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dimanche 15 mai 2011

Témoignage d’un psychiatre: "Parler d’antidépresseurs n’a plus de sens"

Lassé des raccourcis souvent dangereux et stigmatisant relayés par les médias au sujet des "antidépresseurs" et des maladies psychologiques, William Pitchot, professeur de psychiatrie à l'ULG et psychiatre clinicien au CHU de Liège, nous a écrit pour recadrer un peu les choses.

13 Mai 2011 

Le Belge est un gros consommateur de médicaments. Une étude de la mutualité chrétienne publiée ce vendredi indique que celui-ci en a consommé plus de 8 milliards l'année dernière. Parmi ceux-ci, on retrouve régulièrement l’une ou l’autre pilule classée sous le nom "antidépresseurs". Pourtant, très souvent, celles-ci ne sont pas prescrites dans le cadre d’une "dépression". Elles n’en sont pour autant pas moins nécessaires.

Un nom mal choisi qui stigmatise les patient et freine les soins

Parfois, les patients hésitent à prendre un traitement fait d’antidépresseur. Ils hésitent aussi à l’évoquer avec leurs proches. Pour beaucoup, prendre des antidépresseurs serait faire aveu de faiblesse. Il n’en est rien. "Antidépresseur est aujourd'hui un terme qui n'a plus de sens parce qu'ils ne sont pas utilisés uniquement dans la dépression. Les antidépresseurs sont une classe pharmacologique particulière", nous explique William Pitchot,  professeur de psychiatrie à l'ULG et psychiatre clinicien au CHU de Liège. "Ce ne sont pas des neuroleptiques, des antipsychotiques ou des calmants. Leurs indications sont nombreuses comme la dépression mais aussi les troubles anxieux (phobie sociale, trouble panique, anxiété généralisée, TOC, ...), la douleur chronique et l'insomnie", continue-t-il.

Des raccourcis souvent dangereux dans la presse

Le professeur Pitchot regrette que, trop souvent, des raccourcis dangereux soient relayés par la presse. Pour lui, les médias participent ainsi, sans le vouloir, "à cultiver le sens péjoratif des mots ‘antidépresseur’ et ‘dépression’". L’information, au sens général,  donnée par la presse à ce sujet poserait problème par rapport à celle donnée en consultation. "L'interprétation que l'on peut faire du nombre d'antidépresseurs prescrits en Belgique est forcément complexe. Ces médications sauvent la vie de nombreuses personnes dans le monde", argumente-t-il.

Des conséquences parfois dramatiques
L’information diffusée n’est pourtant pas sans conséquences. Pour illustrer son propos, le professeur Pitchot nous rapporte les répercussions d’une annonce faite aux USA : "Il y a 3 à 4 ans, une alerte été émise par les autorités américaines sur le risque de suicide associé à l'utilisation des antidépresseurs chez les adolescents. La conséquence a été une réduction spectaculaire du nombre d'antidépresseurs prescrits chez les adolescents et parallèlement une augmentation tout aussi spectaculaire du nombre de suicides."

Il nous précise encore que prescrire des médicaments n’est pas le but premier recherché par un psychiatre. Son rôle premier est d’amener un patient vers un mieux-être, en évitant la médication quand cela est possible.

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