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vendredi 16 octobre 2015

L'étude Milestone vise à améliorer le continuum de prise en charge des adolescents en psychiatrie


L'étude Milestone, qui est lancée ce mois d'octobre dans huit pays européens, vise à comprendre et améliorer la transition des jeunes entre services de pédopsychiatrie et structures de psychiatrie adulte. Ce projet de recherche de vingt-sept mois sera coordonné en France par le CHRU de Montpellier.

Les professionnels constatent souvent à regret un manque de relais entre la pédopsychiatrie — ou psychiatrie infanto-juvénile — et la psychiatrie adulte. Or l'amélioration de l'accès aux soins des adolescents est un réel enjeu pour la psychiatrie générale. En effet, comme le montre la littérature scientifique, le repérage précoce des troubles permet d'envisager un pronostic plus favorable, notamment celui des pathologies psychotiques. L'enjeu de la transition entre psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent et psychiatrie adulte était précisément au programme d'une journée scientifique de la Fédération de recherche en santé mentale (F2RSM) du Nord-Pas-de-Calais, organisée le 15 octobre à Lille. À cette occasion, le Pr Diane Purper-Ouakil, chef de pôle au département de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent du CHRU de Montpellier, a présenté les grandes lignes de l'étude européenne Milestone, qui est lancée ce mois d'octobre dans huit pays européens (Grande-Bretagne, Irlande, Italie, France, Allemagne, Belgique, Pays-Bas et Croatie), grâce à un financement du 7e programme cadre de l'Union européenne. En France, le centre coordonnateur de l'étude sera le CHRU de Montpellier, qui s'appuiera sur d'autres établissements, dont le CHRU de Lille, a indiqué Diane Purper-Ouakil. Pour réaliser cette étude, qui va durer vingt-sept mois (pour l'étude principale), est prévue une inclusion de plus de 1 000 adolescents en Europe.

Identifier les lacunes

L'étude principale va consister à évaluer la santé mentale et le fonctionnement des jeunes en âge d'aller en psychiatrie adulte, vers d'autres services ou qui arrivent en fin de prise en charge. Il s'agira de comparer ceux qui auront bénéficié d'une intervention innovante et ceux qui auront bénéficié des pratiques habituellement mises en œuvre. L'étude inclura des adolescents avec des troubles psychiques et/ou troubles neurodéveloppementaux, des jeunes se situant à moins d'un an de l'âge légal (habituel) de transition, au moment du recrutement : soit entre 15 et 17 ans, pour un âge de transition entre 16 et 18 ans. Le premier objectif est d'identifier les lacunes dans les différents systèmes de soins actuels et les freins à une transition efficace. Pour cela, il sera procédé à une description des systèmes de soins, des types de structures, des interfaces pédopsychiatrie/psychiatrie adulte et des formations des professionnels. Deuxième objectif : apporter un regard unique sur les trajectoires de transition et éclairer l'évolution des jeunes au sein de ces trajectoires. Pour cela, il conviendra d'identifier les processus de transition, leurs résultats et les expériences associées, dans divers établissements de soins.

Un modèle de transition innovant testé

Enfin, troisième objectif : tester un modèle d'intervention innovant en matière de transition. Pour cette étude, des outils d'aide à la décision doivent être développés, ainsi qu'un modèle de bonnes pratiques et un cadre éthique. Deux outils vont être utilisés. D'une, il y aura le Tram (pourtransition readiness and appropriateness measure), un outil d'aide à la décision permettant d'identifier les jeunes pour lesquels un transfert vers la psychiatrie d'adulte est requis et approprié. D'autre part, il y aura le Trom (pour transition outcome measure), un outil de suivi des jeunes, évaluant la qualité de la transition effectuée et l'évolution des jeunes dans cette période. Diane Purper-Ouakil précise qu'au sein de cette étude, un essai randomisé contrôlé par cluster est prévu. Il doit permettre de déterminer l'efficacité et le rapport coût-efficacité d'un modèle de transition "organisée" dans l'amélioration de la santé et de l'évolution sociale des jeunes, dans l'accompagnement vers leur vie adulte, en comparaison de la transition telle que pratiquée habituellement dans les centres participants.

Des obstacles à surmonter et risques à éviter

Au nombre des obstacles à la continuité de la prise en charge des jeunes dans cette période de transition vers l'âge adulte, Diane Purper-Ouakil a notamment cité l'organisation distincte pédopsychiatrie/psychiatrie adulte, l'absence de formations spécifiques, la surcharge des services ou encore la faible collaboration entre services. Elle a souligné qu'il manque une évaluation systématique des prises en charge, basées sur les besoins des jeunes. De plus, l'appréciation clinique concernant la transition vers la psychiatrie adulte peut être influencée par plusieurs facteurs. Parmi eux, une mauvaise perception des autres services de psychiatrie, une mauvaise analyse des ressources du jeune ou de son entourage, les contraintes de temps et de ressources, une mauvaise communication entre services ou encore un manque de protocole ou une faible adhésion à des protocoles existants. Mais les risques sont grands à ne pas tenter de surmonter ces obstacles : des adolescents perdus de vue, des délais de transition trop importants, la perte d'informations, des incohérences diagnostiques ou thérapeutiques du fait d'une mauvaise transition entre services, des doublons de prise en charge, de bilans ou encore une insatisfaction qui touche à la fois les médecins, les soignants et les usagers. D'où la pertinence du lancement de Milestone, à l'heure où les acteurs et professionnels soutiennent plus que jamais la nécessité prégnante de faire de la recherche en psychiatrie et santé mentale une priorité en France (lire ci-contre).
Caroline Cordier 

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