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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

vendredi 6 juillet 2012

Des usagers de la psychiatrie, la FNAPSY, refusent formellement les "Conseils Locaux de Santé Mentale"

06 Juillet 2012 Par guy Baillon psychiatre des hôpitaux  
Refus formel des ‘Conseils Locaux de Santé Mentale’ par des usagers de la psychiatrie, la FNAPSY.
La FNAPSY affirme au Ministère qu’elle ne veut pas que ces Conseils ‘déballent leur vie en public’. Elle dénonce en même temps la dérive opérée ces dernières années disqualifiant la psychiatrie et lui substituant la notion floue et sans bornes de ‘santé mentale’.
La FNAPSY  a demandé aussi à l’Etat de redonner son plein sens à laPSYCHIATRIE, elle estime que ce terme doit désigner la réponse à l’ensemble des besoins des malades, associant soins et compensations sociales, une seule enveloppe budgétaire doit correspondre à la totalité de leur financement. La FNAPSY dresse ainsi la nouvelle feuille de route de la psychiatrie française !Nous allons pouvoir mettre un terme à la tentative de déshumanisation de la psychiatrie du précédent gouvernement et aider les nouveaux élus du Parlement à reconstruire une psychiatrie humaine et compétente dans un climat de confiance.
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jeudi 5 juillet 2012


A Besançon, la maison où les "fous" sont heureux

Le Monde.fr | 




Vue depuis la passerelle du café philo qui se tient dans le jardin du cloître.
Vue depuis la passerelle du café philo qui se tient dans le jardin du cloître. | Le Monde.fr

