui-ci au contraire constitue une étape dans la voie de la guérison, dans la mesure où il écarte la violence des troubles précédents, tout en donnant à la personne une solution à l’hostilité ou la complexité du monde environnant ; avec le délire la personne a en mains une explication qui la satisfait ; cependant il rend difficiles les relations de la personne avec son environnement qui ne comprend pas et devient rejetant ; enfin ce délire a comme particularité que la personne convaincue de la pertinence de sa propre vision du monde est dans la méconnaissance de la différence qui existe entre cette vision et la réalité. Elle n'en est pas pour autant dangereuse. Elle méconnaît l'ensemble de ses troubles, par contre elle est, beaucoup plus souvent que les autres, victime de la violence de la société qui l'entoure, et la proie de maladies physiques. Ceci pour deux raisons majeures : étant prise par son délire elle n'est pas consciente des dangers de la société qui l'entoure, pas plus que ce qui met son propre corps en péril; de ce fait elle est vulnérable à cause de cette double méconnaissance qui joue contre elle : elle ne demande rien et ne revendique rien ; de ce fait il est tellement facile de les accuser de tout les maux, et d’en faire des boucs émissaires. C’est ce dont cette loi abuse.

La première absurdité de cette loi c’est « d’interpréter la méconnaissance de ses troubles par le malade comme un refus de se faire soigner, une "désobéissance" » (comme cela a été vivement dénoncé jeudi au colloque de ‘LOGOS’ à Perpignan). La loi veut ignorer qu’elle ne "refuse" pas, elle "ne sait pas" !

La seconde c’est de ne pas comprendre qu'il est essentiel de savoir que le seul processus thérapeutique efficace c'est le travail psychothérapique, individuel et collectif ; les médicaments agissent certes sur une part importante de l'angoisse et de la dépression, mais pas plus que l'éducatif ils n’ont d’action sur le délire. De plus pour réduire au mieux les troubles de base, angoisse et dépression, ces médicaments doivent être ‘encadrés’ par la psychothérapie pour expliquer leur effet et être intégrés dans la recherche du sens des processus psychopathologiques.

Enfin une donnée dramatique se surajoute, dès que l'on entre dans le champ du soin. Les psychiatres ne le savent pas assez, ce sont les patients qui nous l’apprennent : ce drame c’est la souffrance qu'impose le fait de devoir vivre le saut brutal qu’ils doivent faire pour aller de leur méconnaissance du délire à la reconnaissance qui leur est imposée d’être "malade". Ces personnes qui souffrent expliquent que ce qui leur est imposé alors c'est de passer d'un vécu de certitude sur la réalité à une reconnaissance que ce qu'ils aiment le plus au monde, leur être propre, leur âme, leur moi, "serait" en fait une donnée incomplète, inférieure, dévalorisée, parce que dite "malade", qui va leur faire "honte".  C'est alors un vacillement de l'âme, une perte d'identité, qui leur est asséné. Cette identité il leur devient indispensable de la reconstruire pour survivre et ne pas s'effondrer en un être totalement passif, vide de toute pensée sur le monde. Cet état de passivité, cette vie amorphe, peut être aussi le résultat que l’on obtient avec des traitements lorsqu’ils sont limités à des surdosages de médicaments et de comportementalisme. Nous le savons tous.

Un tel "saut" est impossible à faire seul, ni avec la seule aide de la famille ; il faut l'intervention d'un tiers, un tiers soignant qui s'approche d’elles avec suffisamment de prudence pour créer un climat de confiance. Seulement il faut à la fois pour cela un cadre neutre, des soignants accueillants attentifs, et surtout qui soient les mêmes pour assurer une continuité de liens, compétents, expérimentés, permettant la construction de ce lien de confiance nécessaire pour réaliser cette mutation psychique.

C'est bien le risque que cette loi fait prendre en bâtissant sa démarche sur l'obéissance à prendre des médicaments seulement. Alors que l’on sait aussi qu’aucun médicament n'incite à suivre un travail psychothérapique. Surtout aucune psychothérapie ne peut être réalisée sous obligation, sous un ordre quelconque, sous une injonction quelconque, menace à l'appui. L'échange relationnel exige un vécu et un climat de liberté essentiels.

À l'inverse l'expérience a montré tant aux promoteurs de la Psychothérapie Institutionnelle qu’à ceux de la Psychiatrie de Secteur que le soin psychique pouvait se développer dans un climat de liberté. Certaines équipes ont formalisé cela en soulignant que tout début de soin psychique, toute proposition de soin, devait être précédé d'une "vraie rencontre humaine" pour accéder à cette méconnaissance, dans des espaces neutres en ville, non stigmatisés par une étiquette psychiatrique ; nous les avons appelés « lieux ou centres d'accueil », mais il s’agit là d’un accueil qui n’est ni obligatoire, ni limité à trois jours. En effet si les personnes en grande difficulté psychique, soit seules, soit de préférence accompagnées, peuvent être reçues directement sans délai dans un tel espace, elles peuvent bénéficier d'une série d'entretiens qui seront réalisés par les mêmes soignants s'appuyant sur l’entourage, et établissant un lien de confiance assez clair pour que la relation devienne solide ; peu à peu les personnes peuvent mettre des mots sur leur souffrance, et envisagent d'accepter des aides thérapeutiques associant psychothérapie, médicaments, soins institutionnels. Un tel travail est appelé « travail d'accueil », parfois « travail de crise ».

Et là nous comprenons brusquement qu’une loi n'est donc pas nécessaire pour installer ce type de soin. Un "Plan de Santé Mentale" suffit, demandant à chaque équipe de secteur de convertir une partie de son personnel (6 à 12 infirmiers, un médecin, un psychologue) en un groupe ou équipe d'accueil actif 24 h/ 24. Cette seule présence entraîne une transformation complète du ‘climat’ du service public qui devient enfin disponible et accessible. À chaque fois une telle réalisation entraîne une diminution des urgences, une diminution des besoins d'hospitalisation, ceux-ci étant remplacés par des soins ambulatoires. Enfin cette équipe, en raison de sa disponibilité, peut régulièrement à la demande des familles intervenir au domicile et rétablir le contact avec un patient qui s'est totalement mis en retrait.

