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dimanche 30 janvier 2011

Deux drames soulèvent la question du suicide des enfants et adolescents

Une adolescente de 14 ans était dans un état grave après avoir tenté de se suicider jeudi dans son collège de Vaujours (Seine-Saint-Denis) en sautant du 4e étage de l'établissement, un drame qui survient au lendemain du suicide par pendaison d'un garçon de 11 ans.

La jeune fille, scolarisée au collège Henri IV, a tenté de mettre fin à ses jours jeudi en fin de matinée, a-t-on appris de sources concordantes, confirmant une information du site internet du Parisien.

Elle a été transportée à l'hôpital Necker, à Paris, dans un état grave, mais son pronostic vital n'est pas engagé, selon une source policière et le parquet. Elle souffre de multiples fractures.

Alors qu'elle devait aller en cours de sport, la collégienne a frappé à la porte d'une salle de classe et a demandé à l'enseignante d'entrer pour y récupérer un objet qu'elle disait avoir oublié, a expliqué le parquet de Bobigny.

Elle est entrée, s'est dirigée vers la fenêtre et a sauté devant l'enseignante et les élèves.

Les policiers ont entendu les élèves et professeurs témoins de la scène. Ses camarades de classe, ainsi que ses amis et sa famille vont également être auditionnés. L'Education nationale a mis en place une cellule de crise et de soutien psychologique au collège.

L'enquête a été confiée à la Sûreté territoriale de Seine-Saint-Denis.

Ce drame intervient au lendemain du suicide par pendaison d'un garçon de 11 ans, alors qu'il était seul chez lui à Saint-Laurent-en-Grandvaux, petit village du Jura.

L'enfant souffrait d'une "très grande solitude" et faisait d'ailleurs l'objet d'un suivi psychologique, selon le parquet de Lons-le-Saunier.

Neuf jours auparavant, près de Lyon, une fillette de 9 ans s'était défenestrée du 5e étage après avoir laissé un mot dans lequel elle faisait part de son mal-être, notamment face au diabète dont elle souffrait.

Ce cas de suicide infantile avait été qualifié d'"exceptionnel" par des experts psychiatres.

"C'est exceptionnel. Ce sont quelques cas par an, moins de cinq parfois, et encore pour les moins de 13 ans", avait expliqué à l'AFP le président de l'association France prévention suicide Michel Debout, légiste et psychiatre.

"Il y a aussi le problème d'interprétation du geste. Certains considèrent que, pour se suicider, il faut avoir une conscience d'être mortel. C'est pour ça qu'avant 12/13 ans on ne classe pas un certain nombre de morts dans la catégorie suicide", avait-il ajouté.

20minutes.fr
Stéphane Clerget : «Le suicide des enfants reste mal connu et mal évalué»


INTERVIEW - Le pédopsychiatre, auteur de «Ne sois pas triste mon enfant» (Éditions Robert Laffont) réagit à la création d'une mission d'information sur ce sujet...


Après la médiatisation de plusieurs suicides d’enfants et d’adolescents, le gouvernement a décidé de créer une mission d’information sur cette question. Que pensez-vous de cette initiative ?
Je ne suis pas surpris, je m’y attendais. C’est plutôt une bonne chose. Le suicide des enfants, c’est à dire des moins de 12 ans, reste mal connu et mal évalué.

Est-il en augmentation ?
Le suicide des adolescents s’est stabilisé, grâce à tout ce qui a été mis en place ces dix dernières années avec les Maisons des adolescents notamment. Mais pour l’enfant, c’est difficile à chiffrer dans la mesure où la différence est mal faite entre suicide réel et «équivalent suicidaire». Les accidents sont la première cause de mortalité chez l’enfant. Or, on ne recherche pas suffisamment un possible état dépressif derrière un accident, qui peut être le résultat d’un défaut d’attention, d’un laisser aller. Quand un enfant traverse au vert par exemple.

Quels sont ces signes dépressifs ?
Les enfants déprimés ne le montrent pas et ne le verbalisent pas toujours. Ce n’est pas le même tableau clinique que l’adulte. Mais un ensemble de signes peut alerter: la tristesse, des troubles du sommeil, des maux de ventre, une mésestime de soi - «je suis nul» -, des difficultés scolaires... En cas de doutes, mieux vaut aller consulter un pédopsychiatre.

La dépression chez l’enfant est-elle un phénomène nouveau ?
Non, mais le fait de la nommer est récent. Dans les années 70, on ne parlait pas de dépression chez les enfants. Comme si tout allait forcément bien pour eux. Alors que les facteurs de dépression sont nombreux: la perte d’un être cher -via un décès, une maman hospitalisée et donc absente, un divorce, un déménagement - un environnement conflictuel, insécurisant, la maladie, la maltraitance... Certains ont aussi une fragilité constitutionnelle dès la naissance. D’autres développent cette fragilité au cours des interactions dans la petite enfance.

Les causes de suicide ont-elles évolué ?
Au début du 20e, il n’y avait pas d’enquête épidémiologique sur le suicide. Mais on constate plusieurs choses. Les enfants et adolescents d’aujourd’hui sont très peu en contact avec la mort réelle, ils ne vont plus aux obsèques et ne voient pas les défunts. Cette dissociation entre la mort réelle et celle qu’ils voient tous les jours à l’écran peut favoriser un certain passage à l’acte. Qui peut d’ailleurs être perçu comme un passage à une meilleure vie. Ensuite, la puberté a rajeuni de deux ans. Les enfants sont adultes plus tard, mais ados plus tôt. Cette période de fragilité qu’est l’adolescence est ainsi prolongée. Enfin, parmi les «grands enfants» suicidaires (plus de 10 ans), on observe parfois une intolérance aux frustrations. C’est le syndrome de l’enfant roi.

Quelle représentation de la mort a-t-on à 9 ans ?
On a conscience dès 8 ans, de façon rationnelle, que c’est irréversible. Pour autant, l’enfant n’a pas la même notion de la mort que l’adulte. Pour ce dernier, souvent, elle est associée au néant, au rien. Pour l’enfant, la mort, ce n’est pas “zéro”. Elle peut être assimilée au sommeil et à cet âge-là, on croit aux morts-vivants. Mais de toute façon, on n’a pas besoin d’avoir conscience de la mort pour se laisser mourir. La pulsion de mort existe très tôt.
Propos recueillis par Catherine Fournier



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