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lundi 16 juin 2014

Menace sur les acquis du féminisme

LE MONDE | Par 
Un cri d'alarme sur la condition des femmes, menacées par une régression sans pareille, telle est l'inquiétude qui sous-tend cet ouvrage dû à deux journalistes elles-mêmes mères de famille et heureuses de l'être. Les exigences et la valorisation de la maternité actuelle en seraient paradoxalement responsables, dans une France qui ne cesse de se vanter de son taux de fécondité par rapport à celui de ses voisins, de son système social et de ses crèches que lui envient d'autres Européennes écartelées entre vies professionnelle et parentale.
Marie-Caroline Missir, qui travaille à L'Express, et Louise Tourret, qui produit l'émission « Rue des écoles » sur France Culture, n'ont pas seulement voulu jouer les « lanceurs d'alerte ». Leur enquête étayée par de nombreux chiffres et illustrée d'exemples, parfois drôles, parfois amers, met en évidence la constitution d'un « plafond de verre inexpugnable » où se cognent les femmes pourtant de plus en plus engagées dans la vie professionnelle, surtout dans les tranches d'âge les plus jeunes.

« HYPERMÈRES »
Par quel mystère une naissance correspond-elle à la stagnation d'une carrière féminine ? Pourquoi les écarts de salaire entre hommes et femmes – 24 % – se creusent-ils inexorablement au bout de quatre ans « lorsque l'enfant paraît » ?
Sur le banc des accusés qui perpétuent la domination masculine en dépit des textes, un discours médical, psychologique et idéologique vantant le « maternage proximal » (réduire au minimum la distance entre la mère et l'enfant, fût-ce en renonçant de véhiculer celui-ci à l'aide d'une poussette), l'allaitement de longue durée (prôné par des groupes comme la Leche League), les horaires scolaires, ou des injonctions comme le « cododo » (dormir avec son bébé). Autant de normes qui, sous le vernis d'un naturalisme de pacotille, constituent un nouveau code rigoureux culpabilisant des femmes désormais requises de devenir non de bonnes mères mais des « hypermères ».
Sous l'inspiration de la philosophe Elisabeth Badinter, les deux auteures pensent que les acquis du féminisme sont en cause. Ils sont d'ailleurs bien plus fragiles qu'on ne peut croire, comme le montre la récente tentative de remise en cause de l'avortement en Espagne. La pression sur les mères, exercée au nom du « bien de l'enfant », aboutit à les ramener sournoisement à leur « condition maternante » que reflète leur lancinante sous-représentation en politique. L'humour et une meilleure préparation en amont des hommes au partage des tâches figurent au catalogue des solutions suggérées de ce constat alarmant mais jamais désolé.


Mères, libérez-vous !
par Marie-Caroline Missir et Louise Tourret
Plon, 218 pages

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