Par cette simple mise en place, cette énorme machine de guerre que constitue cette nouvelle loi, avec sa triple obligation de soins depuis la garde à vue jusqu'au domicile, se montre totalement inutile, disproportionnée, adaptée seulement pour une armée de criminels.

Il est essentiel en même temps d'anticiper l'ampleur des autres dégâts que va faire cette loi si elle est promulguée par le Parlement : d’abord elle se centre sur la personne seule alors que les troubles psychiques graves atteignent toujours un groupe, la famille, des proches, avec la personne, alors que nous devons avoir à l'esprit l'appui d'une conception de l'homme qui soit unitaire, globale, associant corps, esprit et modalité de relation à l'autre, faisant comprendre que l'homme ne peut vivre seul ; l’autonomie est une illusion, la solidarité est un besoin. Tout cela est évacué par la loi qui isole, enferme, oblige. Surtout la loi commet un oubli colossal, elle occulte le fait que le soin psychique ne constitue qu'une partie des besoins des personnes présentant des troubles psychiques graves. De ce fait elle ignore totalement la généreuse loi de 2005-102, qui en créant la notion de handicap psychique (les conséquences sociales des troubles psychiques graves), a montré la volonté de l'État de répondre à une autre partie des besoins, les besoins de compensation sociale ; cette réponse réalisée grâce aux accompagnements individuels, aux services d'accompagnements sociaux (SAVS) et d'accompagnement au travail (ESAT), des foyers, et même les remarquables GEM, groupe d'entraide mutuelle. Une des difficultés d'application de cette loi est qu'elle constate que dans un certain nombre de situations, des personnes ayant été soignées, mais qui, soit au début de la rencontre avec la MDPH (maison du handicap), soit en cours de mesures de compensation, sont à nouveau dans le déni de leurs troubles psychiques tout en ne ‘demandant rien’. Le souci actuel est en dehors de toute urgence de les aider à percevoir la pertinence qu'il y aurait de reprendre un processus thérapeutique associé ; et nous constatons que ce sont les liens mutuels et la confiance des usagers qui vont permettre de redresser le cap vers le soin associé.

Avec la loi, l'ombre de la notion d’obligation-obéissance va s'étendre bien au-delà du soin, elle va aussi s'étendre sur le champ social et médico-social ; dans ce champ consciemment ou non, on ne va plus chercher à préparer une simple reprise de soins, on va très facilement brandir la menace de renvoyer la personne à tout le circuit «garde à vue de 72 heures - obligation de soin hospitalier- obligation de soins à domicile ».

En clair nous voyons venir l’ère des travaux forcés : une simple incartade, une absence mal expliquée, des conflits variés, feront évoquer l'insuffisance des soins (donnée totalement inévaluable,  mais dont l'énonciation suffit pour faire peur et fausser là aussi toute relation dans l'ensemble du champ social et médico-social). Ces personnes se sentiront obligées de travailler pour ne pas être hospitalisées et prises dans le système du soin obligatoire ! Où allons-nous ? L'ensemble du climat social va changer. Nous devons y prendre garde, ici nous sommes en présence de personnes présentant les conséquences sociales des troubles psychiques au long cours : à la moindre difficulté, qui pourra affirmer que le traitement est bien suivi ? qu'il est suffisant ? Cette question est très fréquente. Avec la loi il y a une réponse possible et immédiate, donc facile, "très facile" : l'envoi à la garde à vue de 72 heures ! Nous comprenons que tout ceci ouvre la porte à un climat constant de délation, sans limites !

Ainsi nous voilà brutalement, dès la promulgation de la loi,  projetés dans un climat où tout se fixe sur l'individu plus ou moins désobéissant, loin de toute solidarité, celle-ci suspecte sera désignée comme risque de collusion cherchant à protéger, au lieu de soigner. Non seulement la loi avec l'obligation des soins réduit l'homme à une machine qu'il suffit de nourrir de médicaments ou à transformer en robot ; mais il devient clair que les personnes présentant un trouble mental constituent manifestement "une autre race", qui doit se contenter d'obéir. Ce que l’on n’a pas encore compris, c’est que cela ne limitera aucunement la réalisation des actes imprévisibles (ceux dont se nourrit la presse, ils surviendront là comme dans toute population, y compris des crimes, mais ici ils ne sont pas supportables car aucun motif "raisonnable" n’est invoqué), on comprendra très vite qu'il faudra aller plus loin. Alors, la "race’" étant désignée, d’aucuns évoqueront une méthode déjà expérimentée pendant 10 ans en Allemagne entre 1933 et 1942 où l'on a "euthanasié" avec les meilleures intentions du monde, 80.000 personnes "afin de leur éviter les souffrances  à venir". Cette nouvelle loi prépare ce climat et va laisser venir cela, doucement ! là où il faut simplement écouter ceux qui souffrent grâce à une disponibilité humaine, compétente, libre.

Guy Baillon, psychiatre des hôpitaux



SOCIÉTÉ

Psychiatrie : Bachelot veut faire passer la pilule

Le tout-sécuritaire fait son tour de garde et s’attaque aux hôpitaux psychiatriques. La loi, discutée à l’automne, institue les soins sans consentement et restreint les sorties d’essai.

Le verdict est tombé  : ce sera la peste et le choléra. La ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, a présenté hier la nouvelle loi sur la psychiatrie en Conseil des ministres. Sur demande de Nicolas Sarkozy, après un fait divers dramatique impliquant un malade mental échappé d’un hôpital psychiatrique en 2008, cette loi vise à réformer les conditions d’hospitalisation d’office. Le texte prévoit deux mesures  : les soins ambulatoires sans consentement et la suppression des sorties d’essai.

Pour Roland Gori, psychanalyste et professeur de psychologie à l’université d’Aix-Marseille  : « Les soins sans consentement contribuent à aliéner davantage le patient, à le destituer de sa citoyenneté. Ce n’est que pure folie de vouloir tout légiférer. Les décisions doivent se prendre au cas par cas par les équipes soignantes, en lien avec le patient et la famille. » Avec la loi, celles-ci appartiendraient à l’autorité publique, après avis médical.

