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mercredi 5 octobre 2016

Êtes-vous taphophobe ?

03/10/2016



« Mars 1988, Belgique : déclaré mort par des médecins, un homme de 33 ans échappe au pire grâce à l’entrepreneur de pompes funèbres. Juillet 2011, Afrique du Sud : un homme de 50 ans se réveille à la morgue, 24 heures après avoir été déclaré mort. Juin 2012, France : une femme de 87 ans déclarée morte s’est réveillée au funérarium... » Certes exceptionnel, le risque de se retrouver « enterré vivant »[1] est néanmoins réel. Au point que les dernières volontés de certaines personnes, tels Frédéric Chopin et son père, consistent parfois à faire confirmer leur décès, en demandant notamment « avec insistance que soit ouvert leur corps avant l’inhumation, de peur de subir le sort de ceux qui se réveillent dans la tombe. »
Cette angoisse particulière de se retrouver enterré encore en vie est décrite en 1891 par le psychiatre italien Enrico Morselli (1852-1929) sous le nom de « taphophobie. »
Hantés par la peur d’être tenus abusivement pour morts, et de se réveiller dans un cercueil, les sujets taphophobes souffriraient ainsi d’une « condition extrême de claustrophobie », liée aux problèmes de la mort apparente et de l’enterrement prématuré [2].

Des cercueils de sécurité et un traité sur les mesures de prévention

Très rare désormais, mais fréquente au XIXème siècle où elle passait presque pour un phénomène de société (ce qui confirme l’influence du contexte culturel sur le cours des problématiques psychiatriques), cette angoisse paroxystique retenait alors l’attention des auteurs (comme Edgar Allan Poe dans plusieurs récits : Berenice, The Cask of Amontillado, The Fall of the House of Usher, The Premature Burial), des médecins... et des inventeurs, en quête de « cercueils de sécurité » (on songe au coffre de verre où les sept nains déposent Blanche Neige dans l’attente de sa « résurrection », après le baiser du Prince Charmant !) visant à empêcher une inhumation indue, ou du moins à permettre à l’occupant illégitime de signaler son maintien parmi les vivants.
En 1849, le médecin français Eugène Bouchut (1818–1891) publie ainsi un Traité des signes de la mort et des moyens de prévenir les enterrements prématurés[3]. Si la taphophobie a pratiquement disparu du registre psychiatrique actuel, son « équivalent moderne pourrait être la crainte d’un prélèvement d’organes sur un patient encore en vie » mais tenu pour décédé, du fait d’un état de mort apparente.
Dr Alain Cohen
RÉFÉRENCES
Marco Cascella: Taphophobia and ‘life preserving coffins’ in the nineteenth century. History of Psychiatry 2016, 27(3): 345–349.

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