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mardi 17 février 2015

Psychanalyse d’Harry Potter

12/02/2015




Au propre comme au figuré, l’alchimie sent encore tellement le soufre que l’ouvrage qui révéla JK Rowling, Harry Potter and the Philosopher’s Stone (Harry Potter et la Pierre philosophale, 1997) fut rebaptisé Harry Potter à l’école des sorciers (pour l’édition française) et Harry Potter and the Sorcerer’s Stone (pour l’édition américaine), car les éditeurs « craignaient que les parents refusent d’acheter à leurs enfants un livre comportant le mot ‘‘philosophie’’ dans son titre ! » Le Carnet Psy publie précisément une « réflexion psychopathologique » consacrée au « succès magique » de l’œuvre de JK Rowling.
Dû à deux pédopsychiatres (de formation analytique), cet article au thème insolite est déjà paru dans la Revue Belge de Psychanalyse.
Dès sa naissance, Harry Potter frôle la mort, car un sorcier maléfique (Voldemort) s’efforce de le tuer, persuadé qu’une prophétie présente ce bébé comme un futur frein à son hégémonie, et Harry ne peut survivre que grâce au sacrifice de sa mère dont la propre mort fait obstacle aux manœuvres infanticides du sinistre sorcier. Pour les auteurs, la saga d’Harry Potter présente un intérêt évident, dans la mesure où elle offre une « description métaphorique des processus développementaux et défensifs » pouvant intervenir chez tout adolescent. Les récits d’Harry Potter seraient une « transposition, dans un univers magique », des sensations éprouvées par les adolescents, d’où un phénomène d’identification expliquant l’engouement des lecteurs pour les aventures de leur héros chez lequel ils « retrouvent des parts d’eux-mêmes, dans un contexte (de magie) leur donnant un relief nouveau. »
Dans le sillage du célèbre ouvrage de Bruno Bettelheim (The Uses of Enchantment, Psychanalyse des contes de fées), cette réflexion originale sur Harry Potter vise à «essayer de comprendre » les ressorts psychologiques et psychopathologiques sous-tendant le succès (lui-même féerique) de ces romans, au-delà des processus de marketing venus l’amplifier. JK Rowling aurait proposé aux enfants « de l’âge dit de latence » et aux adolescents (« et en particulier aux lecteurs en souffrance psychique ») un accès à un univers onirique favorisant la « transformation adolescente de l’omnipotence infantile » : le cadre magique où évoluent les protagonistes d’Harry Potter permet le « déploiement d’une omnipotence paradoxale où le fait d’y accéder implique d’y renoncer partiellement. » Ce serait la fonction essentielle de l’école de sorcellerie de Poudlard où l’orphelin Harry Potter est formé par le professeur Albus Dumbledore, un substitut paternel « qui accompagnera, non sans erreurs nécessaires, le développement psychique » du héros. Et de ses jeunes lecteurs…     
Dr Alain Cohen
RÉFÉRENCE
Durieux MP et Matot JP : Variations psychanalytiques sur les aventures de Harry Potter. Le Carnet PSY, 2014 ; 184 : 19–34.

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