Sur la passerelle en bois de l'ancien couvent des Capucins, Olivier passe la balayette. "Ces deux messieurs vont faire un reportage", lui lance Jean-Marie, le directeur de l'établissement. "Ça va être cool !", s'exclame Olivier en posant son outil avant de nous serrer chaleureusement la main.
Au rez-de-chaussée, le cloître résonne de rires, de bonjours matinaux, de bises échangées et de prénoms sonores. Derrière le bar de la buvette, Jérôme sert des cafés allongés : "Vous prenez du sucre ?". Dans le jardin, au pied du cerisier, quelques pensionnaires ont pris place autour de deux tables en fer forgé. L'atelier philo va commencer."C'est fumeur ?", lance un convive. "C'est bien parti pour", lui rétorque son voisin. La tablée part dans un grand éclat de rire. Le cendrier se remplit. Sur une tasse de café est écrit : "Je t'aime tellement."Bienvenue chez les "fous".
Depuis 1999, ce couvent du centre-ville de Besançon appartient à une association, Les Invités au festin, fondée par la psychiatre Marie-Noëlle Besançon. Rebaptisé la "Maison des sources"l'établissement, qui portait assistance aux pestiférés au XVIIe siècle, a été transformé en lieu d'accueil pour les personnes souffrant de troubles psychiques. Treize résidents, des malades dont l'immense majorité a passé plusieurs années en hôpital psychiatrique, y habitent en permanence. Un accueil de jour est également ouvert à une centaine de malades logeant à l'extérieur, en famille, à l'hôpital ou en ville.
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La Maison des sources accueille treize résidents souffrant de troubles psychiques, qui y ont leur chambre, et une centaine de "participants" à l'accueil de jour. Portraits.
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Influencée par l'antipsychiatrie anglosaxonne et le mouvement du psychiatre italien Franco Basaglia, qui aboutit à la fermeture des hôpitaux psychiatriques en Italie à la fin des années 1970, Marie-Noëlle Besançon a élaboré cette structure de "psychiatrie citoyenne" ouverte sur la ville. Son objectif : briser l'isolement, qui enferme dans la maladie et la chronicise, en recréant du lien social et en faisant confiance au pouvoir soignant de la chaleur humaine.
Cette démarche originale s'inscrit dans un paysage psychiatrique dévasté. En vingt ans, la moitié des lits d'hôpitaux, environ 50 000, ont été fermés, "pour des raisons essentiellement budgétaires", explique Elie Winter, psychiatre à Paul-Giraud de Villejuif. Ces fermetures n'ont pas été compensées en nombre suffisant par l'ouverture de structures alternatives, si bien que beaucoup de malades stabilisés se retrouvent livrés à eux-mêmes à leur sortie de l'hôpital. On estime que 1 % de la population, soit 700 000 personnes, souffrent de troubles schizophréniques en France.
Cette carence en structures d'aide à la réinsertion sociale a des conséquences dévastatrices sur la vie des psychotiques : certains restent hospitalisés alors que leur état ne le justifie plus, d'autres vivent à la charge de leurs familles, souvent dépassées, les plus isolés échouant dans la rue et parfois en prison. Selon la première étude épidémiologique sur la santé mentale en prison, réalisée en 2004, huit hommes incarcérés sur dix présentent une pathologie. Pour près de 10 % d'entre eux, il s'agirait d'une schizophrénie.
UN PONT ENTRE L'HÔPITAL ET LA SOCIÉTÉ
De son expérience à l'hôpital, Marie-Noëlle Besançon est sortie forte d'une conviction : la maladie mentale est avant tout une pathologie relationnelle, et ce n'est qu'en rétablissant ce lien à l'autre, au monde et à soi-même que le malade pourra envisager un retour à une vie autonome.
La relation à l'autre, c'est ce qui a changé la vie de Soraya ("Ici, j'ai appris à serrer les gens dans mes bras"), résidente à la "Maison des sources" depuis près de quatre ans. Dans sa chambre, accompagnée de Zoro, le chat de la maison, elle raconte sa maladie, ses premiers pas ici et sa rencontre avec René, l'ancien SDF devenu cuisinier en chef de la maison :
La Maison des sources ne se pose pas en alternative à l'hôpital. Elle se pense comme un lieu intermédiaire, un pont entre l'hôpital et la société, et n'accueille que des malades stabilisés. Les résidents continuent d'être suivis par leur médecin à l'extérieur de l'établissement, et il arrive qu'en cas de crise certains soient renvoyés à l'hôpital pour une courte période.
La particularité de cette maison-relais est qu'elle ne dépend pas de l'hôpital, à la différence d'autres structures comme les CMP (Centres médico-psychologiques). En dehors d'une psychiatre référente, aucun de ses intervenants ne vient de l'univers hospitalier. "Ici, on ne s'occupe pas de la maladie, on s'occupe du reste. Ce n'est pas un lieu de soins, mais un lieu qui soigne", résume Serpil Godin, 32 ans, responsable de l'accueil de jour et des activités.
"ON DÉVELOPPE LA PARTIE SAINE QUI EST EN EUX"
Autour de Serpil Godin et d'une poignée de salariés, une cinquantaine de bénévoles participent à la vie de l'établissement, à travers différentes animations (café philo, atelier poterie, taï-chi, peinture, informatique, atelier vidéo, gym, photo, etc.) et les sorties. A première vue, il est impossible de déterminer qui fait quoi, de distinguer les malades des accompagnants. Bénévoles, salariés, résidents et "participants" (les malades de l'accueil de jour) se mêlent dans une joyeuse convivialité.
"Le monde psychiatrique, c'est le règne de la distance, de la séparation entre le soignant et le malade, explique Edith Robert, responsable de la maison-relais. Ici, tout le monde est à égalité. Ce sont les liens qui donnent envie de vivre. On ne renvoie pas les gens à leur maladie. Plus on développe la partie saine qui est en eux, moins la maladie prendra de place."


De gauche à droite : Frédéric, Sidi et Odile pendant le café philo.

La chaleur humaine ne suffit pas. Pour envisager de renouer un jour avec une vie autonome, les malades doivent se responsabiliser en participant aux tâches de la vie en communauté (les repas, la vaisselle, le ménage, etc.), les différents ateliers et les petits boulots proposés à la buvette et à la "boutique", où l'association vend des fripes et des objets d'artisanat. Olivier, qui s'occupe du ménage, fait ainsi partie des "participants" salariés (26 heures par mois au smic horaire). A la buvette, Jérôme est un malade bénévole, et René, le cuistot de la maison, est un ancien SDF.
Cette responsabilisation se construit aussi à travers le respect du règlement intérieur. "A l'hôpital, ils étaient tellement mal qu'on ne leur demandait rien. Ici il y a un cadre, des règles qui les ramènent à la réalité", explique Edith Robert. Avec un système d'avertissements qui peut conduire, au bout de trois, à une exclusion définitive. "En général, un seul suffit", précise-t-elle.