Les « sorties d’hôpital pour les patients placés en hospitalisation d’office », supprimées au-delà de douze heures, seront délivrées par le préfet, muni des conseils d’un collège de soignants, composé de deux psychiatres et d’un cadre infirmier. « La suppression des sorties d’essai ressemble plus à une punition qu’à une solution, au même titre que la détention provisoire dans les prisons. Par ailleurs, l’aberration est totale puisqu’il est aisé de tuer quelqu’un en moins de douze heures. Nous sommes en train de perdre toute notre autonomie, acquise depuis les lois éthiques de Nuremberg », explique Roland Gori.

La loi développe un aspect sécuritaire et une extrême médicalisation des souffrances psychiques. « Le pouvoir nous montre des monstruosités pour légitimer la surveillance de tous. Georg Lukàcs parle à ce titre de pseudo-objectivité. La démocratie libérale développe une conception sociale marquée par le sécuritaire, en utilisant une phraséologie scientifique, mais ce n’est en rien ce qui devrait prévaloir en psychiatrie », ajoute le psychanalyste. Les soins psychiques décroissent au profit d’une surmédicalisation  ; le patient s’inscrit dans une marche forcée vers la normalisation, dénonce Roland Gori. « L’hôpital devrait proposer de réels soins psychiatriques, ouverts sur la vie sociale et culturelle, loin de la solubilité dans l’idéologie actuelle du médico-administratif, dans la rationalisation technique et budgétaire. C’est la défense des malades qui compte. » La camisole chimique nous guette-t-elle tous quand les moyens et les personnels font défaut à cause de l’austérité pesant sur l’hôpital  ?

Céline Trégon




Roselyne Bachelot affole le monde de la psychiatrie

Créé le 06.05.10


Santé La réforme de l'hospitalisation d'office suscite la controverse


Le Conseil des ministres a examiné hier le projet de loi de la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, sur la psychiatrie. Il doit réformer les conditions de l'hospitalisation d'office et vise, selonLuc Chatel, porte-parole du gouvernement, à assurer « une meilleure prise en charge des patients ». Annoncée en 2008 par Nicolas Sarkozy, après le meurtre d'un étudiant par un malade mental qui avait fugué d'un hôpital psychiatrique, cette réforme est accueillie avec scepticisme par les praticiens. Alain Vaissermann, président du Comité d'action syndicale de la psychiatrie (Casp), regroupant 80 % des praticiens (14 000 en France), regrette que « le souci sécuritaire ait gagné le souci sanitaire ». Le remplacement de la notion d'hospitalisation par celle de soins sous contrainte est pour lui « une façon d'obliger les gens à se traiter même quand ils sont chez eux ».

« Nouveauté désagréable »

Par ailleurs, la loi, qui, selon la ministre, « donne un cadre aux soins ambulatoires sans consentement » irait d'après Alain Vaissermann à l'encontre de la liberté du patient, et ne garantit pas l'efficacité de la prise en charge : « il n'y a pas de meilleur soin qu'un soin consenti ».
Autre pierre d'achoppement, la mise en place d'un collège de soignants chargé de fournir un avis au préfet sur la levée d'une hospitalisation d'office. Une nouveauté « désagréable » d'après le praticien, qui remet en question la légitimité de la décision médicale : « Un médecin prend ses responsabilités. » Le psychiatre juge « outrancier de présenter tout malade comme un danger public. Pourquoi alors ne pas enfermer tous les titulaires du permis », sous prétexte que certains chauffards sont potentiellement dangereux ? Jouer de cette manière la carte “ du tout sécuritaire” peut être contreproductif », poursuit-il. Avant d'avertir : « D'une part, nous risquons d'être plus frileux sur les sorties. D'autre part, plus on enferme les gens, plus ils veulent s'évader. »

Ingrid Gallou







ACTUALITÉ MÉDICALE

L’Europe des internements contraints


Publié le 06/05/2010    

Selon les différents pays, les pratiques et les législations sur l’hospitalisation contrainte en psychiatrie varient plus ou moins, mais cet internement « d’office » (pour reprendre l’ancienne terminologie française) constitue néanmoins une réalité ubiquitaire.

Concernant onze pays européens et plus de 2 300 patients admis contre leur gré dans un service psychiatrique, une enquête prospective s’intéresse à leur perception de cette expérience traumatisante, une semaine plus tard. C’est la plus vaste étude sur ce thème et la première à recourir à une méthodologie comparable, dans la collecte des données d’un pays à l’autre. Chez environ 1 800 de ces patients (soit 78 %), leur avis est recueilli aussi un mois plus tard, avec enfin un entretien trois mois après, pour environ 1 600 (69 %) d’entre eux.

Dans l’ensemble de ces onze pays [1], entre 39 et 71 % des intéressés estiment, un mois plus tard, que leur admission fut tout de même opportune (right), et cette fourchette passe de 46 à 86 %, trois mois après. Statistique étonnante, car on pouvait au contraire estimer a priori que la majorité des personnes internées d’office aurait plutôt tendance à critiquer durablement cette hospitalisation, subie contre leur volonté ! En général, la vision la plus négative de leur internement forcé persiste surtout chez « les femmes, les personnes vivant seules, et les patients diagnostiqués schizophrènes. »

Mais cette photographie globale recouvre en fait des disparités importantes d’un pays d’Europe à l’autre. Considéré comme inédit (totally new finding), ce phénomène ne s’explique pourtant, selon les auteurs, ni par des caractéristiques sociodémographiques, ni par des considérations cliniques (diagnostics ou intensité des troubles). Et ces différences entre pays sont « substantielles », certaines d’entre elles se révélant même « statistiquement significatives. » L’Europe psychiatrique est donc peut-être en marche, mais pas d’un même pas…

[1] Allemagne, Bulgarie , Espagne, Grande-Bretagne, Grèce, Italie, Lituanie, Pologne, République Tchèque, Slovaquie et Suède.

