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vendredi 4 octobre 2013

EHPAD : de la difficulté de prendre en charge les pathologies mentales

03/10/2013


Après avoir accouché de la loi révisant les soins sans consentement, la mission d’information sur la santé mentale et l’avenir de la psychiatrie, présidée par Jean-Pierre Barbier (UMP), avec pour rapporteur Denys Robiliard (SRC), ouvre son champ d’enquête, en commençant par se pencher sur les personnes âgées psychotiques. Leur prise en charge dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées et dépendantes (EHPAD) se révèle en effet un véritable défi, aux dires des représentants d’associations de directeurs auditionnés ce jeudi 3 octobre à l’Assemblée nationale.

Privation de liberté

Première difficulté, mise en lumière par le contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) Jean-Marie Delarue, les mesures de protection des personnes âgées souffrant de démence type Alzheimer peuvent tourner à la contention. « C’est vrai qu’il y a des privations de liberté et une quinzaine de nos établissements adhérents était tout à fait disposés à accueillir le CGLPL », reconnaît Françoise Toursière, directrice de la Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées (FNADEPA). « Les questions que se pose Monsieur Delarue, nous nous les posons depuis des années », enchérit Romain Gizolme, chargé de mission à l’association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA).

Mais les directeurs sont unanimement opposés à des contrôles supplémentaires proposés par le CGLPL. « Nous sommes déjà contrôlés systématiquement tous les quatre ans lors de nos demandes d’agrément, et dès qu’il y a une plainte ou que nous faisons un signalement », témoigne Marie-Hélène Angelloz-Nicoud, présidente de la conférence nationale des directeurs d’EHPAD(CNDEHPA). De même, sans renier l’intérêt du regard extérieur éthique du CGLPL, Olivier Quenette, directeur de l’EHPAD Saint-Jean de Dieu, à Marseille, (qui compte 113 lits pour malades psychiatriques) est réticent sur la multiplication de contrôles chronophages.

Laissés pour compte

L’autre gageure est la prise en charge médicale par la structure médico-sociale des pensionnaires souffrant de pathologies psychiatriques qui souvent sont bien plus jeunes que les autres résidents. À l’EHPAD Saint-Jean de Dieu, 30 % des personnes accueillies ces six derniers mois avaient moins de 60 ans. « Quand les foyers d’accueil médicalisé (FAM) ou les hôpitaux n’en veulent plus, les conseils généraux accordent des dérogations à l’âge », interprète Olivier Quenette.
Financièrement, « les pathologies mentales ne sont pas reconnues en EHPAD, les modèles de cotation via la grille PATHOS ne sont pas adaptés », regrette Mme Angelloz-Nicoud. « Par exemple, une dépression n’est reconnue que s’il y a un traitement chimique. Cela nous interroge sur l’intérêt qu’on porte aux personnes âgées », ajoute-t-elle. Dans l’EHPAD Saint-Jean de Dieu, il a dû y avoir négociation pour classer toutes les personnes âgées souffrant de troubles psychiatriques en GIR 2 afin d’avoir les fonds nécessaires.
Au-delà de l’aspect financier, c’est le rapport avec le médical qui pose problème. « Nous avons toutes les difficultés à trouver des partenaires médicaux. Les différentes spécialités (géronto-psychiatres, gériatres...) se renvoient la balle. Les passerelles avec les hôpitaux ou les centres médicaux psychologiques sont dures à créer, sauf avec les grands centres comme le Vinatier, à Lyon », dénonce la présidente de la CNDEHPA. Olivier Quenette pense avoir trouvé la solution : « Nous conventionnons avec toutes les structures sanitaires d’origine, au cas où la personne décompense, et des psychiatres libéraux interviennent pour les patients chroniques stabilisés. L’accompagnement psychiatrique est différent de celui des démences, c’est pourquoi nous avons sectorisé nos lits en fonction des pathologies. »
Les directeurs demandent davantage de personnels pour mettre en place des équipes aux approches spécifiques, selon le type de pathologies, et le développement des réseaux. In fine, ils recherchent la reconnaissance de la légitimité du médico-social à assumer des résidents souffrant de troubles psychiatriques, de plus en plus nombreux dans leurs structures.
› COLINE GARRÉ

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