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mardi 4 octobre 2016

L'agent hospitalier de sécurité serait plus à même de sécuriser les urgences qu'un vigile

LE FAIT

Ce 3 octobre, la FHF espère obtenir du ministère un plan de sécurisation des hôpitaux, notamment des urgences. Au-delà des caméras, boutons pression et autres sas de sécurité, faut-il privilégier aux vigiles embauchés par des prestataires privés des agents hospitaliers de sécurité ? À cette question, les urgentistes répondent par l'affirmative.

L'ANALYSE

Faut-il placer des vigiles à chaque entrée des urgences ? La question revient sur le tapis quelques jours après l'agression extrêmement violente survenue le 13 septembre au CH Delafontaine de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Ce jour-là aux environs de 23 heures, un médecin et deux infirmiers ont été pris à parti par le frère d'un patient, furieux de devoir attendre. Ce dernier a ainsi roué à coups de pied l'urgentiste, lequel a eu les deux mains fracturées et s'est vu délivrer une interruption totale de travail de deux mois. Quant aux deux autres soignants, venus au secours du praticien, ils ont eux aussi été frappés*.

Faire le lien entre soignants et patients

Ouvert sur l'extérieur dans "un territoire en grande difficulté", le service des urgences de Saint-Denis a bénéficié ces dernières années d'importants investissements et d'efforts d'organisation en matière de sécurité, a fait savoir dix jours plus tard l'établissement francilien par communiqué (lire l'encadré). "L'équipe de sécurité, composée globalement de vingt agents, est prête à intervenir à tout moment", ajoute le CH dionysien, précisant que le soir en question, "les agents de sécurité sont arrivés sur place en moins de deux secondes grâce à un dispositif de soixante caméras de vidéosurveillance présentes dans tout l'hôpital". Sans compter que des effectifs de police étaient également déjà sur place au moment de l'agression. Toujours est-il que, depuis les faits, un agent de sécurité est désormais posté en permanence aux urgences la nuit de 19h à 7h du matin. En outre à compter de ce début octobre, deux agents de médiation et de prévention s'ajoutent en journée aux urgences, "afin de faire le lien entre les équipes soignantes et les accompagnants des patients" (lire ci-contre). En parallèle, l'hôpital indique poursuivre son plan de formation à la gestion du stress ainsi qu'à la gestion de l'agressivité, qu'il propose à ses personnels. Il s'attèle également depuis quelques mois à rédiger, de manière "partagée", un projet de protocole hôpital-police-justice sur le département de la Seine-Saint-Denis, rappelant être en liaison permanente avec un officier de police référent du commissariat dionysien, "interlocuteur privilégié" de l'établissement.

318 000 € investis pour la sécurité sur 2015-2017 au CH Delafontaine de Saint-Denis

  • 140 000 euros (€), afin de renforcer le contrôle d'accès et l'aménagement du poste central de sécurité du CH de Saint-Denis et d'installer un nouveau portail aux urgences ;
  • 100 000 € pour remplacer les caméras de vidéosurveillance ;
  • 78 000 € sur 2015-2017 pour acquérir de nouvelles caméras et étendre le réseau de surveillance aux rues et trottoirs qui desservent l'hôpital.

"Une meilleure réponse au meilleure coût"

Ce 3 octobre, se tient justement une rencontre entre la FHF et le cabinet de la ministre des Affaires sociales et de la Santé qui, espère la fédération, aboutira à mettre sur pied un plan de sécurisation des établissements soutenu financièrement par l'État. Cela suppose-t-il de systématiser les vigiles ? Ou bien de leur préférer des personnels hospitaliers de sécurité ? Une chose est sûre, comme le relatait le 27 septembre au micro de BMFTV le chef des urgences de l'Hôpital européen Georges-Pompidou à Paris, le Dr Philippe Juvin : "Quand on fait ce métier d'infirmier, puisque ce sont les premières victimes, ou de médecin, ou d'aide-soignant, on ne se forme pas au karaté". À Saint-Denis, l'agent en poste la nuit aux urgences depuis la mi-septembre relève d'un prestataire de service et est employé par une société privée extérieure. Mais du côté de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), on pencherait plutôt pour des personnels hospitaliers de sécurité. À l'inverse des vigiles, qui sont "limités" dans leur compétence hospitalière, des agents intégrés aux équipes offrent "une meilleure réponse au meilleur coût", glisse ainsi le Dr Christophe Prudhomme, porte-parole du syndicat. L'idée est aussi, selon lui, de "réintroduire des humains formés à l'agression verbale pour ne pas que ça parte en vrille" plutôt que d'opter pour un tout sécuritaire qui systématise les barrières et vitres blindées.

"Dissuader, identifier puis freiner la progression"

"Les médias se focalisent sur les cas graves, qui restent rares, mais on n'arrivera jamais à se protéger de cette violence brutale. Par contre le plus inacceptable, c'est la violence quotidienne, ces agressions verbales qui donnent une ambiance "agressogène" aux urgences", souligne pour sa part le Dr François Braun, président de Samu-Urgences de France (SUDF). "Et c'est là-dessus qu'il faut avancer." Pour aller de l'avant, cela suppose une réponse protéiforme combinant, pour réduire la saturation des services et le temps d'attente, un cheminement différencié et sécurisé des flux, une meilleure gestion de l'aval, des locaux adaptés... "Il y a encore de trop nombreux services d'urgences où les conditions d'accueil ne sont pas acceptables !". Quant aux quelques "sites particuliers" où le risque d'incident grave est clairement établi, une vraie surveillance s'impose. Mais, là aussi, ajoute l'urgentiste, rejoignant son collège de l'Amuf, en privilégiant plutôt aux vigiles des agents hospitaliers de sécurité. Ces derniers peuvent en effet aller plus loin dans le service jusqu'aux box de soins et ne pas rester devant la porte d'entrée du service. Par ailleurs, la diffusion aux personnels de boutons pression doit être accélérée, de même que doit être pensé un plan de sécurisation des locaux pour pouvoir fermer des urgences en cas d'accident : "Si un terroriste y entre aujourd'hui, il fait un carnage avant que quelqu'un réagisse". L'objectifa minima est donc de parvenir à le circonscrire à la salle d'attente dans une triple logique de "dissuader, identifier puis freiner la progression".

Cela suffirait-il pour autant à empêcher, comme c'est parfois le cas, une foule pressante d'une centaine d'individus de réclamer le corps d'un proche sur le parking des urgences ? Rien n'est moins sûr...
Thomas Quéguiner

* Âgé de 21 ans, l'agresseur a été placé sous contrôle judiciaire dans l'attente de son procès fixé le 4 novembre prochain.
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