La règle. C'est précisément le thème du café philo de ce matin. Ou plus exactement, le "code de la route""Il y a des sens obligatoires, et des voies sans issue", glisse Sidi dans un sourire malicieux. "Déjà, pour appliquer une règle, il faut la comprendre", fait remarquer Odile."L'humanité est un code", tranche Frédéric.
Après une heure de discussion, on fixe le thème de la semaine prochaine. Ce sera le sens du mot "Bonjour". Un thème qui inspire Odile : "Quand on dit bonjour, les gens ajoutent souvent 'comment ça va ?' Et il vaut mieux répondre 'ça va' que 'ça va pas'. Mais de toute façon, les gens s'en foutent."
Limoux Des patients philosophent
03/07/2012









Les comédiens réunis sur la scène de l'Elysée. (Guillaume)

Réalisée par les patients du service de psychiatrie adulte "Carrefour des Expressions" (de l'hôpital psychiatrique), la représentation intitulée "Nous ne sommes pas seuls" est l'occasion de retranscrire le travail thérapeutique mené tout au long de l'année.

En 2012, le thème développé est celui de la recherche d'un monde meilleur ailleurs alors qu'il se trouve peut-être ici ! L'histoire ? Autour d'Emilien Tarascon, éminent professeur spécialisé dans les contacts avec les extraterrestres, les tergiversations vont bon train entre plusieurs personnages.

Ils évoquent les caractéristiques de l'être humain, sa capacité à rire, ses peurs, ses angoisses, ses problèmes de communication, sa recherche de la vérité, de ses origines, ses attentes, ses amours... Des fondamentaux d'importance ! Rappelons que le "Carrefour des Expressions" fonctionne en ateliers tout au long de l'année : écriture, théâtre, arts plastiques, clown, danse contemporaine, musique, chiffonnade.

Son objectif est d'agir directement sur les relations interpersonnelles des patients, la diminution des angoisses et l'augmentation de la confiance en soi.

Etre infirmière en Unité pour Malades Difficiles

« Je suis arrivée à l’UMD en 2003, raconte Sandrine. J’ai toujours travaillé en milieu psychiatrique car j’aime le côté relationnel que l’on peut tisser avec le patient."
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Du poids du visiteur médical sur l’ordonnance

2 juillet 2012

Par ERIC FAVEREAU

C’est assez rare qu’une thèse de médecine commence par une histoire. Coup de téléphone : «Bonjour, je suis du labo X, je voudrais vérifier le nom des internes en stage dans le service.» Le jeune interne qui répond est sidéré : «Mais dites-moi qui vous a fourni cette liste.» Réponse :«Ben, l’administration, évidemment.» Ce jeune fait part de sa stupéfaction à d’autres étudiants. Réponse agacée : «Je vais souvent aux repas des labos, c’est sympa, on y mange bien.» Puis : «Quand je prescris des médicaments, je ne pense pas au labo qui m’a invité la veille, je sais rester objectif, je suis libre de ma prescription. On est formé pour ça, non ?»
Etonnant dialogue. Etienne Foisset, qui le raconte, vient d’achever une «étude de l’impact de la visite médicale sur la qualité des prescriptions des médecins généralistes bretons». Un beau travail. Ce jeune médecin, étudiant au CHU de Brest, a analysé les prescriptions de 179 généralistes tirés au sort. «Les résultats obtenus ont été mis en parallèle avec la fréquence à laquelle ces médecins reçoivent des visiteurs médicaux des laboratoires pharmaceutiques.»
Résultat limpide : plus les médecins reçoivent de visiteurs médicaux, plus leurs prescriptions vont refléter des objectifs commerciaux des firmes pharmaceutiques, «au détriment des intérêts des patients, des caisses d’assurance maladie et de la gestion des risques sanitaires».
Avec des exemples frappants. Ainsi, dans les maladies cardiaques, en particulier l’hypertension : la vente des médicaments dits «sartan» se fait au détriment des IEC, autre classe thérapeutique, à l’efficacité similaire. Seule différence : les sartans sont beaucoup plus récents et beaucoup plus chers. «Leur prescription est liée au passage des visiteurs médicaux», note Etienne Foisset.
Corruption passive ? Que non… Les médecins interrogés sont sûrs d’eux. Ils estiment ne pas être très influencés par la visite médicale. Ils se croient incorruptibles. Accablante, au final, cette étude ? «Non, répond notre thésard, même si tous les critères retenus de liens se confirment. Mais ce qui me frappe, c’est que notre conclusion confirme toutes les données que la littérature médicale accumule. Et il ne se passe rien. On laisse faire.»
Etienne Foisset a 33 ans. Sa thèse soutenue, il est devenu généraliste, en remplacement sur l’île de Sein. En septembre, il s’installe en Ariège, dans un cabinet. «Nous sommes plusieurs. C’est à moitié isolé. L’hôpital est à une demi-heure.» Il est ravi. Et attend de pied ferme les visiteurs médicaux.