Dr Alain Cohen

Priebe S et coll. : Patients’ views of involuntary hospital admission after 1 and 3 months : prospective study in 11 European countries . Br J Psychiatry, 2010; 196-3: 179-185.






Le tour de l’homme

Critique

Fruit de vingt ans de travail, l’œuvre du philosophe belge Henri Van Lier remonte le fil de l’évolution humaine

Par ROBERT MAGGIORI










Henri Van Lier Anthropogénie
Les Impressions nouvelles,
1 038 pp.,
38 €.


Ce n’est pas tous les jours que paraît un ouvrage pareil. En le manipulant (1 038 pages, 1,530 kg), on a une certaine appréhension, car on se dit qu’on ne pourra pas le tenir et le lire affalé sur un fauteuil, et on se met à espérer qu’au moins il n’exige pas une lecture suivie, de A à Z. Spontanément, on joue à l’ouvrir au hasard. Il est probable qu’on n’ait pas la main heureuse tout de suite. On risque de tomber sur «2A. Le cerveau préhominien. 2A1. Un computer à information constructrice, soft>>hard, et à construction informationnelle, hard>>soft», ou sur «26E2b. Les défigements par effets de champ logico-sémiotiques. Le cas Lacan». Mais la chance peut tourner : «3G. Le baiser et l’embrassement… 22G. Le roman… 28E1. Les clans et les familles… 11L3. La haine… 25C. Saints et monstres… 27G. La pondération des vies : savoir-vivre, notoriété, mode… 15H2c. Le son radio et techno… 14J2. La bande dessinée, image-texte exemplaire du Monde 3». On se demande alors comment il est possible qu’un même livre puisse traiter de paléoanthropologie et d’images publicitaires, de vie amoureuse, d’outils agraires, de métaphysique, de tuning, d’économie ou de biologie, d’humour, d’«idiosyncrasies sexuelles, hétéro-, homo-, bi-», d’émigration, d’hallucinations, de peintures sur corps, de guerres des peuples et de pogroms, de neurologie, de ponctuation, de caresses, de quatuors à cordes et de larmes.

«Acides aminés». Qu’on ne songe pas à un inventaire à la Prévert. L’Anthropogénie d’Henri Van Lier est une œuvre philosophique et scientifique, rarissime par son ampleur, à une époque qui penche plutôt vers les savoirs en miettes, et certainement déraisonnable si l’on songe à ce qu’un homme seul, raisonnablement, peut entreprendre. Le penseur belge, né en 1921 à Rio de Janeiro, mort à Bruxelles le 28 avril en 2009, a employé vingt années de sa vie pour la mener à bien. L’Anthropogénie n’est rien de moins qu’un «tour de l’homme» - comme on dit tour du monde - et la somme de toutes les connaissances sur son évolution, depuis ses premiers pas d’hominien, ses premiers gestes, ses premiers mots, ses premières rencontres, ses premières constructions jusqu’à ses acquisitions les plus récentes dans les domaines de la philosophie, du droit, de la politique, des mathématiques, de l’art, de la technique, de la sémiotique, de la médecine, etc.

Ouvert à tout, généreux, «éveilleur d’idées» suscitant la curiosité et l’admiration de ses étudiants, Henri Van Lier a exercé à l’Institut des arts de diffusion (IAD) de l’Université de Louvain-la-Neuve. Il a commencé à se faire connaître en 1959 avec les Arts de l’espace : peinture, sculpture, architecture, arts décoratifs, s’est occupé de sexologie (l’Intention sexuelle, 1968) avant que celle-ci ne fleurisse, a collaboré régulièrement à l’Encyclopædia Universalis, fait maintes émissions pour France Culture (dont Histoire langagière de la littérature française), avant de publier ses deux ouvrages les plus remarqués, Philosophie de la photographie (1983) et Histoire photographique de la photographiemacro histoire de l’Homo», dont il voulait qu’elle fût l’équivalent du travail de Stephen Jay Gould sur «la macrobiologie du vivant». En tant que fait, l’anthropogénie, brutalement définie, est «la constitution continue d’Homo comme état-moment d’univers». En tant que discipline, elle se donne pour objet l’étude «des facultés propres à Homo».

Si «Dieu ne joue pas aux dés», à quoi passe-t-il son temps ? «Il joue aux séquences dynamiques des vingt acides aminés qui portent tout l’édifice des Vivants». Quand, pourquoi, comment l’homme s’est-il dans cette séquence «sélectionné comme un primate», détaché de l’animal, pris une place à part dans l’univers ? La paléoanthropologie est là pour apporter des réponses, aidée par la bioanthropologie, l’ethnologie, l’archéologie, l’éthologie, etc. Le propos de Van Lier est aussi de faire une «science de l’homme», mais qui incluerait la science… des sciences de l’homme et de la philosophie. On pourrait citer d’un coup les traits spécifiques qu’en interconnectant les disciplines scientifiques - mais aussi l’art ou la littérature - le philosophe belge parvient à extraire pour déterminer la spécificité de l’homme et expliquer son extraordinaire évolution : l’angularisation, l’orthogonalisation, la transversalité, la possibilisation, la segmentarisation de l’environnement, la rhétorique corporelle, le rythme, la présentification, la rencontre, la mathématique… On serait loin, on le voit, de ce qui est avancé d’habitude pour caractériser l’hominisation : le langage symbolique, la conscience, etc. Mais ce listage ne donnerait qu’une pâle traduction de ce que contient Anthropogénie.

