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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

samedi 3 avril 2010



Journée mondiale de l'autisme : Morano veut encourager les "méthodes comportementalistes"
LEMONDE.FR avec AFP | 02.04.10 |

La secrétaire d'État à la famille, Nadine Morano, a souligné jeudi sa volonté d'encourager les "méthodes comportementalistes" dans le traitement de l'autisme, à la veille d'une journée mondiale de sensibilisation à cette maladie. "La France était en retard sur les méthodes comportementalistes", a affirmé Mme Morano, lors de la visite à Paris d'une école expérimentale recourant à une méthode éducative, fondée sur l'analyse du comportement appliqué, dite ABA (Applied Behavior Analysis).

Rappelant que la France compte cinq cent mille personnes autistes ou apparentées et 1 autiste pour 150 naissances, Mme Morano a indiqué que le plan "Autisme 2008-2010" voyait son budget abondé de 10 % à 205 millions d'euros pour le soutien aux structures innovantes comme l'ABA. La prise en charge de l'autisme continue toutefois de faire l'objet d'une vive opposition entre les partisans d'une méthode éducative et les partisans de soins psychiatriques. Le plan "Autisme 2008-2010", présenté en janvier dernier en conseil des ministres, a pour objectif la création de quatre mille cent places en établissements d'ici à 2012. Mme Morano a promis "une accélération dans la création de places" dans le cadre de la loi.

Deux députés UMP ont déposé jeudi une proposition de loi visant à faire de l'autisme une grande cause nationale en 2011. Cela permettrait, selon le texte de la proposition, présentée par Daniel Fasquelle (Pas-de-Calais) et Jean-François Chossy (Loire), d'"améliorer son dépistage précoce, développer l'accompagnement des enfants autistes et favoriser leur intégration et leur maintien en milieu scolaire ordinaire".



Vendredi 02 Avril 2010

Pavillon carcéral

Une unité psychiatrique a ouvert, dotée d'un espace sécurisé pour 6 détenus
HÔPITAL DE MONT-DE-MARSAN.








L'espace carcéral, six chambres qui allient
le soin à la sécurité des détenus dont l'état
nécessite des soins psychiatriques hors
établissement pénitentiaire. (photo pascal bats)


C'est le troisième pan de la prise en charge des patients prisonniers par l'hôpital Sainte-Anne, annexe de Layné, après la création de l'Unité de consultations et de soins ambulatoires (UCSA) au sein même du centre pénitentiaire et l'aménagement de cinq chambres carcérales : une nouvelle unité psychiatrique a été inaugurée. Un site de 1 000 m2, baptisé pavillon La Fournière, que les résidents ont investi mercredi.

Ici, seront notamment accueillis les détenus dans le cadre des hospitalisations d'office ou dont l'état nécessite des soins à l'extérieur de l'établissement pénitentiaire. Des séjours dans tous les cas de courte durée. Ainsi, six chambres ont été conçues à l'usage des prisonniers. L'immeuble abritera aussi 24 lits en structure ouverte pour des patients traités en psychiatrie au long cours. Au total, la construction du pavillon, hors équipements, se chiffre à 1 million 400 000 euros. Sachant que le directeur Alain Soeur a obtenu le financement de la partie carcérale par le ministère de la Santé (1).

90 détenus en un an

Un pavillon sécurisé qui répond à une véritable nécessité. D'abord, parce que l'unité hospitalière spécialement aménagée qui devrait ouvrir à Cadillac, en Gironde, sera vite saturée, mais aussi parce que les transfèrements sont lourds en mobilisation de personnel. Jusque-là, les détenus nécessitant une hospitalisation en milieu psychiatrique étaient accueillis sur le site commun, où quelques aménagements avaient été conçus pour garantir la sécurité. Le strict minimum en attendant la nouvelle structure. Quatre lits qui ont tout de même vu passer pas moins de 90 détenus depuis l'ouverture de Pémégnan, il y a un peu plus d'un an. En moyenne, les patients sont restés 48 ou 72 heures. « Il s'agit surtout de traiter la crise d'un détenu agressif, suicidaire, ou qui traverse une authentique décompensation d'une psychose antérieure ou survenue en prison », explique le docteur Martine Guillem, psychiatre responsable de l'unité.

Pour faire face à ces situations extrêmes, le personnel sera formé mais aussi renforcé. En effet, le service peut compter sur six infirmiers et quatre aides-soignants de plus (pour un effectif total de 23 infirmiers, dix aides-soignants, quatre agents de service hospitalier et un cadre de santé).

L'unité est de toute façon sécurisée : la cour est grillagée et dotée de caméras vidéo, le mobilier des chambres est vissé de l'intérieur, les vitres sont incassables... Un savant compromis entre la sécurité et le soin, qui, ici, reste prioritaire. « On n'est, et on ne veut pas être une prison », martèle Martine Guillem.
D'ailleurs, d'après les médecins, les patients détenus ne posent pas plus de difficultés que les autres. « Les situations de violence qui ont pu mettre le personnel en péril concernaient des patients de psychiatrie classique, et non des détenus, pour lesquels on bénéficie de l'aide de la police », explique Alain Soeur. « Sur 90 hospitalisations d'office de détenus, à l'exception de deux fugues, il y a eu seulement deux incidents. Même si, par leur nature et leur intensité, ils nous ont interpellés. »

Mercredi, les patients en psychiatrie longue durée ont investi leurs nouveaux locaux, décorés par une coloriste, tandis que le bâtiment qu'ils occupaient jusqu'alors entre en phase de rénovation. Pour l'heure, l'espace carcéral est vide. Une situation qui peut toutefois changer d'une minute à l'autre. Pas grave : la structure et le personnel sont prêts.