La maternité des Bluets en appelle à Marisol Touraine

lequotidiendumedecin.fr 02/07/2012
Le personnel de la maternité des Bluets et les membres de l’association « Touche pas aux Bluets » se rendront demain mardi au ministère de la Santé, avec l’espoir d’être reçus par Marisol Touraine. La maternité parisienne (de statut privé à but non lucratif), réputée pour la qualité de sa prise en charge, ne parvient pas à équilibrer ses comptes.


L’Agence régionale de santé d’Ile-de-France formule toute une série de préconisations pour en assurer la survie. Elle conseille notamment de porter à 3 200 par an le nombre d’accouchements d’ici à 2015, et de louer des plages de bloc opératoire inoccupées à des chirurgiens libéraux. Des choix qui ne prennent pas la bonne direction aux yeux des défenseurs de la maternité, qui demandent au gouvernement de« réparer le préjudice subi » par la structure au titre de la convergence tarifaire public privé.
› D. CH

Les difficultés des médecins confrontés aux maux bénins de leurs patients

Dans une étude publiée dans Pratiques et Organisations des Soins (vol 43, n°2), Bedoin D., médecin généraliste et Charles R., maître de conférences, ont tenté de comprendre ce qui poussait les médecins à prescrire dans le cas de troubles bénins dont l’évolution est spontanément favorable sans traitement spécifique. Ce travail s’intègre « dans une démarche critique de l’auteur quant à sa pratique médicale » et « une tendance personnelle restrictive associée à une réflexion sur la médicalisation ».
L’étude qualitative s’est fondée sur onze entretiens individuels réalisés auprès de médecins généralistes de Saint-Étienne (Loire), de janvier à juin 2011. Le terme retenu est celui d’affections transitoires bénignes (ATB) qui signe un caractère banal et sans gravité mais n’exclut pas les affections qui persistent en l’absence de soins. « Avec les ATB, nous avons voulu aborder clairement les facteurs non-scientifiques motivant les prescriptions ». Pour ces pathologies, les médecins ne disposent pas des recommandations dont ils disposent habituellement pour faire face aux pathologies nécessitant des soins spécifiques.
Les médecins interrogés ont tout d’abord dénoncé « le recours croissant » des patients à la médecine pour des ATB. Parmi les raisons citées, il y a d’une part, l’élargissement des attentes - les usagers deviennent des consommateurs -, l’intolérance individuelle et sociale face aux symptômes - qui rendent moins productifs - et l’« imaginaire collectif de toute-puissance de la médecine ». D’autre part, les médecins eux-mêmes auraient pris l’habitude de prescrire des médicaments dans ces situations, « soignant au passage » la relation qu’ils ont avec les patients « dans un contexte concurrentiel ».

