Les adolescents français vont-ils mal ? C’est en tout cas la conclusion d’une étude menée par l’Unicef France entre mars et mai, sur plus de 11 000 enfants et adolescents, de 6 à 18 ans. Libérations’est procuré le rapport intitulé Adolescents en France : le grand malaise, avant qu’il ne soit remis ce mardi à Laurence Rossignol, secrétaire d’Etat à la Famille, et Ségolène Neuville, secrétaire d’Etat aux Personnes handicapées et à la Lutte contre l’exclusion.
Plus complète que la première édition de la consultation des 6-18 ans réalisée l’an dernier, l’enquête menée renseigne sur les difficultés rencontrées par les jeunes en matière d’intégration dans la société. Des questions relatives aux conditions et au cadre de vie, aux relations familiales, amicales et à l’expérience scolaire ont été soumises à des enfants et adolescents résidant partout en France.

Mal-être. Il apparaît que les difficultés rencontrées dans ces domaines sont à l’origine d’un mal-être qui touche un nombre croissant de jeunes. Ainsi, en France, plus d’un jeune sur trois (36,3%) peut être considéré comme étant en souffrance psychologique. Un état qui touche plus les filles (1,71 fois plus que les garçons) et les plus de 15 ans (qui sont 1,70 fois plus sujets que les moins de 12 ans).
Plus alarmant, 28% des adolescents disent avoir pensé au suicide, et un sur dix déclare avoir tenté de se suicider. Là aussi, les filles sont plus concernées (34,1%, contre 19,5% des garçons). Le harcèlement sur les réseaux sociaux apparaît comme un déclencheur important, de même que le lieu de vie, puisque les jeunes issus d’un quartier qu’ils jugent insécurisant sont deux fois plus nombreux que les autres à avoir tenté de se suicider. A titre de comparaison, une enquête de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé a montré qu’en 2009-2010, 3,9% de la population avaient eu des pensées suicidaires durant l’année écoulée.
L’étude de l’Unicef montre que le facteur économique est capital et que l’expérience de la privation explique en partie le malaise qui touche les enfants et les adolescents. 17,3% d’entre eux sont dans cette situation, un chiffre assez proche du taux de pauvreté des ménages (14,1% en 2012), comme le souligne le rapport. Ces jeunes sont aussi ceux qui expriment le plus de difficultés à s’intégrer socialement. L’Unicef en conclut que les inégalités cumulatives qui se retrouvent à l’âge adulte sont présentes dès l’enfance.
Sentiment. La qualité des relations familiales joue un grand rôle dans le bien-être des jeunes. Or, plus d’un enfant sur dix a le sentiment de ne pas pouvoir «compter sur» ou «compter pour» son père ou sa mère. Plus de 40% des interrogés disent avoir des relations tendues avec leur père, et 42% avec leur mère. Les tensions familiales surviennent plus fréquemment dans les ménages qui cumulent les difficultés (familles monoparentales ou recomposées, problèmes économiques…).
Autant de facteurs qui ont des conséquences sur l’expérience scolaire : si un tiers des jeunes déclare faire l’objet de harcèlement ou être ennuyé à l’école, le chiffre monte à près de 50% pour les jeunes dans des situations fragiles. C’est l’une des constatations qui, d’après l’Unicef, prouvent que «loin de compenser les inégalités entre les enfants, le système scolaire creuse l’écart».