L’historiographie emprunte parfois des chemins inattendus. Voilà ce que suggère ce titre à qui se souvient de l’interrogation du colloque de Saint-Maximin, en 1984 : «Une histoire des femmes est-elle possible ?» On déplorait alors que l’histoire fût écrite pour et par des hommes, déclinée au masculin : des grands personnages aux petits paysans. Certes, d’emblée la nécessaire articulation entre les femmes et les hommes était réclamée ; mais si l’analyse de la différence des sexes s’imposait, elle se trouvait trop souvent enfermée dans un rapport dominant-dominée réducteur. En jouant avec les mêmes mots, le colloque de Rouen se demandait en 1998 : «Une histoire sans les femmes est-elle possible ?» On connaît la réponse, à laquelle ce livre vient faire écho, bénéficiant de l’expérience de l’histoire des femmes et de la richesse des études de genre dans lesquelles s’insère désormais celle des masculinités.
Chasseur. Car le pluriel s’impose : être un homme n’est pas un invariant mais une construction culturelle et politique qui traverse le temps et l’espace, en une incessante reconfiguration, dont les composantes changent, additionnant identité ethnique, religieuse, sociale. Ce livre démontre que la formule beauvoirienne - «on ne naît pas femme, on le devient» - est aussi pertinente au masculin, et ce dès le néolithique : les données funéraires, l’art rupestre et la statuaire montrent en fin de période «un renforcement de la dichotomie entre sphère masculine et sphère féminine» (Jean Guilaine), différence qui se note dans la position des corps et dans les objets déposés (armes pour les hommes, céramiques pour les femmes).