La réassurance du patient

Au cours des prises en charge, « nous avons retrouvé les logiques de réparation par les médicaments et de restriction en filigrane dans tous les entretiens ». Chaque médecin oscillait entre ces deux logiques. La première visait à « réparer » le patient avec des médicaments, parfois des placebos impurs (justifié par l’expérience de leur efficacité et de leur innocuité). Le fait de prescrire permettait également d’entretenir la confiance des patients « tout en maintenant une image de puissance ». Les mesures de déremboursement de nombreux médicaments au service médical rendu insuffisant n’étaient d’ailleurs pas toujours comprises ni acceptées.
La seconde logique était restrictive en médicaments, le soin passant par la réassurance et les conseils. Dans ce cadre les placebos impurs étaient critiqués et certains médecins ont au contraire perçu les déremboursements et les nouvelles contre-indications comme des aides face aux patients : « Ça nous dédouane un peu ».
Deux modèles s’opposent, indiquent les auteurs. Il y a un « modèle empirique » dans lequel les comportements des médecins et des patients se renforcent mutuellement au gré d’expériences positives. Le second modèle, « factuel » (Evidence Based Medecine), vise à déterminer l’utilité d’un soin pour le patient (et avec lui). « Cette démarche nécessite plus de temps et de motivation », poursuivent les auteurs qui estiment nécessaire de s’interroger sur « le pouvoir thérapeutique non médicamenteux des médecins ». Selon eux, une formation médicale initiale et continue différente pourrait favoriser l’apogée d’une « médecine individualisée fondée sur les données normatives ». Les auteurs s’interrogent enfin : « N’y aurait-il pas dans l’esprit des médecins comme des usagers ce syllogisme grave : un "petit" médicament utilisé pour soigner une "petite" maladie ne saurait risquer que de "petits" inconvénients », s’interrogent-ils.
› STÉPHANIE HASENDAHL

lequotidiendumedecin.fr 02/07/2012
 Tandis que chutent les murs de l'asile

Compte rendu de la " libération " des malades d'un hôpital psychiatrique italien dans les années 1960, " L'Institution en négation ", de Franco Basaglia, a marqué l'époque. Le voici réédité

Etre l'" expression concrète " de l'aventure médicale, politique et intellectuelle qui se mène à l'hôpital psychiatrique de Gorizia, c'est la vocation que Franco Basaglia prête au livre qu'il publie en 1968 et que rééditent aujourd'hui les éditions Arkhê. Il le dit dès les premières lignes : ce document aspire à témoigner le plus directement possible, et de manière polémique, de la révolution qui a eu lieu dans l'établissement dont il a la charge depuis sept ans. Sous son influence, l'asile, situé dans une petite ville italienne frontalière avec la Yougoslavie, s'est en effet lancé dans une réorganisation fracassante visant à briser les vieilles hiérarchies qui sont l'ordinaire des hôpitaux psychiatriques ; symboles par excellence de l'inégalité entre le médecin et le patient, les murs ont été abattus, les pensionnaires de plusieurs pavillons vont et viennent à leur guise.

Ni manifeste ni théorie, la compilation de textes qui formentL'Institution en négation emmène le lecteur au coeur d'une structure qui cherche les voies de sa propre mutation. La plongée est quasi journalistique, cadrée par les entretiens et notes émanant de l'observation du quotidien. Publié par l'un des éditeurs les plus prestigieux d'Italie, la maison turinoise Einaudi, l'ouvrage (traduit en français deux ans plus tard) connaît un succès immédiat. Le sujet, mais aussi sa facture et sa tonalité, contribue à en faire un livre phare, sinon un bréviaire, de la contestation en cette fin des années 1960. Grâce à lui, la folie devient en Italie une véritable question sociale, au même titre que le travail, la condition féminine ou étudiante. Les malades mentaux valent pour tous ceux qui n'ont pas le droit à la parole, les aliénés de tous bords.

Au coeur de l'agitation politique

Les réflexions et l'expérience de Basaglia trouvent ainsi une immense chambre d'échos, au coeur de l'agitation politique. Cette soudaine reconnaissance lui permet de s'imposer comme la figure majeure du mouvement anti-institutionnel qui conduira en Italie à la fameuse loi 180 (votée en mai 1978) fermant les hôpitaux psychiatriques et mettant en place les communautés thérapeutiques ouvertes. Ne cessant de questionner la violence d'une relation qui " objectivise " l'un aux yeux de l'autre, profondément influencé par la phénoménologie, Franco Basaglia se situe en effet à l'épicentre de la longue transformation du champ psychiatrique dont il conteste sans relâche la prétention à départager santé et maladie, raison et folie. Même s'il réfutait pour lui-même l'étiquette de l'" antipsychiatrie ", il reste associé dans les mémoires à ce mouvement.