(1) L'hôpital a en effet obtenu les financements pour réaliser l'infrastructure et une dotation provisoire pour financer les création de poste.

Auteur : Aude ferbos
a.ferbos@sudouest.com


Et du côté du privé, comment ça va ?





31/03/10


Tous les indicateurs d’Orpea sont au vert

Le groupe de gérance de maisons de retraite atteint un chiffre d’affaires de 843,3 millions d’euros en 2009, en hausse de plus de 20%, et engrange un bénéfice net de 61 millions, soit une progression de plus de 21%.

Le groupe Orpea, gérant de maisons de retraite et de cliniques de moyen séjour et de psychiatrie, a publié ses résultats 2009 ce mercredi. Tous ses indicateurs de performances sont en hausse. Son chiffre d’affaires croît de 20,1% sur l’exercice à 843,3 millions d’euros pour un résultat opérationnel en hausse de 25,1% à 133,8 millions d’euros.

Le bénéfice net atteint 61 millions d’euros, en progression de 26,1%. Le conseil d’administration proposera à l’assemblée générale un dividende de 0,15 euro par action contre 0,10 en 2008.

Perspectives optimistes pour les trois prochaines années

Le groupe indique qu’il prévoit, pour les trois prochaines années, une croissance soutenue de son chiffre d’affaires. Pour 2010, il espère atteindre 960 millions d’euros de ventes, puis 1,1 milliard en 2011 et 1,225 milliard en 2012 «tout en maintenant une rentabilité solide, une croissance des cash-flows d’exploitation, et des ratios d’endettement maîtrisés».

Pour le Docteur Jean-Claude Marian, PDG d’Orpea, le groupe va continuer «sa dynamique de développement au rythme d’environ 3.000 lits par an, tant par création de nouveaux établissements, via l’obtention d’autorisations supplémentaires dans le cadre des appels à projets, que par des acquisitions ciblées. En effet, en France, comme dans les autres pays européens d’implantation du groupe, il existe toujours un potentiel considérable lié au vieillissement de la population, et une offre notoirement insuffisante.»

Orpea disposait en mars 2010 d’un réseau d’établissements répartis sur 300 sites en Europe pour 28.073 lits, dont 22.892 lits en France sur 252 sites, le reste disséminé entre l’Espagne, la Belgique, l’Italie et la Suisse.

Le titre Orpea à la Bourse de Paris grimpait de 2,79% à 31,35 euros vers 9h05 ce mercredi.




ACTUALITÉS
01/04/2010

L'Ordre plaide pour une spécialisation des infirmiers en psychiatrie








L'instance se prononce, entre autres, pour la mise en place d'un nouveau référentiel de formation et pour une meilleure reconnaissance des infirmiers de secteur.


Lors d'une conférence de presse tenue le 30 mars (lire ici en ce qui concerne la cotisation), Dominique Le Boeuf, présidente de l'Ordre, a présenté la position votée par le conseil national sur la refonte de l'exercice infirmier en psychiatrie. Ce texte plaide en faveur d'une spécialisation des infirmiers en santé mentale et psychiatrie, comme cela existe pour la puériculture, l'anesthésie ou l'activité en bloc opératoire. Ce cursus de spécialisation pourrait se poursuivre, à partir du socle commun des compétences infirmières (licence), lors de deux années de spécialisation en master 1 (spécialisation clinique) et en master 2 (pratiques avancées).

Il faudra réfléchir à "une référence nationale indicative du nombre d'infirmiers spécialisés recommandés par secteur de psychiatrie et territoire de santé pour garantir le niveau d'expertise requis au sein des équipes soignantes".

Cette reconnaissance de la spécialisation implique de "parvenir à une reconnaissance des infirmiers de secteur psychiatrique (ISP) équivalente à celle des infirmiers diplômés d'Etat (IDE)".

Défis de la recherche

Il faudra aussi valoriser les "missions d'orientation, de première évaluation et de référent-coordonnateur de l'infirmier en psychiatrie et en santé mentale" dans le cadre d'une recommandation de la Haute Autorité de santé (HAS) pour la pratique clinique portant sur la"consultation infirmière".

Cela implique également d'élaborer un nouveau référentiel de compétences et de formation de l'infirmier spécialisé en psychiatrie "bénéficiant des expériences de pratiques avancées selon un cadre réglementaire adapté". Il faudra en outre faire émerger une "dynamique de recherche en sciences infirmières incluant la problématique des soins en psychiatrie pour relever l'ensemble des défis mis en évidence par les experts, les rapports officiels et les recommandations de bonnes pratiques". Enfin, l'Ordre propose d'inscrire la psychiatrie et la santé mentale comme l'un des programmes prioritaires du prochain programme hospitalier de recherche en soins infirmiers (PHRSI).

L'Ordre précise qu'il souhaite travailler "sans plus attendre avec les pouvoirs publics et les autres organisations professionnelles compétentes pour faire reconnaître et promouvoir de manière effective l'expertise clinique et professionnelle des infirmiers en santé mentale et en psychiatrie".