Injure. Pour en donner une petite idée, quelques exemples, simplificateurs, (ne) suffiront (pas). Soit la «suite anthropogénique» qui, partant de l’érection de l’homme à la station debout et de sa transversalisation, arrive au geste, à la voix et au langage. Pour la voix, Van Lier ne se contente pas de voir les modifications anatomiques du visage et de la cavité buccale qui ont permis son apparition : il fait une théorie du ton, du timbre, du son, du chant, du rythme, des instruments musicaux, une histoire de la musique dans le monde grec, l’Inde ou la Chine, une sémiotique du signe musical, une étude de ses fonctions incantatoires, de la magie, du chamanisme, etc. Même chose pour le langage : on part du signe, sonore, graphique, et on parcourt toute l’histoire de la linguistique, la grammaire, les dialectes, les écritures cunéiformes, l’écriture maya ou cyrillique, la graphie mathématique, jusqu’aux scarifications, aux inscriptions funéraires, aux graffitis et aux «écritures granulaires» (magnétoscopiques). Ou les conflits : Van Lier les classe, puis développe «les théories politiques, juridiques, morales» relatives aux conflits «attachés aux instances (de la famille) et aux rôles (du voisinage ami et ennemi)», les théories économiques suscitées par les conflits dans les échanges de biens, les théories esthétiques et érotiques expliquant les différends de «goût» ou de «sentiment», les théories langagières produites «par les conflits inhérents à l’interlocution» (injure, menace, intimidation et autres), and so on…

On laisse imaginer les arborescences du propos lorsqu’il touche à l’animisme, aux pathologies mentales, à la religion ou aux «idiosyncrasies ethniques» ! L’entreprise d’Henri Van Lier a donc quelque chose «de sur-humain». Mais, de sa monumentale Anthropogénie, on peut ne retenir qu’une idée : la chance de l’Homme, c’est qu’il fait des angles. Son corps redressé fait un angle droit avec le sol, angle qu’il retrouve assis, qu’il peut répéter avec son pouce et son index, avec les «rotations de sa tête à 180 °, c’est-à-dire 90 ° x 2», avec l’agenouillement, le pliage du coude, etc. Dès lors il lui est possible de viser, de segmentariser, de découper l’espace, de le géométriser, d’ériger des murs droits, de clôturer, de fabriquer - et plus encore : labourer, chasser, calculer, écrire… Qu’on observe le monde humain : il n’y a que des angles.
(1992). A partir du début des années 80, correspondant avec les savants du monde entier, il s’attache au projet «fou» de son Anthropogénie, une «



Illusions et désillusions du travail psychanalytique










Illusions et désillusions du travail psychanalytique
Odile Jacob,
07.05.2010
288 p
ISBN 9782738124685


Présentation de l'éditeur

Depuis la mort de Freud, la psychanalyse a connu un développement répondant à l’extension de ses indications. Il s’est en-suivi certaines avancées qui ont correspondu à des conquêtes nouvelles, mais aussi à de nombreuses désillusions, généralement passées sous silence dans les écrits des psychanalystes.

S’appuyant sur une étude théorique fouillée, André Green propose une vaste investigation clinique qui décrit de nombreux exemples où le travail analytique s’est révélé décevant. Comment expliquer ces déceptions ? Pour lui, elles peuvent être mises au compte des pulsions de mort ou de destruction que Freud a introduites dès 1920. Le présent ouvrage est l’une des premières évaluations cliniques à tenir compte de sa dernière théorie des pulsions. Il permet ainsi de mieux connaître les causes de ces désillusions et vise à les éclairer sans pessimisme systématique ni optimisme excessif.

La vérité de ce qu’est le travail en analyse expliquée par l’un de ses auteurs majeurs.

André Green a notamment publié Narcissisme de vie, narcissisme de mort, La Folie privée, Le Travail du négatif, La Causalité psychique, Les Chaînes d’Éros, Un psychanalyste engagé, La Pensée clinique et Sortilèges de la séduction. Cet ouvrage est son vingt-septième livre.

Auteur : André Green
Éditeur : O. Jacob, Paris
EAN13 : 9782738124685




SAINT-QUENTIN 
AU RAYON DES DESSINATEURS


Dix héros de BD sur le divan avec Dirick
 
 
 Une parodie de séances de psychanalyse réunissant sous forme de pastiches dix des plus grands héros de la BD. C'est le défi que s'est lancé Dirick dans son ouvrage : Le divan de la BD.
« J'ai choisi dix personnages que j'aimais beaucoup. J'ai présenté le vrai problème de chacun après avoir lu leur vie de papier. J'ai travaillé ensuite avec des psychologues qui ont décrypté leur personnalité », explique l'auteur, natif de Paris, qui aura planché sur cet ouvrage pendant un peu plus d'un an.

« Sur le plan graphique, c'était un sacré challenge. Si on prend le personnage de Corto Maltese, il a beaucoup évolué depuis le début. J'ai repris celui que j'avais en tête, même je l'ai un peu caricaturé. Sans aller trop loin car il fallait tout de même qu'on puisse le reconnaître ! »
Gageons qu'après avoir lu cet ouvrage, vous ne verrez plus le Grand Schtroumpf, Gaston Lagaffe, Blake et Mortimer ou encore Joe Dalton de la même manière. « Vous comprendrez mieux pourquoi Joe Dalton est teigneux, Gaston Lagaffe fait des gaffes ou le Grand Schtroumph s'apparente à un Kaiser. »

Père du détective Tim dans Pif gadget et du docteur Psy, Dirick a également, à la demande de la Société protectrice des animaux, collaboré à la série de l'inspecteur Klebs. « Il s'agissait d'inverser les rôles des animaux et des humains pour mieux faire comprendre les problèmes de protection des animaux et de la nature de manière plus générale. »




De nouveaux objectifs pour la santé publique

Le président du Haut Conseil de la santé publique (HCSP), le Pr Roger Salamon, a remis jeudi soir à Roselyne Bachelot le rapport d’évaluation des objectifs de la loi de 2004 sur la santé publique. Sur les 100 objectifs, un peu plus de la moitié (56) seulement ont pu être évalués : 10 ont été globalement atteints et 13 ne le sont que partiellement. « Près de la moitié des objectifs évaluables en 2009 sont atteints, au moins partiellement », souligne le HCSP.

Le Haut Conseil propose, sur la base d’une nouvelle analyse de l’état de santé de la population, de nouveaux objectifs pour les 5 ans à venir, parmi lesquels une meilleure prise en charge et une meilleure réparation des maladies professionnelles ou encore la promotion de l’allaitement maternel. Il recommande de reconduire les objectifs de 2004 qu’ils jugent pertinents, en précisant ou en clarifiant la formulation de certains d’entre eux.

