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vendredi 18 mars 2016

PSYCHIATRIE Le gestionnaire du Centre psychothérapique de l'Ain n'envisage pour l'heure aucune sanction

À la suite d'un rapport pointant des recours à l'isolement et à la contention dans des proportions inédites au Centre psychothérapique de l'Ain, le président de l'association gestionnaire n'envisage pour l'heure aucune sanction contre des salariés. Il reconnaît des "dysfonctionnements" mais évoque un rapport quelque peu "outrancier".
Le président de l'association Organisation pour la santé et l'accueil (Orsac), Jean-Claude Michelon, gestionnaire du Centre psychothérapique de l'Ain (CPA), annonce ce 17 mars à Hospimedia que l'association n'envisage pour l'heure aucune sanction contre la direction ou des médecins, salariés du CPA. L'établissement de santé privé d'intérêt collectif (Espic) situé à Bourg-en-Bresse, seul établissement de soins psychiatriques du département de l'Ain, a fait l'objet d'un rapport accablant du contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) publié au Journal officiel (JO) du 16 mars. Le rapport dénonce notamment un recours à l'isolement et à la contention des patients dans "des proportions jamais observées jusqu'alors" et des "violations graves des droits fondamentaux" (lire ci-contre). 

"Ni des tortionnaires ni des maltraitants"

Dès la parution du rapport au JO, l'ARS Auvergne-Rhône-Alpes a organisé un point presse pour relayer les annonces de la ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, en réponse aux recommandations du CGLPL. Le CPA dispose en effet de six mois pour se mettre en conformité avec l'ensemble des recommandations du contrôleur général. "C'est un établissement que l'on connaît, avec lequel nous conventionnons", a indiqué la directrice générale de l'ARS, Véronique Wallon. Elle précise que sans attendre la publication du rapport, l'ARS a convoqué la direction de l'établissement et lui a demandé "un plan d'action et des engagements qui ont donné lieu à une lettre de mission". La direction générale (DG) a annoncé qu'un point serait réalisé toutes les six semaines pour vérifier l'avancement de la mission, et qu'une inspection inopinée serait réalisée après la période de six mois. Questionnée sur d'éventuelles sanctions liées à des responsabilités individuelles et internes au CPA, la DG affirme qu'il est du seul ressort de l'association Orsac d'en décider. "L'ARS n'est pas le tuteur de l'établissement privé, elle conventionne, valide le projet d'établissement et accompagne financièrement quand cela est nécessaire", a expliqué Véronique Wallon. "Ce que nous ont confié le directeur [du CPA] et le président de la commission médicale d'établissement (CME) lors de nos échanges, c'est qu'ils n'avaient pas conscience d'une certaine dérive des pratiques, qui a sans doute été progressive", a-t-elle ajouté, précisant que ces derniers ne se considéraient "ni comme des tortionnaires ni des maltraitants".

Sollicité par Hospimedia, le président de l'association précise qu'il apporte dans un premier temps, dans un climat médiatique tendu, une "réponse chargée d'émotion". "On ne se reconnaît pas" dans la description faite de l'établissement, "c'est très très dur", confie-t-il. Il regrette par ailleurs que l'équipe du CGLPL ait "opposé la non-liberté" de l'association "de faire des remarques dans le cadre de l'audit" réalisé dans l'établissement. "Il y a eu une volonté médiatique très forte de stigmatiser un certain nombre de pratiques", estime-t-il. "Nous n'avions pas conscience d'être des bourreaux ni des tyrans", appuie-t-il avec ironie. "Nous avions l'impression de faire correctement notre travail. La psychiatrie est une tâche difficile [...], au centre de multiples contraintes, fortes, le respect des libertés individuelles mais aussi le respect de la sécurité de nos salariés et de la population", poursuit le président de l'Orsac. "Nous essayions de faire, à la lumière de nos savoirs et de nos moyens, à travers ses contraintes, et loin de nous était l'intention d'humilier les gens", souligne Jean-Claude Michelon. 

Des dysfonctionnements et l'absence de "vision médicale unique"

Le président de l'Orsac reconnaît tout de même des "dysfonctionnements qui méritent d'être corrigés" et des "nécessités d'améliorations" dans l'établissement, tout en qualifiant le rapport du CGLPL d'un "tantinet outrancier". Il cite notamment sur ce point "une extrapolation statistique" sur le nombre de journées d'isolement de patients à l'année. Plus globalement, selon Jean-Claude Michelon, il manque notamment "une vision médicale unique" au CPA, ce qu'il concède être "une faiblesse" pour la structure de soins qui compte environ quatre-vingts médecins. "Cette vision médicale unique n'était pas jusqu'alors l'objectif principal de la CME", reconnaît-il. L'élaboration de cette "pensée médicale commune" est partie intégrante du nouveau projet d'établissement en préparation depuis plusieurs mois, indique-t-il, en complément des mesures correctrices immédiates déjà décidées.

Il est "possible qu'il y ait des responsabilités individuelles mais les causes sont complexes, elles relèvent des responsabilités médicales du praticien mais aussi du mode de fonctionnement de la CME, de la façon de travailler de l'établissement, etc.", commente le président de l'Orsac, répétant que les "responsabilités humaines sont toujours très difficiles à établir". Il estime qu'il faudra certainement travailler sur "un arbre des causes" des dysfonctionnements. Tout en insistant : "Je ne vais pas chercher de responsabilités individuelles ; je ne suis pas dans une philosophie de regard dans le rétroviseur, ce qui m'intéresse, c'est de voir comment on progresse." Mais il se peut "qu'un ou deux médecins n'acceptent pas le consensus dans lequel on veut arriver, et dans ce cas-là, ils partiront". Le nouveau projet d'établissement, "qu'on a peut-être tardé à mettre en œuvre", prévoit d'ouvrir davantage les unités, confie-t-il, "puisqu'on avait bien pointé qu'on ne pouvait rester en l'état". Le CPA compte également accroître ses coopérations avec d'autres acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux. Il convient notamment de trouver davantage de solutions d'aval pour permettre les sorties de patients dont les hospitalisations complètes au centre psychothérapique ne se justifient plus.  
Caroline Cordier
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