(Agence de presse médicale)

Psychanalystes, qu'avons nous fait de la psychanalyse ? Anne Millet










La psychanalyse a pour but de permettre au patient de redevenir sujet de sa parole : pourquoi alors aliène-t-elle celui-ci dans des cures interminables ? Et pourquoi les psychanalystes sont-ils aliénés à leurs doctrines et à leur corporation ? Le but de cette étude est de comprendre ces deux faits récurrents dans l’histoire de la psychanalyse. Et l’hypothèse de l’auteur est que ce n’est pas la psychanalyse en tant que discipline qui est menacée mais sa pratique : la méthode thérapeutique forgée par Freud, qui perdure sous la forme de la « cure type ». Cette méthode a fait l’objet de nombreux conflits dans son histoire, et reste pourtant relativement inchangée. Conflits violents entre Freud et deux de ses disciples, Rank et Ferenczi. Conflits passionnels autour de Jacques Lacan. À chaque fois, les mêmes interrogations: le pouvoir de la méthode, son efficacité thérapeutique, les implications du transfert, la finalité de la cure. Autant de thèmes qui traduisent les difficultés techniques et les impasses rencontrées. Autant de failles qui mettent en jeu l’analyste dans sa fonction et dans son rôle. Si les réponses apportées furent différentes selon les époques, le mouvement dans l’ensemble fut celui de la préservation de l’invention. Aux propositions des uns de modifier la technique, a répondu le souci de la communauté de défendre la pureté de la méthode.
Mais à quel prix ?

Anne Millet est psychanalyste et publie là son premier ouvrage.
Elle vient de démissionner de la SPP.
LES LIVRES DE PSYCHANALYSE
http://les-livres-de-psychanalyse.blogspot.com/2010/04/il-ny-pas-de-rapport-sexuel-deux-lecons.html


JEUDI 1 AVRIL 2010

Il n'y a pas de rapport sexuel - Deux leçons sur "L'Etourdit" de Lacan
Alain Badiou, Barbara Cassin











Paru le : 31/03/2010
Éditeur : Fayard
Collection : Ouvertures
Prix : 12 €

Dans « L’Étourdit », paru en 1973 et tenu pour l’un de ses textes les plus obscurs et les plus importants, Lacan pose certains concepts essentiels de son œuvre, dont la formule fameuse « Il n’y a pas de rapport sexuel », qui interroge la validité de notre rapport au réel. Alain Badiou et Barbara Cassin s’emparent de ce court texte pour penser « avec » lui et en offrent deux lectures qui prennent le savoir pour enjeu. Barbara Cassin l’envisage à partir de son rapport intime aux choses de la langue ; Alain Badiou analyse ce que la philosophie prétend pouvoir dire quant à la vérité.
Ces études de « L’Étourdit », en se faisant écho, éclairent d’un jour inédit la pensée de Lacan et proposent un nouveau partage entre la masculinité de Platon et la féminité de la sophistique.

LA NON-EXCOMMUNICATION DE JACQUES LACAN, quand la psychanalyse a perdu Spinoza, de José ATTAL










224 pages
20 €
ISBN : 978-2-914596-28-6
ISSN : 1284-8166
l’unebévue éditeur
110 bd Raspail 75006 Paris


Freud est resté discret sur l’importance qu’avait pour lui Spinoza, son «frère d’incroyance », tout en déclarant : «J’admets tout à fait ma dépendance à l’égard de la doctrine de Spinoza ». En revanche, on connaît le goût de Jacques Lacan pour le philosophe marrane. Sa chambre d’étudiant était tapissée du plan de l’Éthique, et dans sa thèse de psychiatrie, la doctrine de Spinoza est présentée comme « la seule conception » pouvant rendre compte de la psychose paranoïaque.

En 1964, Lacan est exclu de l’Association Internationale de psychanalyse. Dans le vide qui se présente alors, propice à une nouvelle fondation, Althusser prend en charge Lacan qui traverse une crise grave, et en fait, à la manière de Machiavel, un Prince dont il sera le conseiller. Ainsi, c’est un Lacan sous influence qui trouve refuge à l’École Normale Supérieure pour y tenir séminaire, et qui déclare, dans la première séance, qu’il vient de subir une excommunication, celle même du marrane Spinoza, un herem, dans son degré maximal, chamata.

Sa « cogitation spinozienne » prendra fin en récusant la position de Spinoza à l’endroit du sacrifice et de l’Amor intellectualis dei comme n’étant pas tenable pour le psychanalyste. Le psychanalyste ne peut pas être excommunié.

Avec le plus grand respect, Lacan a congédié Spinoza qui avait tant compté pour lui. Ce geste est loin d’être reconnu par nombre de psychanalystes aujourd’hui, – de fait, « althussero-lacaniens » –, dont l’affiliation à leur groupe repose souvent sur une identification à un Lacan excommunié, propre à unifier ce qu’ils appellent « le peuple psychanalytique ».



guy Baillon
29 Mars 2010

Un véritable «accueil» en psychiatrie n’a pas besoin du diagnostic comme outil mais de confiance

Je peux témoigner après 20 ans de travail d'accueil (notre centre d'accueil et de crise s'est ouvert en 1982, il est toujours en fonction avec les successeurs) qu'un tel travail passionne les soignants et a des résultats remarquables pour les soins (les soins qui font suite à l'accueil font l'objet d'une négociation entre le patient et les soignants, ce qui en assure la continuité, de ce fait le besoin d'hospitalisation et les ‘urgences' ont fortement diminué).

