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mardi 14 avril 2015

Quand le psychiatre sort son bloc d’ordonnances…

 27/03/2015

Prescrire est devenu un acte si courant qu’il arrive souvent d’oublier sa signification symbolique, indépendamment de sa portée strictement thérapeutique. Dans un courrier à la revue Australian & New Zealand Journal of Psychiatry, un lecteur de Wellington (Nouvelle-Zélande) rappelle que le « fantasme du traitement parfait » hante certains patients, désireux de recevoir une « intervention dont l’efficacité serait immédiate, spécifique, et dénuée d’effets indésirables. » Pour d’autres (ou les mêmes), une absence de prescription semble perçue comme un « manque de soins » de la part du praticien. Et les compétences professionnelles d’un médecin sont volontiers jugées (par sa patientèle) à l’aune de la longueur de ses ordonnances...

 Cependant, si les symptômes s’avèrent parfois assimilables à une « armure » mettant le patient à l’écart d’un environnement jugé intrusif, on comprend qu’une prescription visant à supprimer cet aspect « défensif » peut paraître effrayante, puisqu’elle aboutira précisément à retirer cette « protection » présumée. Un traitement peut aussi transférer vers l’extérieur la solution escomptée ou « détourner le clinicien et le patient d’une compréhension psychologique des difficultés. » En d’autres termes, la dimension « magique » de la prescription tendrait à occulter le travail nécessaire pour comprendre un fonctionnement psychique, de la même façon que nous oublions les lois de l’électromagnétisme quand nous ouvrons notre récepteur de radio ou de télévision.
Pour résumer ce conflit entre la vertu de l’écoute et celle du traitement pharmacologique, l’auteur rappelle trois citations du psychiatre américain Thomas Gordon Gutheil[1] :

– « Quand mon précédent thérapeute sortait son bloc d’ordonnances, je savais que je ne pourrais plus lui dire quelque chose d’important. »
– « Révéler au médecin que ses médicaments n’ont pas d’efficacité, c’est comme raconter à une mère que son bébé est laid. »
– « En faisant du patient un partenaire de son traitement, le médecin met l’accent sur les forces de celui-ci et les intensifie, plutôt que de le laisser dans un rôle de sujet dépendant. »

Dr Alain Cohen
RÉFÉRENCES
John Little : The prescription. Aust N Z J Psychiatry, 2014; 48: 1064–1065.

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