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dimanche 17 avril 2011

Jean Ayme
15.04.11

Pionnier de la psychiatrie dynamique, syndicaliste, psychanalyste et militant de gauche, Jean Ayme était né à Laon le 14 juillet 1924. Il s'est éteint à Paris le 31 mars 2011.

Engagé dans la Résistance en 1942, Jean Ayme adhère ensuite au mouvement trotskiste de Pierre Boussel (alias Pierre Lambert) qu'il ne quittera jamais. Cela ne l'empêchera pas de soutenir, avec ses camarades du Parti communiste français - Lucien Bonnafé, Sven Follin et Louis Le Guillant -, l'expérience de psychothérapie institutionnelle née à l'hôpital de Saint-Alban, en Lozère, sous la houlette de François Tosquelles, psychiatre espagnol de tendance libertaire, et de Paul Balvet, catholique de gauche.

En ce lieu, devenu mythique, s'étaient retrouvés pêle-mêle des résistants, des fous, des thérapeutes et des intellectuels de passage, parmi lesquels Georges Canguilhem et Paul Eluard.

Au milieu de la guerre, l'espoir d'une libération prochaine avait conduit l'équipe de cet hôpital à réfléchir au principe d'une nouvelle psychiatrie communautaire visant à réformer l'asile carcéral afin de lui substituer une thérapeutique de la folie fondée sur une relation dynamique entre soignants et malades.

Psychiatrie de secteur

Pendant l'Occupation, 45 000 malades mentaux étaient morts de faim dans les forteresses asilaires, créées au XIXe siècle et devenues de gigantesques mouroirs.

Au lendemain de cette hécatombe et grâce à l'apparition des médicaments de l'esprit - le Largactil notamment -, l'idée s'impose d'étendre l'expérience de Saint-Alban à toutes les institutions psychiatriques. Portée par la psychanalyse, elle permettait une alliance fructueuse entre le traitement chimique, la vie communautaire et la cure par la parole. Tous les psychiatres modernistes participèrent à cette aventure : Henri Ey, Georges Daumezon.

Analysé par Jacques Lacan de 1950 à 1970, membre de l'Ecole freudienne de Paris (EFP, 1964), puis du conseil d'administration de l'Ecole expérimentale de Bonneuil-sur-Marne (1969), auprès de Maud Mannoni, Jean Ayme a consacré l'essentiel de sa vie à cette entreprise de "désaliénation" de la folie : à l'hôpital des femmes de Clermont-de-l'Oise (1952-1963), à celui des hommes de Moisselles (1963-1980) et enfin à Sainte-Anne, à Paris (1979-1992).

Aussi fut-il, à la même époque, l'un des organisateurs de la psychiatrie de secteur, aujourd'hui démantelée, et qui avait pour objectif de traiter les malades comme des sujets à part entière, grâce à une prise en charge complète de la folie, à l'hôpital et "hors les murs".

A cet égard, Jean Ayme fut bien l'artisan du projet utopique né de la Révolution de 1789 et formulé ainsi par Bertrand Barrère le 23 messidor an II : "Mettez donc au-dessus de la porte des asiles des inscriptions qui annoncent leur disparition prochaine. Car si, la Révolution finie, nous avons encore des malheureux parmi nous, nos travaux révolutionnaires auront été vains."

14 juillet 1924 : Naissance à Laon
1942 : Communiste, il entre dans la Résistance et prend conscience d'une réforme majeure de la psychiatrie
1950-1970 : Analysé par Jacques Lacan
1952-1992 : Œuvre en milieu hospitalier à faire reconnaître les malades comme des sujets à part entière
31 mars 2011 : Mort à Paris

Élisabeth Roudinesco


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