Quelques précisions préalables sont nécessaires, courtes (nous aurons l'occasion de les reprendre lors de nos mille et un lundis ‘à venir' -dans cette lettre hebdomadaire du lundi).

D'abord "l'Accueil psychique" est réalisé dans le cadre d'un seul secteur, et peut comprendre, selon la forme de travail choisie, 6 à 12 soignants. Cette activité bien sûr doit avoir été présentée à l'ensemble de l'équipe de secteur (les 40 à 80 personnes qui la composent) et doit être soutenue directement par le chef de secteur et le cadre infirmier, car elle nécessite une qualité de liens internes d'un haut niveau sur l'ensemble de l'équipe, donc un soutien général, sinon elle devient persécutrice.

Nous avons vu (lettre précédente) que les usagers du secteur demandaient (dès 1979) une ouverture 24h/24, comme le font aujourd'hui en 2010 la FNAPSY et l'UNAFAM.

Son travail s'appuie d'abord sur l'engagement des infirmiers, car ils sont les premiers à établir les entretiens, le psychiatre étant au second plan pour participer à l'élaboration de la "conduite à tenir" qui se fait sans protocole préalable mais en s'adaptant à chaque situation.

Enfin ce travail s'appuie certes sur la générosité et le plaisir des soignants (un accueil sans le sourire, c'est l'entrée en enfer assurée !), mais il a besoin d'une technique relationnelle, simple à expliquer, complexe à réaliser, nécessitant sa reformulation régulière grâce à une formation permanente à organiser en interne : cette technique c'est la nécessité que l'accueil soit assuré par les deux mêmes infirmiers ! Il faut se préparer à la prolonger plusieurs jours de suite ou plusieurs semaines, selon sa complexité.

La continuité ainsi annoncée est le point central. Cela veut dire que l'accueil ne se fait pas en mettant aussitôt le patient dans un lit (il devient immédiatement ‘dépendant', passif), mais en revoyant la personne en entretiens avec les mêmes soignants alors qu'elle continue à vivre chez elle.

Cette continuité du lien est le premier point indispensable (si la personne qui revient plusieurs jours de suite voit à chaque fois des soignants différents, elle comprend que l'on se moque d'elle, elle ne saura lier aucun lien, ni ‘travailler' sa souffrance). Le fait que les infirmiers soient deux permet un minimum de souplesse dans les présences, tout en laissant la possibilité aux infirmiers de jouer plusieurs rôles avec la personne. Ce n'est que dans ces conditions que l'on peut construire la ‘confiance' qui est la base de tout travail d'accueil.

La durée de l'accueil est variable avec la gravité de la souffrance, il peut être très court quelques entretiens, quelques jours, ou nécessiter une succession plus longue, mais défini, nous avions pris le parti de nous limiter à deux mois. Ceci convient à toutes les formes de plaintes et de souffrances psychiques, nous le verrons.

Ensuite rappelons l'objectif de l'accueil : nous cherchons à réaliser « une rencontre », une vraie rencontre humaine, solide, dense ; indispensable si nous voulons que la personne qui vient seule ou accompagnée puisse peu à peu aborder ce qu'elle vit comme les raisons de sa souffrance, raisons qu'elle ne sait même pas identifier, et dont l'éventuelle nature psychique l'effraie.

Nous nous trouvons maintenant devant plusieurs problèmes à résoudre :

-Le premier c'est d'établir avec attention les conditions qui permettent une « rencontre ». Il ne suffit pas que deux ou trois personnes soient dans la même pièce pour qu'elles arrivent à se parler ! Celles qui ‘accueillent' doivent être dans un état d'esprit de disponibilité qui nécessite une préparation dans la vie psychique de chacun. Pas question de ‘brûler les étapes'. La personne, qui est accueillie n'est pas prête à parler ‘psy', elle n'est pas d'emblée ouverte à un dialogue, car contrairement à ce qui se passe en médecine ou chirurgie où elle se plaint facilement, ici elle évite l'échange et ‘ne demande rien' elle-même.

-Nous comprenons donc peu à peu que la question du diagnostic n'est pas dans nos préoccupations ici, alors qu'en médecine chirurgie, c'est la clé qui permet de décider de la conduite à tenir. Ici le seul souci est d'installer une ‘rencontre', car c'est elle qui va favoriser la reconnaissance de chacun comme ‘une personne' (non pas comme un malade). Le soignant ne peut se contenter de dire son prénom, il a à se présenter comme une personne avec ses intérêts (c'est dire si la blouse blanche à l'accueil est un contre-sens, car elle installe le soin, ce qui n'a pas de sens pour la personne qui arrive et ne sait encore rien de ses troubles). Un infirmier, plutôt qu'un psychiatre ou une psychologue, est la meilleure personne pour l'accueil, car il a l'aisance et la simplicité pour évoquer le ‘quotidien', la vie, sans avoir la prétention de courir après les symptômes, ni le diagnostic. D'autant que les symptômes essentiels ‘s'affichent' d'emblée : l'angoisse, la tristesse, l'agitation, le retrait, l'incohérence. Soyons clairs, ce n'est là qu'une partie d'un diagnostic ; mais ils peuvent être un lien possible en même temps pour les différentes étapes de l'échange.

