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vendredi 11 avril 2014

Quand le sexe est en désaccord avec le genre

02/04/2014

« Mon style correspond bien à mon état civil » disait Michel Polnareff dans sa chanson Je suis un homme (1970). Mais ce n’est pas toujours le cas, et les débats récents sur les « théories du genre » [1] ont au moins l’intérêt de stimuler les réflexions sur le concept de « genre», censé représenter une « construction sociale » distincte du sexe biologique.

Sous la plume du Dr James Barrett, psychiatre spécialisé dans les « troubles de l’identité du genre », The British Journal of Psychiatry consacre un éditorial à ce sujet. Pour l’auteur, décider si ces troubles identitaires du genre relèvent ou non de pathologies psychiatriques (voire de « troubles » tout court) suscite actuellement un «champ de bataille idéologique » et « un parallèle peut être opéré avec la déclassification psychiatrique de l’homosexualité » (en 1973, aux États-Unis). Il existe pourtant une différence « cruciale » avec l’homosexualité, car l’homosexuel accepte généralement son sexe biologique et ne recherche donc ni une intervention mutilante ni un traitement hormonal, alors que le sujet avec une « dysphorie du genre » peut se rapprocher des médecins ou/et des chirurgiens pour solliciter de leur part une mise en conformité de son sexe avec son genre. Le Dr Barrett rappelle que si les débats autour de ces interventions médicales et chirurgicales sont passionnés ou même « fortement politisés », ces controverses font parfois oublier que ces initiatives « peuvent considérablement améliorer la qualité de vie » des sujets concernés. L’auteur précise «et à peu de frais » (at very little cost), mais on restera sceptique sur ce point, vu les tarifs de certaines interventions d’une chirurgie considérée, sinon comme « esthétique», du moins « de confort. »
Que penser de ces « chirurgies de réassignations » où le corps médical s’efforce de remodeler un corps, pour l’accorder davantage aux desiderata de l’intéressé(e) ? La «sophistication technique » de la chirurgie permet à un sujet né homme de « bénéficier d’une chirurgie d’une telle qualité » que l’on pourrait se méprendre, tant « les résultats peuvent imiter étroitement les sujets de sexe féminin à la naissance. » Mais remodeler un corps féminin pour lui donner l’apparence d’un homme est une « procédure beaucoup plus difficile », et les résultats actuels sont tels qu’aucun sujet de sexe féminin à la naissance « ne peut cacher la vérité dans le cadre d’une proximité et d’une intimité physique. » On pense toutefois qu’un « bénéfice psychologique et social important » serait apporté à ces personnes par une « mastectomie bilatérale et une phalloplastie. 2] »
Si ces troubles de l’identité du genre restent rares et se résument souvent « pour le grand public comme dans une certaine mesure pour les psychiatres au transsexualisme », cette « perception illusoire » persiste en partie car « la plupart de ces sujets n’attirent pas l’attention des services psychiatriques », bien que le désaccord entre leur sexe physique (vécu) et leur sexe psychique (fantasmé) puisse entraîner des souffrances et la recherche d’une aide auprès des praticiens.
Dr Alain Cohen
RÉFÉRENCES
Barrett J: Disorders of gender identity: what to do and who should do it?. Br J Psychiatry 2014 ; 204: 96–97.

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