Le rapport, a indiqué la ministre de la Santé, sert de socle de préparation à la prochaine loi de santé publique. Ce sera « une loi resserrée, qui structurera le cadre d’action des politiques de santé publique, afin de le rendre plus efficace, et qui renverra pour une large part le contenu des objectifs de santé publique vers le niveau réglementaire ». Deux axes principaux ont été fixés pour le projet de loi : affirmer les finalités et les priorités de la politique nationale de santé, en particulier la lutte contre les inégalités sociales de santé ; définir le cadre et les outils nécessaires à la gouvernance, à la planification et à la mise en œuvre de cette politique. « Il s’agira en particulier de structurer la gouvernance nationale des politiques de santé, d’organiser les actions de prévention et d’améliorer la réponse aux alertes et crises sanitaires. »

Dr L. A.

Quotimed.com le 07/05/2010



A.-M. PICARD, LIRE / DÉLIRE, PSYCHANALYSE DE LA LECTURE

Parution : juin 2010.

Information publiée le samedi 8 mai 2010 par Natalie Maroun (source : A.-M. Picard)









Anne- Marie Picard,
LIRE / DELIRE, Psychanalyse de la lecture

Éditions Erès
coll. "Psychanalyse et écriture" - dirigée par Jean-Pierre Lebrun
En librairie : 03.06.2010
ISBN : 978-2-7492-1239-5
180 pages


PRÉSENTATION DE L'OUVRAGE :

La psychanalyse nous a appris que le sujet est le produit d'une culture alphabétique, un sujet à la lettre. Aborder « l'illettrisme » comme un symptôme plutôt que comme une maladie, peut nous éclairer sur le refus inconscient des enfants non lecteurs (15% d'irréductibles qui font vraiment couler beaucoup d'encre !) mais aussi sur la nature psychologique du plaisir de la lecture et de l'écriture.

Devenir lecteur, c'est aussi advenir, pour l'enfant, à la dernière initiation : il doit en effet admettre que la lettre n'est pas un dessin de chose, que la signification n'est pas magique mais se construit, à rebours, à la fin de la phrase, qu'il faut travailler avec le matériau de l'écrit pour pouvoir un jour, refouler l'alphabet pour ne plus voir que le sens. Pour pouvoir mettre en pièces(comme dit Freud) la mélodie de la langue de maman et admettre le phonème puis la lettre, il lui faudra aussi séparer son corps à elle du langage, de sa voix et de son regard… c'est-à-dire lamettre en pièces, elle aussi ! Ceci équivaut à un matricide imaginaire, ou tout du moins unedécomplétude de la mère. Ce qui s'avère plus difficile pour les garçons que pour les filles.

Ce qu'on retrouve alors dans le plaisir de la lecture, n'est-ce pas le lieu d'une origine, d'une régression vers le Paradis de la langue maternelle, là ou le mot convoquait la chose ? La « page vierge » de l'écrivain, n'est-ce pas ce territoire fantasmatique perdu où on peut faire comme si… le langage redevenait formule magique, celui de la bonne Fée qui, d'un coup de plume, créerait le monde, le moi et son objet de désir ? C'est là notre dé-lire : faire semblant que les mots sont des pictogrammes empreints de la valeur sacrée ou des maléfices de notre subjectivité… Cette théorie erronée de l'écrit est une solution onirique partagée par les non-lecteurs et les écrivains… mais aussi les sujets de culture alphabétique que nous sommes. Elle est le lieu de naissance de la littérature.

LIRE / DÉLIRE, Psychanalyse de la lecture
TABLE DES MATIÈRES


INTRODUCTION : Les Facteurs inconscients dans la lecture
I. ADVENIR A LA LECTURE

   * Le Sujet avant la lettre : un petit croyant

Le Livre entre totem et tabou
 L'enfant merveilleux
 Le bain de mère : heimlich sweet heimlich

   * Le Sujet à la lettre : castration symbolique et initiation à la langue

Une mère étrangère : Qui parle ?
De la langue maternelle à la langue du livre : Ça parle !
A qui ? La place psychique du lecteur à venir

   * Lettre ou ne pas être : le Cauchemar des non-lecteurs

Théories erronées et croyances: comment ne pas accéder au savoir
Maintenir le statu quo, composer avec l'Impossible
KESKESEXA? Conserver l'illisible

II. LA CHOSE DU LIVRE & LE CORPS LISANT

   * Lire est un acting out

« A haute et intelligible voix » : le Lesen freudien
« Les mots … m'ont livré leur sens sans que je les nomme »

   * L'Autre voix : La Chose du livre

Eros lecteur
La Lecture féminise
Etre ce que lis ou la « pénombre de l'efficacité symbolique »

III. ECRIRE, DE-LIRE : LE REVE DES POETES

   * Dé-lire 1 : Le Livre, Pays natal de l'être

Le moi, un effet de lecture ?
La lettre, ce morceau de corps

   * Dé-lire 2 : Effacer le nom du père

SPLENDID SPLENDID SPLENDID SPLENDID
X : la première lettre d'un nouvel alphabet
Ecrire, un travail du corps contre la précarité de la lettre

   * Dé-lire 3 : Ecrire pour dé-lire la nécessité de la séparation

La voix du père dans les mots
Sur le corps du père, la lettre primordiale
OR : lettres ou ne pas être
Les lettres du père ou l'interdit de lecture
Ecrire, un « inceste magique »

   * Dé-lire 4 : L'Aventure littéraire, un matricide impossible

L'ad-venture ou le Temps hors-la-mère
« Mon épouvantable richesse »
L'impensable inscription ou écrire comme on tue
On a tué la mère... au nom du symbolique
La littérature ou l'échec de la père-version
Conclusion : La lecture, critique de la jouissance maternelle

Responsable : Anne-Marie Picard

Url de référence :
http://www.editions-eres.com/resultat.php?Id=2514



La planète psy dans tous ses états

Les analysants n'ont que faire de savoir si Freud était un héros ou un sale type par Daniel Sibony


07.05.10


Si l'on écarte les colères qui émergent à l'occasion de la nouvelle charge contre Freud, il reste quelques reproches précis que M. Onfray a alignés. "J'aurais aimé, dit-il, un article qui m'explique : pourquoi Freud fait une dédicace élogieuse à Mussolini en 1933 ; pourquoi il s'est rangé du côté du chancelier autrichien profasciste Dollfuss ; pourquoi il travaille avec les nazis pour que, sous couvert de l'Institut Goering, la psychanalyse puisse continuer à exister sous le IIIe Reich ; pourquoi il envisage de promouvoir le psychanalyste non juif Felix Boehm ; pourquoi il existe nombre de textes contre le bolchevisme et aucun contre le fascisme ou le nazisme ; pourquoi il n'a pas guéri l'homme-aux-loups ; pourquoi il n'a pas pris de pauvres sur son divan ; pourquoi il a mis en place le concept d'attention flottante qui permet que l'analyste dorme pendant la séance ; pourquoi il prenait si cher..."