A l'origine de ce livre qui marque durablement sa carrière, il y a pour Franco Basaglia (1924-1980) la rencontre avec la réalité de la vie asilaire et de nombreuses lectures. En 1961, date à laquelle il prend la direction de Gorizia, paraissent Histoire de la folie, de Michel Foucault,Asiles, d'Erving Goffman, mais aussi Le Mythe de la maladie mentale, de Thomas S. Szasz, etLes Damnés de la terre, de Frantz Fanon. En Italie, la situation des hôpitaux psychiatriques est alors particulièrement arriérée. " Une part de la radicalité du mouvement antipsychiatrique italien peut s'expliquer par l'état de délabrement des asiles. Il est certain que Basaglia ne pouvait supporter l'idée de devenir le directeur d'une prison. Lui-même avait été enfermé pendant plusieurs mois pour son appartenance aux mouvements antifascistes en 1944 ",rappelle le préfacier de la nouvelle édition, Pierangelo Di Vittorio, auteur de Franco Basaglia. Portrait d'un psychiatre intempestif (Erès, 2005). Aussi Basaglia met-il en place des assemblées quotidiennes où patients et thérapeutes échangent leurs points de vue. Le livre fait entendre ces discussions passionnantes qui forment le pivot de la " communauté thérapeutique ", modèle inspiré par le psychiatre britannique Maxwell Jones. En quelques mois à peine les changements sont notables : libres, les fous fuguent moins. Certains parviennent même à retrouver le cours de leur vie normale. Gorizia cesse enfin d'être l'enfer qu'il avait toujours été.

Mais L'Institution en négation n'est pas un satisfecit. C'est même tout le contraire. Pierangelo Di Vittorio le souligne : " Cet ouvrage ne livre pas tant un combat contre l'asile qu'un combat contre la communauté thérapeutique que Basaglia lui-même a mis en place. " Et c'est bien ce qui ressort, page après page : dans une franchise absolue, les uns et les autres notent l'extrême exacerbation des tensions, les fatigues et les obstacles. Les infirmiers ne trouvent plus les moyens de renouveler les premiers succès. Le directeur, lui, prend conscience que sa méthode, en rendant les malades plus calmes, a simplement rendu l'institution plus efficace. Alors que les réflexions des membres de l'équipe médicale et celles des patients s'entrechoquent, Basaglia se refuse à tenter de résoudre la crise. Car il en est sûr : la nature même de l'institution la destine à être toujours tiraillée entre ses visées thérapeutiques et sa mission de contrôle (il faut protéger la ville des fous). Un an après la parution du livre, il démissionne avec toute son équipe.

L'exigence de pensée qui se développe dans ces pages, adossée à des actes forts, en fait plus qu'un simple document. Il se pourrait que l'énergie contestataire qui en émane rejoigne la dynamique du mouvement contre la régression sécuritaire qui menace aujourd'hui le champ de la psychiatrie en France. Et y dépose les ferments d'un questionnement permanent.
Julie Clarini

EXTRAIT
" Le médecin (a) en effet un rôle précis que la société elle-même lui assigne : contrôler une organisation hospitalière destinée à garder et à soigner le malade mental. On a vu, cependant, à quel point la notion de garde (en tant que mesures de sécurité indispensables à la prévention et à la contention du danger que représente le malade) contredit la notion de cure, qui devrait tendre, en revanche, à l'épanouissement spontané et personnel du patient ; et de quelle façon elle la nie. Comment le médecin pourrait-il concilier cette double exigence en elle-même contradictoire tant que la société n'établira pas vers lequel des deux pôles (la garde ou la cure) elle entend orienter l'assistance psychiatrique ? (Octobre 1966.) "

L'Institution en négation, p. 145



mercredi 4 juillet 2012

Aide médicale aux sans-papiers : la franchise bientôt supprimée

2 juillet 2012
Mise en place l'année dernière, elle concerne les étrangers en situation irrégulière qui bénéficient de l'aide médicale d'Etat.

