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samedi 23 février 2013

Arrêt maladie : les vraies inégalités sont entre précaires et titulaires

Le Monde.fr | 
Le débat des inégalités entre public et privé sur les arrêts maladie ressurgit régulièrement, mais pas toujours sur la base de bons arguments. Dans le détail, les inégalités sont moins fortes entre fonctionnaires et salariés du privé qu'entre titulaires (CDI ou fonction publique) et précaires.
  • Jours de carence : souvent aussi pris en charge dans le privé
Sur le papier, la situation est plus favorable pour les fonctionnaires. Ceux-ci ne se voient actuellement imposer qu'un seul jour de carence, lors de chaque arrêt. Et ce jour de carence devrait bientôt être supprimé. Pour le privé, l'Assurance-maladie n'indemnise les salariés qu'à partir du quatrième jour, après trois jours de carence.
Mais en réalité, la majorité des salariés du privé bénéficient d'un accord d'entreprise plus généreux que la loi. Selon une enquête de l'Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes), publiée en juillet 2012, 64 % des salariés du privé "bénéficient d'une prise en charge totale des trois jours de carence" par leur employeur et 2 % d'une prise en charge partielle.
Les inégalités sont en fait entre salariés des très grandes entreprises (plus de 250 salariés), dont 77 % prennent en charge les jours de carence, et ceux des TPE, qui ne sont que 47 % à le faire. 82 % des cadres ont leurs jours de carence indemnisés par l'employeur, contre seulement 51 % des ouvriers. Par ailleurs, les entreprises instaurent souvent des conditions de statut et d'ancienneté pour pouvoir bénéficier de la couverture des jours de carence, mais il n'existe pas de panorama de ces conditions.
  • Niveau d'indemnisation : des différences variables
C'est la seconde inégalité qui est très souvent mise en avant par les contempteurs de l'indemnisation des fonctionnaires. Dans la fonction publique, en cas d'arrêt maladie, l'Etat prend en charge l'intégralité du traitement les trois premiers mois, mis à part certaines primes liées à l'activité. Le fonctionnaire est ensuite indemnisé à demi-traitement les mois suivants.
Dans le privé, l'Assurance-maladie verse une indemnité qui atteint 50 % du salaire brut. Mais la loi impose aux employeurs de compléter cette indemnité pour les salariés ayant plus d'un an d'ancienneté. Du 8ejour au 38e jour d'arrêt, le salarié doit au minimum être indemnisé à 90 % du salaire brut. Puis aux deux tiers les trente jours suivants.
Mais là encore, des accords de branche ou d'entreprise prévoient bien souvent des conditions d'indemnisation plus favorables. Selon l'Irdes, 80 % des salariés du privé sont ainsi indemnisés à 100 % au 4e jour d'absence, mais au 70e jour d'absence ce n'est plus le cas que pour 68 % des salariés. En novembre 2011, Le Monde avait calculé les différents niveaux d'indemnisation d'un salarié travaillant à plein temps en fonction de son statut.
Pour une même rémunération de 2 000 euros brut par mois, ils montraient que les inégalités se situaient davantage entre précaires et titulaires, qu'entre fonction publique et privé. Au bout d'un mois d'arrêt, un salarié en CDI bénéficiant d'un accord d'entreprise favorable ne perd ainsi pas un euro, un fonctionnaire uniquement ses primes d'activité et son jour de carence. Mais un salarié en CDI sans accord d'entreprise ne touchait que 1 490 euros. Enfin, un salarié en CDD ou en CDI depuis moins d'un an ne percevait lui que 887 euros.
  • Fréquence des arrêts : peu de différence entre public et privé
Une étude du ministère du travail, publiée le 12 février, dément qu'il y ait plus d'arrêts dans le public que dans le privé. Sur une semaine de référence, 3,9 % des fonctionnaires en moyenne ont été arrêtés au moins une heure pour maladie ou pour garder un enfant malade. Ce taux est de 3,7 % pour les salariés du privé en CDI depuis plus d'un an, estime l'étude.
En revanche, ce taux chute à 2,6 % pour les salariés du privé en situation précaire (CDD, intérim, CDI depuis moins d'un an).
Le seul problème est que cette étude ne prend pas en compte la durée des arrêts, mais uniquement leur fréquence.
  • Impact du jour de carence sur les absences : l'incertitude
L'annonce de la fin du jour de carence dans la fonction publique a immédiatement suscité l'ire de la Fédération hospitalière de France (FHF), qui estime qu'il avait permis de faire des économies. Frédéric Valletoux, son président, les a évaluées sur Europe 1 "aux alentours de 70 millions d'euros". La FHF estime par ailleurs que le taux d'absentéisme a chuté dans les hôpitaux entre 3 % et 7 % depuis janvier et l'instauration du jour de carence.
Mais ce chiffre est contesté par le ministère de la santé. Auditionné le 14 février par les députés, le directeur général de l'offre de soins a estimé que "les premiers éléments montrent une baisse modeste du taux d'absentéisme, de 0,2 à 0,3 %, difficile à corréler avec le jour de carence, car d'autres facteurs de gestion des ressources humaines entrent en jeu en 2012", selon La Gazette des communes.
Les représentants des autres fonctions publiques ont été tout aussi prudents. De fait, la seule véritable inégalité public-privé qui est ressortie des ces auditions est celle face aux contrôles. Alors que l'assurance-maladie est désormais très tatillonne et contrôle tous les arrêts longue durée, c'est loin d'être le cas dans la fonction publique.
La ministre Marylise Lebranchu, en abrogeant le jour de carence, a d'ailleurs parallèlement promis "un renforcement du contrôle des arrêts maladie dans la fonction publique, qui seront désormais contrôlés dans les mêmes conditions que ceux des salariés du privé".

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