A ces grandes questions qui tiennent dans le creux de la main, la réponse est simple. Freud, en tant qu'homme, était du genre honorable, conformiste, d'autant plus avide de reconnaissance que sa trouvaille restait méconnue.

Ce n'était ni un fin politique ni un suicidaire ameutant les foules contre le nazisme triomphant. Il écrit sur les Soviétiques qui sont loin, mais alerter l'Europe sur le nazisme, à l'époque et quand on est juif, vu que l'Europe était déjà très alertée contre vous, eût été une gageure ; il ne l'a pas tenue. Il a même cru que la puissante Église catholique empêcherait Hitler d'entrer à Vienne...

Il a parlé avec les responsables institutionnels nommés par le pouvoir nazi avec l'espoir de protéger la psychanalyse ; il a fait une dédicace élogieuse à Mussolini, qui n'était pas pour l'extermination des juifs et ne voulait pas, jusqu'en 1937, que les Allemands entrent en Autriche (des fois qu'il puisse être utile un jour...) ; il a plutôt recherché des clients riches et influents pour se faire reconnaître (mais il en prenait certains gratuitement) ; il a cherché à promouvoir des analystes non juifs, de Jung à Jones, pour qu'on ne dise pas que sa trouvaille était une science juive (ce qui à ses yeux en limiterait la portée).

Il n'a pas guéri tous ses patients, loin de là, mais aucun analyste ou thérapeute d'aucune sorte ne l'a fait. Aucune thérapie ne vient à bout de l'esprit humain et de ce qu'il peut inventer, et tant mieux.

Bref, ces accusations n'en font ni un héros ni un sale type. C'est un homme supérieurement intelligent qui a eu la chance de "tomber sur un truc génial", lequel a eu d'énormes conséquences, bien au-delà du peuple "psy".

Et si c'était un sale type ? Admettons-le un instant. On serait alors devant une épreuve banale, fréquente et dure à supporter : le même homme peut faire des vilenies et créer des choses sublimes.

C'est le genre de situations qui met à rude épreuve notre narcissisme : on aime à s'identifier à un homme pour ses prouesses, mais, s'il présente aussi des ombres ou des grosses taches, elles rejaillissent sur nous et nous salissent. C'est désagréable. En même temps, cela nous protège de l'idolâtrie. De sorte que ce double partage - de l'autre et de nous-même - va plutôt dans le sens de la vie.

En fait, tous ceux qui souffrent et qui ont bénéficié de l'apport freudien n'idolâtrent pas Freud. Ce n'est pas qu'ils s'y refusent, ils s'en foutent, l'essentiel est ailleurs. C'est la psychanalyse, et quand elle est bien faite, par des gens doués et généreux, elle aide le sujet à devenir un penseur de sa vie, à la penser en acte et non en appliquant tel ou tel philosophe, fût-il fameux.

Je n'ai encore vu personne se tirer d'affaire et retrouver le chemin de sa vie parce qu'il a lu un manuel de philosophie.

Et c'est peut-être là que l'on peut comprendre la rage du philosophe qui cherche des poux à Freud. Quand c'est un nietzschéen, comme cela semble être le cas, il ne peut qu'être exaspéré par le fait que chaque vérité produite par Nietzsche intuitivement, et parfois génialement, la psychanalyse la découvre ou la retrouve dans sa pratique à une échelle bien plus vaste et en la menant beaucoup plus loin dans la vie des sujets.

Un exemple ? Nietzsche dit quelque part : "Tu ne deviendras jamais que ce que tu ignores de toi-même." C'est joli, mais en termes "psy" cela veut dire que ce que tu refoules revient irrésistiblement et l'emporte sur tes ratiocinations. Mais l'avantage, c'est que la psychanalyse ouvre avec cela un vaste champ où s'étudie le refoulement et ses retours, ses craquages, ses rafistolages symptomatiques ; cela ouvre l'immense étude des fantasmes, des symptômes, des blocages, des mal-être...

Ce que Nietzsche découvre à la main, elle le découvre à la force d'une vaste machinerie où s'impliquent des millions de gens qui en prennent conscience et en tirent des conséquences pratiques.

On pourrait ainsi multiplier les exemples. En somme, M. Onfray a dû se dire que la psychanalyse avait diminué son Père Nietzsche, alors il diminue le père de la psychanalyse. Mais, ce faisant, il œuvre dans un sens obscurantiste, car beaucoup de ceux qui auraient vraiment besoin d'une analyse, et qui pourraient être aidés par une cohorte de jeunes analystes assez libres et doués, ceux-là ajouteront le livre d'Onfray à l'empilement de leurs résistances.

Au mieux, ils prendront des cours de philo, mais philosopher comme Nietzsche ou Aristote ne vous fera pas connaître le penseur que vous êtes de la vie, que vous seul êtes capable de penser et de vivre.

Daniel Sibony est psychanalyste et écrivain, auteur des "Sens du rire et de l'humour" (éd. Odile Jacob, 240 pages, 23 euros) et du "Peuple "psy" : situation actuelle de la psychanalyse" (Points, 2007).