Dans l'espace limité d'une lettre nous ne pouvons envisager les différentes situations qui peuvent faire l'objet d'un ‘accueil'. Nous y reviendrons dans d'autres lettres. Précisons simplement que toutes les situations ‘aigues' (terme que nous préférons à "urgentes", tout en sachant que pour les personnes toute question ‘psy' revêt un caractère d'urgence, urgence non de solution mais de lien), complexes ou bruyantes, peuvent être abordées par cette équipe ; ce n'est pas là que nous recevons les demandes de consultation classique pour un trouble déjà connu ou ciblé ; l'accueil c'est le lieu de toute demande qui ne peut attendre, et qui de façon générale s'énonce comme étant une « souffrance psychique » urgente.

Cette souffrance, soit la personne l'apporte, soit l'entourage seul l'a repérée comme insupportable. Précisons qu'une souffrance psychique n'est pas un diagnostic, elle ne signe pas nécessairement l'existence d'un trouble psychique, de toute façon elle doit être écoutée, comme doit être écouté ce que vit l'entourage qui accompagne et qui souffre, famille, proche.

Le travail qui va suivre, j'y insiste, n'a pas pour objectif de faire un diagnostic, mais de distinguer les souffrances existentielles, qui accompagnent nos difficultés quotidiennes (rupture relationnelle, perte d'emploi, perte d'un proche, mais aussi tous les petits soucis de la vie, les simples changements,...) ces souffrances ne sont pas pathologiques, ce sont les compagnes de notre vie, elles nous sont utiles nous avertissant que nous avons ‘à travailler' certains de ses aspects pour retrouver calme et cohérence dans notre vie. Il n'est pas justifié de donner un antidépresseur à quelqu'un qui vient de perdre son emploi, il a besoin d'être écouté pour retrouver sa propre dignité et sa capacité à se défendre. L'écoute permet de les distinguer des autres souffrances psychiques en lien avec un trouble, indiquant là qu'il faut faire un travail psychique.

Il est en effet important de décrire ce que représente le ‘diagnostic' en psychiatrie. pour cela il faut savoir ce que constitue l'annonce à des parents de la psychose de leur enfant : le ciel leur tombe sur la tête ! Pire c'est la guerre civile dans la famille ! Nous comprenons qu'avant d'évoquer un diagnostic auprès de parents, il faut d'abord comprendre ce que vit cette famille et l'aide dont elle a besoin pour affronter une telle réalité.

L'annonce du diagnostic directement à une personne constitue un fait plus grave : c'est une perte d'identité, car apprendre que nous présentons un trouble psychique touche ce que nous aimons le mieux, ‘nous-mêmes', il nous désigne comme invalides, incomplets, blessés. Cette atteinte à notre identité est profondément traumatisante, et peut avoir des conséquences graves soit en aggravant une tristesse, soit en provoquant l'agressivité.

Maintenant précisons ce que constitue un diagnostic pour le soin psychiatrique : c'est un moment d'un échange entre une personne qui est malade et son psychiatre. C'est donc une donnée absolument personnelle qui ne regarde que deux personnes. Le dévoiler constitue une attaque grave, un délit clairement puni par la loi.

En réalité en psychiatrie le diagnostic n'est qu'une étape dans un processus thérapeutique. Il peut paraître étonnant que l'on commence un traitement sans avoir posé de diagnostic. Nous y reviendrons aussi, mais le diagnostic, on le comprend, est un outil thérapeutique qui ne peut être abordé avec la personne qu'après un temps suffisant ayant permis d'installer la confiance. A partir de là le diagnostic va permettre la mise en place d'un contrat tacite entre le thérapeute et la personne, pour placer, situer, préciser autour de quoi on va développer le traitement ; celui-ci est basé sur l'échange, et son but est de permettre d'amorcer le changement psychique indispensable pour libérer la personne de ses gangues psychiques qui la poussent à répéter les mêmes symptômes.

Nous comprenons donc qu'un diagnostic dans un processus thérapeutique ne peut être que partiel et qu'évolutif, accompagnant l'évolution de la personne.

Nous en avons assez dit aujourd'hui pour affirmer que ce qui nous est proposé par la ministre, actuellement et aussi demandé en toute inconscience par les usagers et par les familles est grave pour la psychiatrie, c'est-à-dire pour les patients.

D'abord affirmons que si dans tous les secteurs les équipes avaient eu la liberté, la lucidité, et la volonté de mettre en place un tel travail d'accueil permettant de rencontrer tous les patients en situation d'urgence, même ceux qui arrivent avec une demande d'hospitalisation faite par un médecin ‘à hospitaliser', grâce à une disponibilité 24h/24 par des soignants compétents du fait de leur expérience là, il est évident qu'aujourd'hui les familles et les usagers ne demanderaient pas d'obligation de soins à la loi.

