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vendredi 13 janvier 2017

La voiture autonome, une amie qui vous veut du bien

Pour rassurer les passagers, le véhicule du futur veut « s’humaniser ». Voici quelques-uns des prototypes présentés au dernier CES de Las Vegas.
LE MONDE  | Par 


Le Concept-i de Toyota, à Las Vegas, le 4 janvier.


Dessiné en goutte d’eau, le Toyota Concept-i est d’un blanc éclatant. Lorsque son propriétaire s’en approche, l’un des deux phares semble se plisser, comme une paupière qui adresserait un clin d’œil. Exposé au Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas du 5 au 8 janvier, le Concept-i témoigne de la volonté du premier constructeur mondial de faire prévaloir « une vision plus humaine des véhicules du futur » avec un maître mot : « l’émotion ». Qu’on se le dise, la « voiture partenaire » des années 2030 sera capable de prendre le relais du conducteur, le rassurer, le distraire ou lui proposer des itinéraires inédits pour rejoindre sa destination lorsqu’elle le sentira d’humeur vagabonde.


« Beaucoup de constructeurs développent une vision très froide de la voiture autonome », Ian Cartabiano, designer.










Derrière la rigueur des algorithmes et la rectitude de l’intelligence artificielle se profilerait une nouvelle relation de complicité entre l’homme et l’automobile, assure Toyota. « Je ne voulais pas dessiner cela sur quatre roues », insiste Ian Cartabiano, principal artisan de ce prototype, en vous tendant son iPhone. Le Concept-i se présente comme le manifeste de la « chaleur cinétique », néologisme un peu fumeux qui désigne un acte de résistance face à la dérive de l’automobile réduite à un objet de mobilité purement technologique.

« Beaucoup de constructeurs développent une vision très froide de la voiture autonome », soupire le designer, qui exerce au sein du bureau de style californien de Toyota. Une pierre lancée dans le jardin des constructeurs allemands, dont la vision du futur de la voiture ap­paraît moins coutumière des grands élans empathiques.

Arrêt-café et micro-potager


La voiture de demain sera mon amie. Presque contigu au stand Toyota, l’espace d’exposition d’Honda au CES de Las Vegas affiche cette même conviction avec autant d’enthousiasme. Le concept NeuV (pour New Electric Urban Vehicle, soit nouveau véhicule urbain électrique) prend la forme d’une toute petite citadine à deux places pourvue de larges surfaces vitrées. L’habitacle, parfaitement épuré et rappelant presque celui des modèles des années 1960, intègre un immense écran occupant l’intégralité de la planche de bord. « NeuV sera en capacité d’épouser l’état d’esprit et de s’adapter aux sentiments du conducteur, grâce au système de reconnaissance faciale et à la perception de son rythme cardiaque », détaille Nick Renner, du centre de design avancé implanté par Honda à Los Angeles.


Le Honda NeuV présentée au CES de Las Vegas.


Destinée aux services d’autopartage des grandes agglomérations, la voiture copine d’Honda aura perçu que son occupant a beaucoup ri lors d’une conversation téléphonique. Elle pourra s’autoriser à glousser en retour, voire à lancer quelques bons mots. Enoncer quelques propos rassurants si celui-ci paraît, au contraire, stressé ou proposer un arrêt-café si la destination nouvellement programmée par le GPS promet d’être atteinte bien avant le rendez-vous programmé dans l’agenda électronique. Voire suggérer une ambiance musicale. Autant de prestations optionnelles, donc facultatives.


Présenter le véhicule du futur comme celui des émotions partagées vise aussi à répondre à la sourde inquiétude qui entoure l’avènement annoncé de la voiture sans conducteur.
















Panasonic, sous-traitant de nombreux constructeurs, expose dans un autre hall son « habitacle du futur » résilient, présenté comme un moyen de rétablir la communication intrafamiliale. Assis en vis-à-vis, les quatre occupants ne vaquent plus séparément à leurs occupations. Ils peuvent déjeuner ou jouer au Monopoly autour d’une table centrale composée de quatre larges écrans. « La voiture du futur est égalitaire ; le conducteur n’est plus le seul maître à bord, celui qui verrouille d’autorité les vitres coulissantes ou impose le réglage de la climatisation. Les rôles sont rééquilibrés », fait valoir Fabien Roth, responsable du marketing pour l’activité « Infotainment » de Panasonic.

« Réticence et scepticisme »


Quant au petit constructeur suisse Rinspeed, parfois présenté comme un think tank de l’automobile, il humanise à sa manière son concept-car Oasis. La partie supérieure de la planche de bord de cette citadine électrique est spécialement aménagée pour recevoir un micro-potager.

Sans doute, ces prototypes de salons sont-ils largement destinés à soigner l’image de marque de constructeurs et d’équipementiers soucieux de prendre la pose au cœur d’une manifestation devenue la grand-messe annuelle des nouvelles technologies. Présenter le véhicule du futur comme celui des émotions partagées vise aussi à répondre à la sourde inquiétude qui entoure – si l’on en croit de récentes et convergentes études d’opinion – l’avènement annoncé de la voiture sans conducteur à partir de la prochaine décennie. De toute évidence, la perspective de se laisser conduire par un robot apparaît encore loin de s’être imposée.

« Toutes les grandes innovations ont engendré des résistances au changement. Au Royaume-Uni, on a cru pouvoir imposer qu’un homme à pied agitant un drapeau prévienne de l’arrivée des pre­mières automobiles », rappelle l’ethnologue Melissa Cefkin. 
La chercheuse, qui travaille pour Nissan dans la Silicon Valley, ­considère toutefois que « les réticences et le scepticisme diffus qui se manifestent autour de la voiture autonome méritent d’être pris très au sérieux ». Selon elle, « il faut veiller à tenir un juste équilibre entre l’effervescence liée à la nouveauté technologique et l’établissement d’un lien de convivialité avec la voiture, d’autant que celle-ci va devenir un objet de plus en plus partagé ».


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