A LIRE AUSSI : Plaies d'exil. Femmes migrantes, quel accès aux soins ?Un dossier réalisé par Valentine Pasquesoone, étudiante à l'école de journalisme de Sciences-Po.

La franchise médicale de 30 euros imposée en 2011 aux étrangers sans papiers bénéficiaires de l’Aide médicale d’Etat (AME) va être prochainement supprimée, a annoncé lundi la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine.
«La promesse de François Hollande de supprimer le droit d’entrée à l’AME fera l’objet d’un texte de loi qui sera présenté dans les prochains jours», a déclaré Marisol Touraine devant la presse, à l’issue d’une table ronde sur l’exclusion.
Ce forfait avait été institué par la précédente majorité parlementaire, qui avait dénoncé l’explosion du nombre de bénéficiaires de l’AME et du coût de cette aide mise en place en 2000.
En 2011, l’AME a bénéficié à 220 000 personnes pour un coût global de 588 millions d’euros, contre 75 millions d’euros dans le budget 2000.
En juin 2011, deux députés, Claude Goasguen (UMP) et Christophe Sirugue (PS), avaient préconisé dans un rapport le maintien de cette aide aux sans-papiers à faibles ressources
Selon eux, il n’y a pas eu d’explosion de la consommation, ni «de fraude caractérisée», mais plutôt un fort accroissement du nombre de bénéficiaires (+185% depuis 2000).
(AFP)

« Mettre en scène sa maladie est thérapeutique »

Par figaro icon Pascale Senk - le 03/07/2012

INTERVIEW - Le Pr Cyril Tarquinio est professeur de psychologie de la santé à l'université Paul-Verlaine de Metz, directeur du master de psychologie clinique et psychothérapeute. Il vient de publier Comprendre et pratiquer les nouvelles psychothérapies (Éditions Dunod).

Cyril Tarquinio, professeur de psychologie 
de la santé à l'université Paul-Verlaine de Metz.

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Le trésor oublié du génie des maths

1 juillet 2012 

Depuis 1991, le mathématicien Alexandre Grothendieck vit reclus dans un lieu secret. Ses 20 000 pages de notes, conservées dans un cagibi de la fac de Montpellier, seront-elles enfin décryptées?

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Seuls 72% des actes médicaux sont « pleinement justifiés », selon les médecins


Selon l'enquête TNS effectuée sur un échantillon national de 803 médecins, (hospitaliers, spécialistes et généralistes libéraux), interrogés par internet du 27 avril au 4 mai, une immense majorité des médecins considère inutile certains actes médicaux, les médecins généralistes libéraux étant les plus catégoriques. Ils estiment que 68% seulement des actes se justifient, devant les médecins hospitaliers (74%) et les spécialistes libéraux (76%). Pour leur propre spécialité, l'ensemble des médecins estiment à 20% que les actes sont « souvent » justifiés, à 56% qu'ils le sont « parfois » et 24% « très rarement ». Chez les généralistes, les réponses sont de 27%, 59% et 14%.

Interrogés sur les raisons de ces actes superflus, les avis des médecins sont plus partagés.

« la demande des patients » est la raison la plus souvent évoquée par 93% des généralistes, puis vient « la peur du risque judiciaire » pour 58% de l’ensemble des médecins.
D'autres motifs font l'objet de réponses plus divergentes: « problème de formation des médecins » (39%), « absence de référentiels partagés par les professionnels » (37%, mais 49% parmi les médecins exerçant depuis moins de 10 ans), « absence de contrôle des pratiques » (27%, mais 42% parmi les hospitaliers et 15% chez les généralistes).

Le sondage a été commandé par la Fédération hospitalière de France (FHF), son président Frédéric Valletoux estimant mercredi dans Le Figaro que cette enquête « montre la maturité des acteurs du système de santé ». Mais, poursuit-il, « il ne faut pas imaginer que les 28% d'actes dont les médecins doutent de l'utilité puissent tous être supprimés. Sinon, nous aurions une médecine froide, mécanique, sans humanité ».
Mais, a conclu le président de la FHF, « il vaut mieux lutter contre ces actes que de décider leur déremboursement ».