Mais puisque l'accès aux soins est "kafkaïen" et que les équipes sont de plus en plus repliées sur elles-mêmes dans leur service hospitalier éloigné, les familles et les usagers demandent l'obligation de soins qui va obliger les soignants à recevoir sans délai le patient (la loi de 1838 avait elle aussi pour but d'obliger à accueillir même les indigents sans fortune, incapables de payer leurs soins. Nous en sommes donc toujours au même point).

Cependant nous devons affirmer aussi que le projet d'accueil de 72 h n'a rien d'un travail d'accueil, car il a des lits, et ces lits annulent, par la dépendance qu'ils installent, la place d'acteur du patient ; d'autre part il ne dure que 72h alors qu'il faut souvent des semaines pour faire évoluer le patient ; enfin il se déroule sous le coup d'une ‘obligation', c'est-à-dire avec une perte de liberté, ce qui va souvent provoquer soit le retrait, soit l'agressivité, ou bien s'il est accompagné de médicaments à haute dose, c'est une camisole chimique qui annule toute liberté, donc tout désir de soin.

Le pire est que pour la Sécu qui paye, il faudra un diagnostic à la fin des 72h. !

Une telle succession de moments "obligés," "validés" par un diagnostic, constitue une mise en miettes de la psychiatrie !

Il est clair que l'obligation de soins à domicile en ne se centrant que sur la continuité de prise du médicament, au lieu de choisir la libre démarche se déployant dans une psychothérapie au long cours, va finir de détruire la psychiatrie construite depuis 50 ans.

Pourtant je peux affirmer que dans un centre d'Accueil, tel que celui décrit plus haut, les soignants aiment leur travail passionnément car ils vérifient quotidiennement les effets de leur travail (depuis 1982 ce centre d'accueil existe et l'équipe hospitalière n'a jamais eu besoin de plus de lits, que les 19 du début) alors que le nombre d'infirmiers et de psychiatres diminue sous l'effet des mesures violentes d'économie imposées par leur directeur. La formation continue en interne, et l'engagement du chef de service, maintiennent l'ensemble. L'accueil engage la confiance. Le diagnostic est inutile là car il ne se base sur rien. Il faut du temps.

(à suivre) Guy Baillon

dimanche 28 mars 2010

Sébastien Fritsch, Écrivain
http://sebastienfritsch.canalblog.com/archives/2010/03/19/17098683.html

Freud à Nancy

Michel Picard











Ce roman m
'a été offert l'année de sa parution : en 1997. Accessoirement, c'est aussi l'année au début de laquelle je me suis installé à Nancy. A l'époque, je ne disposais pas de beaucoup de temps pour la lecture et je ne me suis pas senti très attiré par ce pavé (558 pages) sur un thème a priori peu excitant.

J'ai parcouru quelques pages et je l'ai reposé sur une étagère

Treize ans plus tard (comme on dit dans les BD), en rangeant (pour la ènième fois) ma bibliothèque, je suis retombé sur ce volume. J'ai parcouru quelques pages... et j'ai été conquis.En fait de "thème pas excitant", ce gros bouquin présente plutôt deux thèmes... et ils sont tout aussi passionnants l'un que l'autre.
L'histoire principale est, comme le titre l'indique, le séjour que fit Sigmund Freud dans la capitale lorraine au cours de l'été 1889. Il avait, peu de temps avant, séjourné à Paris, pour suivre les enseignements de Jean Martin Charcot (à ce propos, je vous conseille, une fois encore, le génial roman de Patricia Parry : Cinq leçons sur le crime et l'hystérie). A Nancy, ce sont deux médecins que Freud vient rencontrer : tout d'abord le Profe
sseur Hippolyte Bernheim, figure éminente de la communauté hospitalière lorraine, dont Freud à déjà traduit en allemand l'un des ouvrages, et le Docteur Ambroise Auguste Liébault, vieux médecin de campagne, tout aussi célèbre dans les environs, à la fois pour son efficacité et pour sa bonhomie paysanne. Le point commun de ces deux médecins a priori si différents ? L'usage de l'hypnose.
Maîtrisant mal cette technique, pourtant très à la mode à l'époque, Freud est venu pour apprendre ; mais il en profite aussi pour emmener avec lui l'une de ses patientes viennoises, une richissime veuve (ce qui permet à Freud de se payer le voyage... et le petit hôtel minable dans lequel il séjourne). La pathologie de cette pauvre femme (mêlant douleurs, délires, phobies, crises d'"hystérie") résiste à toutes les tentatives de Freud. Bernheim, dont quelques scènes spectaculaires nous démontrent le talent, parviendra peut-être à la libérer de ses tourments. C'est du moins l'espoir de Freud... mais le ponte lorrain échouera tout aussi lamentablement que le débutant autrichien... ce qui permettra à Freud de commencer à entrevoir la possibilité d'utiliser d'autres voies pour guérir.
Tout en nous fai
sant découvrir les méthodes de ces médecins, les interrogations et théories naissantes du jeune Freud (33 ans à l'époque... et donc avec la même tête que sur la photo ci-dessous, qui date de 1891), Michel Picard en profite pour nous faire visiter Nancy. Freud se rend alternativement à l'hôpital Central, pour voir Bernheim, et aussi chez Liébault, qui se trouve en dehors de la ville ; il va fréquemment au Grand Hôtel, situé sur la place Stanislas et où loge sa patiente.










