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mercredi 7 décembre 2016

Le repérage de l'autisme chez l'adulte s'organise en Paca faute de recommandations officielles

Alors que les établissements naviguent à vue pour assurer la prise en charge des adultes autistes, certains tentent sur le terrain d'assurer le repérage et la compréhension des résidents souffrants de troubles du spectre autistique. C'est le cas de l'unité mobile Les Makaras, en région Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca), lancée en novembre 2014.
Alors que les recommandations de bonnes pratiques de la Haute Autorité de santé (HAS) et de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm) tardent à indiquer la direction à prendre autour de l'autisme chez l'adulte, en région Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca), l'unité mobile d'évaluation Les Makaras de l'hôpital Valvert de Marseille (Bouches-du-Rhône) dresse un premier bilan de son action à deux ans d'existence. À l'instar des dispositifs de Niort (Deux-Sèvres) et de la Salpétrière (Paris), celle-ci entend assurer le repérage des troubles autistiques pour faciliter la prise en charge des résidents sur les établissements médico-sociaux.

Trop de résidents sans diagnostic

Le projet est né d'un constat simple. "Nombre de résidents présentent des signes cliniques d'autisme qui ne sont pas repérés, explique le Dr Raphaël Curti, médecin référent pour l'unité. Après en moyenne quinze ou vingt ans d'hospitalisation avant leur entrée en maison d'accueil spécialisée (Mas), ils arrivent sans bilan et sans diagnostic". Intrinsèquement lié au manque de formation des professionnels de santé (généralistes, psychiatres ou autres spécialistes), un tel déficit influe malheureusement sur la prise en charge. Le responsable le souligne d'ailleurs, "un cas rare et difficile avec des troubles de comportements graves va déstabiliser tout un établissement".

Lancé en novembre 2014 et financé sur les crédits du troisième plan Autisme par fongibilité asymétrique*, le projet entendait en premier lieu améliorer la connaissance quant à la prévalence des troubles du spectre autistique (TSA) dans les structures médico-sociales pour adultes. "L'idée, avant de mettre en place une politique de soins, était de savoir quelle était la proportion de personnes atteintes de TSA dans les établissements", poursuit le médecin.
"Nous nous sommes donné les moyens de faire plus que du diagnostic."
Dr Raphaël Curti, médecin référent des Makaras
En deux ans, l'équipe de sept personnes a mis en évidence des carences qui nécessitent des ajustements urgents à plus ou moins long terme. "L'existence de l'équipe mobile permet aux établissements de mettre un mot sur une situation, mais aussi de les accompagner dans la prise en charge", continue Raphaël Curti. Souvent, la demande émane d'ailleurs des établissements eux-mêmes. Mais le travail de l'équipe mobile ne s'arrête pas à la question du seul repérage.

Cinq à dix cas problématiques par établissement

Depuis le lancement de la démarche, une centaine de demandes a été déposée auprès de l'unité mobile Les Makaras. L'équipe estime avoir rencontré 90% des établissements qui accueillent du public autisme et 95% des structures agréées autisme sur son territoire d'action. Si l'équipe ne travaille que sur un cas à la fois par établissement — les plus urgents en priorité —, le Dr Raphaël Curti, médecin référent, évalue entre cinq et dix le nombre de dossiers potentiellement problématiques sur chaque structure.

"Initier la réflexion" en établissement

"Nous nous sommes donné les moyens de faire plus que du diagnostic", se satisfait le responsable. Sur la base des échanges et des observations recueillies, l'équipe réalise de fait un rapport précis et se prononce sur les pistes thérapeutiques possibles, que ce soit sur le plan comportemental, sensoriel ou médicamenteux. Pour lui, c'est par ailleurs évident : ce bilan "initie la réflexion de l'établissement" sur les réponses à apporter. Et bien que l'ensemble des bénéfices du travail mené ne peuvent, de son aveu, pas encore s'observer, Raphaël Curti l'assure : les efforts débouchent sur une prise de conscience des directeurs et des soignants, un consensus dans la prise en charge et une amélioration de la qualité des soins. L'usager, lui, s'en retrouverait pour sa part plus apaisé.

Reste un regret. "On arrive en prévention mais on arrive souvent trop tard", souffle le médecin. Dans ce contexte, l'équipe ne ferme pas la porte à la rédaction d'un guide sur les conduites à tenir sur les troubles du comportement. En attendant, l'unité mobile devra se concentrer sur une nouvelle mission en 2017. Financée sur le fonds d'intervention régional (Fir) 2016, celle-ci permettra à l'unité de tester et d'évaluer sa propre intervention thérapeutique à visée de prévention de rupture de parcours de soins. Avec deux perspectives à long terme : la création d'un service d'évaluation de crise neurocomportementale et la création d'un service et d'un réseau de soins somatiques pour personnes avec déficience intellectuelle non communicantes — autistes, ou non.

Dix propositions soumises à l'ARS Paca

Afin d'améliorer la prise en charge et l'accompagnement des personnes souffrant de troubles du spectre autistique (TSA) sur la région, le comité d'entente régional autisme (Cera) Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca) a transmis, le 3 novembre dernier, un série de recommandations à l'adresse de Valérie Toutin-Lasri, chef du projet du plan Autisme au secrétariat général du Comité interministériel du handicap (CIH). Au nombre de dix, celles-ci entendent :
  • améliorer l'information et la gestion des situations critiques et complexes en centralisant l'information au niveau des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ;
  • éviter les ruptures de parcours au moment du passage à l'âge adulte et améliorer l'anticipation des besoins au niveau des territoires ;
  • permettre l'accès à des soins spécialisés et à des ressources expertes en cas de problème somatique et de troubles graves du comportement ;
  • développer la formation initiale et la qualité de l'enseignement de l'autisme auprès de l'ensemble des professionnels amenés à rencontrer des personnes avec TSA (professionnels de santé, du médico-social et du social, de l'enseignement) ;
  • anticiper la problématique du vieillissement des personnes avec TSA et développer des dispositifs permettant des réponses graduées selon le niveau de dépendance dans une logique de continuité de l'accompagnement ;
  • assurer la cohérence et la continuité des accompagnements en partant des besoins de la personne et de son projet de vie tout en allégeant les contraintes administratives ;
  • poursuivre les efforts en vue d'améliorer le repérage, le diagnostic et l'intervention précoce ;
  • poursuivre et développer le soutien des actions en direction des aidants familiaux ;
  • garantir un accès à la scolarisation en milieu ordinaire ;
  • promouvoir l'inclusion en milieu ordinaire pour les personnes avec TSA.
Agathe Moret

* L'équipe mobile fonctionne sur une dotation proche de 400 000 euros (€) par an pour financer notamment les postes en équivalent temps plein (ETP) de deux neuropsychologues, de deux infirmières, d'un médecin, de 0,5 ETP d' assistante sociale et 0,5 ETP de secrétaire.

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