28 % d’actes injustifiés : les médecins évoquent d’abord la pression des patients


De l’aveu même du corps médical, tous les actes médicaux pratiqués ne seraient pas justifiés. Un sondage* TNS commandé par la Fédération hospitalière de France (FHF) et disponible en ligne (formatPDF), livre d’intéressantes statistiques. Les médecins interrogés considèrent que 72 actes sur 100 sont pleinement justifiés (76 % selon les spécialistes libéraux, 68 % selon les généralistes libéraux et 74 % selon les médecins hospitaliers).
Les généralistes se font plus sévères s’agissant de leur propre discipline : ils sont 27 % à estimer que plus d’un acte sur cinq n’est pas justifié en médecine générale.
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Pour les généralistes (MGL), la demande des patients est à l'origine des actes injustifiés dans 93% des cas (sondage TNS).
La demande des patients est la première raison avancée (85 % des sondés y font référence ; chez les généralistes, le taux grimpe à 93 %). Suivent la peur du risque judiciaire (58 % des 803 médecins interrogés), un problème lié à la formation médicale (39 %), l’absence de contrôle des pratiques (27 %), les incitations économiques (20 %). L’absence deréférentiels partagés par les professionnels est citée par la moitié des jeunes médecins (exerçant depuis moins de dix ans).

Pas de sanction contre les médecins trop enclins à prescrire

La FHF a fait de la pertinence des actes l’un de ses chevaux de bataille. La lutte contre les actes superflus est un enjeu de santé publique autant qu’un enjeu économique, fait-elle valoir. Son président, interrogé ce 4 juillet par « Le Figaro », précise ne pas réclamer de sanctions contre les médecins qui prescrivent trop.
« Ce n’est pas notre logique, observe Frédéric ValletouxLa première chose à faire, c’est de rendre l’information disponible. Dans les mois qui ont suivi notre campagne de communication sur les radiographies du crâne inutiles, leur nombre a reculé de 9 %. Il y a encore trop peu deréférentiels qui, sur la base d’études scientifiques incontestées, indiquent aux médecins quels actes prescrire dans quels cas - même si la Haute autorité de santé a commencé ce travail, sur la cataracte ou les césariennes. Mais on doit aussi modifier les modes de rémunération pour que les revenus des professionnels de santé libéraux et des hôpitaux dépendent moins des volumes d’actes ».
› D. CH.
* L’enquête a été réalisée du 27 avril au 4 mai 2012 auprès d’un échantillon national de 803 médecins (402 médecins hospitaliers, 201 spécialistes libéraux, 200 généralistes libéraux).
lequotidiendumedecin.fr 04/07/2012


Une société à soigner

« Le XIXe siècle aura été le siècle de l’hygiène publique », rappelle l’historien des sciences Gérard Jorland. L’urba­nisation en particulier inquiè­te. Elle favorise les épidémies : la variole, le choléra, la tuberculose et la fièvre typhoïde font rage. À la croisée de la médecine humaine et vétérinaire, de l’économie, des statistiques, du génie civil et militaire comme de l’administration publique, l’hygiène publique met en évidence les causes sociales des maladies. Louis-René Villermé établit une corrélation entre le niveau de vie et les taux de morbidité et de mortalité. La leçon est claire : la pauvreté nuit gravement à la santé ! Sous la monarchie de Juillet et la IIe République, la misère ouvrière est au cœur des réflexions des hygiénistes. Ce qui ne les conduit pas à soutenir l’instauration d’un salaire minimum, mais une législation limitant le travail des enfants.

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Cet autre divan , psychanalyse de la mémoire du corpsMonique Dechaud-Ferbus
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De l’identité à l’existence

L’apport du peuple juif
Auteur(s) : DANIEL SIBONY
Date de parution : 05/01/2012

« Chacun cherche dans l’être des points d’amour qui soient pour lui, qui le “distinguent“, quitte à faire face aux ennuis que ça lui crée, quand il les trouve. Plus généralement, chacun, sujet ou groupe, tente d’exister en partant de son identité, dont il affronte les cassures, et transforme les secousses, comme il peut.

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