On le voit aussi se promener dans le parc de la Pépinière, rendre visite à Bernheim à son domic
ile, sur la splendide place de la Carrière. Pour ceux qui ne connaissent pas Nancy, ces noms n'évoquent rien, mais je crois que, même si j'ai eu plaisir à revoir des lieux décrits à la perfection par l'auteur, on peut le suivre sans ennui dans ces différents endroits, même sans jamais les avoir vus. Il parvient en effet à restituer chaque détail du décor avec un tel talent que l'on a vraiment l'impression de parcourir la ville dans un fiacre de l'époque, s'émerveillant de la beauté des façades du XVIIIème au point d'en oublier presque la chaleur écrasante de cet été 1889 et l'odeur âcre des petits cigares que Sigmund Freud, assis à nos côtés, prend plaisir à déguster.
Et le deuxième thème, me direz-vous ? Eh non, ce n'est pas la ville de Nancy (bien que la place que lui donne l'auteur pourrait le laisser croire). Ce deuxième thème commence dès le deuxième chapitre dont les premiers mots sont "Je suis en retard, se dit Maurice Barrès". Eh oui, à côté de Freud, c'est Barrès, célèbre écrivain lorrain que nous allons suivre tout au long de ce roman. Car, au cours de cet été 1889, Barrès est en campagne pour être élu conseiller général. Et il le sera ; et il fera par la suite une belle carrière politique. Pour se faire, manipulations d'idées et compromissions éhontées sont la règle. Barrès, connu pour être xénophobe et antisémite, se découvre subitement, au moment de cette campagne électorale, des penchants sociaux. Mais il le dit lui-même, en privé, du moins : il ne pense pas un traitre mot de ce nouveau credo : c'est juste pour rallier les voix des sympathisants socialistes, des ouvriers, des paysans.
Les chapitres qui traitent de cette campagne électorale permettent de découvrir d'autres lieux de Nancy : on suit des réunions électorales à Vandoeuvre, ou encore dans un grand chapiteau dressé sur la place de l'Académie, on voit le petit peuple des faubourgs ou des campagnes environnantes, pris par ses activités en même temps que par une envie de changement politique qui les dépasse. On visite aussi les cafés et les maisons closes où Barrès et ses amis (artistes ou politiciens) prennent du bon temps entre deux meetings ou deux articles politiques.
Mais quel peut bien être le point commun entre ces deux personnages, Freud et Barrès ? L'étranger sans le sou, désireux d'apprendre, et le jeune coq plein de suffisance et de haine, désireux de dominer ? Ils ne se connaissent pas, ils ne se croisent qu'une fois, dans un restaurant, mais l'auteur a sans doute créé cette scène plus par jeu que par souci de vérité historique. On pourrait trouver comme point commun que Freud est juif et Barrès antisémite. Mais, ce dernier ne connaissant pas le médecin viennois, ne peut lui vouer le moindre sentiment négatif (mais il ne se gêne pas de le faire quand il parle de Bernheim, juif également et bien connu de Barrès, comme de tout nancéien). En fait, le principal point commun est développé peu à peu par l'auteur : son idée est que les politiciens font exactement la même chose que les médecins qui utilisent l'hypnose et son corolaire : la suggestion. Bernheim, en hypnotisant ses patients, parvient à leur "suggérer" que leurs maux disparaissent... et ça marche.
Barrès et ses acolytes, jouant avec les mots, écrits dans des journaux, sur des tracts ou scandés dans des meetings, entraîne derrière lui des foules qui voteront pour lui.
Ne serait-ce que pour ces idées (encore d'actualité de nos jours... et sans doute pour longtemps), ce roman vaut vraiment le coup. Mais le fait de suivre aussi le cheminement des pensées de Freud augmente encore l'intérêt de ce livre. Et puis, il y la visite de Nancy, la peinture de l'époque, foisonnante de détails, sans oublier le style de l'auteur, riche, précis, mais en même temps vivant et souvent amusant, aidant à faire passer les discussions parfois ardues que les personnages, férus d'hypnotisme ou de politiques, peuvent avoir entre eux.
Un roman complexe et exigeant, qui fait réellement travailler les neurones, et donne de quoi réfléchir pendant longtemps, une fois tournée la dernière page.


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Lesdi
ts déprimés

La revue nationale des Collèges cliniques
Revue n° 9 Mars 2010











Sommaire

I Présentation des collèges de clinique psychanalytique du Champ lacanien par Jacques Adam

Editorial Éliane Pamart

II Travaux des collèges de clinique psychanalytique de France et des Espaces cliniques associés

Les coordonnées historiques de la dépression

Positions dépressives, Colette Chouraqui –Sepel
Dépression et désir, Eliane Pamart
Quelques conséquences du débat Freud-Abraham, Jean-Jacques Gorog
A propos du Surmoi, Bernard Nominé

St Thomas, Dante, Spinoza et Lacan

Le vice du vice, Michel Bousseyroux
Le démon de l’ Acédie, Carmen Gallano
Dante et la lâcheté morale, Muriel Mosconi

Le dit déprimé et ses variantes cliniques

Maladies de l’idéal, Sol Aparicio
La face indévisageable de la perte, Marie-José Latour
Les mots de fausse espérance, David Bernard
L’enfant déprimé : Non-dit de l’Autre ou mal à dire du sujet ? Marie-Noëlle Laville
Affect et dépression