Article paru dans l'édition du 08.05.10 




Le ressentiment du philosophe, une demande d'analyse en souffrance, par Marc Strauss

07.05.10

Il le dit, la psychanalyse, ça ne tient pas, et il le démontre. Il est vrai que pour cette démonstration tout lui est bon, la théorie comme la vie et les légendes de son inventeur et ses héritiers. Bien sûr on nous dira, et les meilleures plumes l'ont fait, que Freud a changé radicalement la perspective sur ce qui anime l'être humain ; qu'il a permis d'intégrer dans sa connaissance un vaste champ jusqu'à lui maintenu dans l'ignorance, dédaigné ou exploité à des fins d'asservissement ; qu'il a ainsi offert à la souffrance de l'homme une boussole pour lui permettre de supporter le fardeau de sa vie jusqu'aux limites de l'impossible en traçant sa propre route.

Mais Michel Onfray a néanmoins raison, rien ne tient. Tout, tout le temps, est prêt à s'abîmer dans la contradiction et l'échec. Une théorie ? Vérité aujourd'hui, erreur demain. Les neurosciences ne sont-elles pas chaque jour sur le seuil de nous démontrer que nous sommes des machines moléculaires ? Un projet, voire un engagement passionnel... une simple rage de dents vous en détourne ! (Freud, L'Introduction au narcissisme). Certes, les savants et les moralistes ont depuis longtemps renoncé à leurs visées totalitaires et impérialistes et font preuve quant à leur savoir d'une modestie de bon aloi. N'a-t-on pas appris, il y a quelques jours, qu'à la suite des découvertes faites avec le télescope Hubble la physique était à réinventer ? Pendant ce temps, les psychanalystes, refusant toute réfutabilité, s'arc-boutent sur quelques mêmes textes datés.

En réalité, il n'est pas un concept de Freud qui n'ait été discuté, critiqué, voire combattu par Freud lui-même ou ses successeurs. Néanmoins, il est vrai que le geste fondateur de la psychanalyse reste pour eux, sinon inexplicable, du moins indiscutable : l'association libre.

Encouragez quelqu'un à parler de manière à ce qu'il accepte d'essayer de vous dire tout ce qui lui passe par la tête, et il s'en déduira toute une série de conséquences. En particulier le fait que le sujet tienne à continuer, parce que ça lui fait un effet très particulier. Il peut même, sans nécessairement s'en rendre compte, tenir à la relation qui se noue avec qui l'écoute.

Là donc, ça tient, et rudement. Le fait est, d'expérience. Pourquoi ça tient, et où ça va, tout cela se discute. D'autant que toujours le sens fuit, comme disait Lacan. Autrement dit, il n'y a pas de dernier mot de la vérité et là, Michel Onfray a bien saisi le truc. Le problème, c'est qu'il en déduit du coup que la psychanalyse est invalidée, alors que justement ce n'est que par là qu'elle fonde sa certitude.

Freud d'abord, Lacan ensuite, se sont échinés à saisir, au-delà de l'image, le traumatisme inaugural qui fait l'être humain en souffrance d'une vérité qui lui échappe. Et ils ont trouvé. Freud l'a exprimé d'un mythe, la castration, dont Lacan a montré qu'elle était le nom de l'impossibilité à tout dire, qui nous frappe tous, et dont nous recouvrons l'horreur dernière par nos croyances, conscientes aussi bien qu'inconscientes. Ils ont trouvé, au-delà de ces croyances incertaines, le moyen pour qui le souhaite d'ouvrir les yeux sur ce qui, dans la vie, le supporte, dans ce qu'il a de plus intime, de plus singulier.

On l'aura compris, si nous donnons raison à Michel Onfray, ce n'est que pour la moitié du chemin. Que n'a-t-il mesuré que c'est à partir de ses conclusions mêmes que la psychanalyse se poursuit et se démontre, dans ce qu'elle a d'unique : l'accès à ce qui fait le réel propre à chaque sujet, qui n'est bien sûr pas le réel universel de la science, mais n'en est pas moins sans conséquences majeures dans la vie de tous.

Est-il pertinent de se demander pourquoi Michel Onfray n'a pas poursuivi son chemin au-delà de sa découverte de l'inconsistance de la vérité, ce qui l'aurait amené, à n'en pas douter, à exercer son intelligence dans une tout autre direction ? On nous permettra d'interpréter l'épaisseur de son livre et les relais nombreux qu'il a trouvés dans les médias comme l'expression d'un ressentiment, partagé par beaucoup. Un ressentiment, fruit d'un amour déçu, pour s'être cru abusé, et qui n'a pas trouvé le relais congru pour s'interroger sur la tromperie de l'amour, voire de la parole elle-même.

Autrement dit, le livre de Michel Onfray, avec ses outrances, ses excès, sa mauvaise foi, ses pensées nauséabondes, ressemble par trop à ce qui se déchaîne sur un divan pour n'y pas voir une demande d'analyse restée en souffrance. La perspective de rester seul avec une angoisse folle de se tromper justifie quiconque de se montrer aussi brouillon que téméraire dans son assaut contre son idole du moment.

Et parce que notre époque spécialement y contraint les meilleurs et les plus sensibles, Michel Onfray n'est pas seul à s'indigner de ce que, malgré toutes leurs promesses, les savoirs se révèlent trompeurs. De surcroît, il est tout à fait justifié de prendre la psychanalyse comme cible centrale de cette rancoeur, car elle a les moyens, à défaut de le résoudre, de répondre du malaise dans la civilisation. Encore, il est vrai, faudrait-il que les psychanalystes ne l'oublient pas, et s'emploient mieux à le faire entendre.

Raison de plus pour être attentifs à quelques pensées dignes qui, loin de rendre les armes devant la solitude du sujet contemporain égaré dans un amas de mensonges, lui ouvrent une voie où il peut trouver à s'appuyer, les pensées d'un Freud, d'un Lacan, ou d'un Kertész dont le dernier livre paru en français, L'Holocauste comme culture (Actes Sud), ne traite de rien d'autre.

Marc Strauss est psychiatre-psychanalyste, membre fondateur de l'Ecole de psychanalyse des forums du champ lacanien (EPFCL).

Article paru dans l'édition du 08.05.10