Présentation de l’affect, Albert NGuyên
L’affect ontologique, Christophe Faure
Les déprimés de l’escabeau, Colette Soler

Les différents abords de la mélancolie

Deuil ou mélancolie, Françoise Josselin
Faute et culpabilité dans la mélancolie, Lidia Hualde
Les énigmes de la mélancolie, Luis Izcovich
L’inquiétante étrangeté de la mélancolie, Freud, Abraham, Ségantini, Lacan. Jacques Adam

De Wedekind à l’art contemporain

Éveil d’Eros, printemps pour Thanatos, Nicole Bousseyroux
Le suicide de l’objet, Marc Strauss


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Pour l'amour de Freud Hilda Doolittle














Sortie le : 18/03/2010
Editeur : Des Femmes
Prix : 16 €


En 1933, poussée par une crise personnelle autant que par les événements historiques, Hilda Doolittle se rend à Vienne pour consulter Freud. Le récit de cette analyse s’appellera Pour l’amour de Freud.
L’auteure y explore, au-delà de son histoire familiale et de ses relations amoureuses, son propre processus de création. Une correspondance entre Freud et H.D. permet en outre de plonger au cœur de la relation singulière, d’affection et d’admiration réciproques, que continuèrent d’entretenir le maître de l’inconscient et la poétesse.

Les éditions Des femmes-Antoinette Fouque rééditent aujourd’hui cette œuvre dans une nouvelle traduction de Nicole Casanova, augmentée d’un extrait de la correspondance entre Hilda Doolitle et Bryher, sa compagne, publiée pour la première fois en France.

Hilda Doolittle (1886-1961), romancière et essayiste américaine, plus connue sous les célèbres initiales H.D., fut une éminente praticienne du modernisme, tout en demeurant toujours au-delà des courants dont elle a pu être proche, créant une œuvre absolument originale. Des femmes ont publié son œuvre romanesque et autobiographique, Hermione (1986), Dis-moi de vivre (1987) et Le Don (1988).


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Quelle transmission en psychanalyse ?


Le Coq-Héron - Numéro 200













Editions Erès

Mars 2010
Prix : 17 €


Le thème central de ce numéro concerne la singularité de la transmission en psychanalyse. Par delà les références à des modèles théoriques différents de la cure et à la pluralité des dispositifs découlant de ces débats, peut-on réussir à dégager des invariants repérables d'une transmission intra et interpsychique dans le travail analytique ?
Que transmet la psychanalyse au sein de chaque cure dans la singularité d'une rencontre intime entre analyste et analysant ? Quels effets de transmission se déploient entre ces deux protagonistes ? Que transmet l'analyste de ses propres traversées analytiques et théoriques à ses patients ? Que transmet l'analysant des nouages, enkystements, cryptes, symptômes et autres avatars de son histoire relationnelle à celui qui l'écoute ?
Le devenir responsable de la pratique psychanalytique n'est-il pas lié de façon éthique à la remarque winnicottienne selon laquelle il s'agit de faire de la psychanalyse quand cela se peut, mais quand cela n'est pas possible, de rester analyste en faisant alors ce qu'on peut ?
Le second thème de ce numéro 200 sera, en signe anniversaire, consacré à la naissance en 1969 de la revue avec la publication de quelques-uns de ses tout premiers articles : un autre versant incontournable d'une transmission, depuis 40 ans !

Ont participé à ce numéro : Jean-michel ASSAN - Gerard BAZALGETTE - G BOTVINIK - Eva BRABANT - Claude DE LA GENARDIERE - Bernard DEFRENET - Brigittte DOLLE-MONGLOND - Francoise DOLTO - Judith DUPONT - Mireille FOGNINI - Francoise FRANCIOLI - Imre HERMANN - Ghyslain LEVY - Jacqueline POULAIN-COLOMBIER - Remy PUYUELO - Ginette RAIMBAULT - Jean-jacques RITZ - Didier ROBIN - Guy ROGER - Jean-claude ROLLAND - Monique SCHNEIDER - Jacques SEDAT - Victor SMIRNOFF - Olga SZEKELY-KOVACS DORMANDI - Marc THIBERGE - Bernard THIS


La journée de l'ECF du dimanche 11 avril

http://ampblog2006.blogspot.com/2010/03/la-journee-de-lecf-du-dimanche-11-avril_25.html

- Criminologie et psychanalyse - n° 3

La journée de l’ECF du dimanche 11 avril
Criminologie et psychanalyse – n° 3
Modérateur : Pierre Naveau
24 mars 2010

Risque et prévention

Depuis les années 70, le risque est devenu un objet d’évaluation – jusqu’à occuper une place prépondérante actuellement – qui concerne de nombreux domaines (économique, sanitaire, environnemental, etc.) dont celui du crime et de la délinquance.
Dans le champ Justice/Pénal, les différentes lois [1], votées ces dix dernières années, ont fait émerger l’aspect prépondérant pris par le rapport d’expertise dans les décisions judiciaires, avec une demande explicite : celle de l’évaluation de la dangerosité et du risque de récidive.
Cette notion de “risque de récidive” appelle quelques réflexions.

Tout d’abord, pointons qu’elle ne va pas sans un corollaire, la prévention [2], soit la “réduction des risques”. Réduction des risques qui fait apparaître une croyance, celle de, faute de pouvoir résorber violence et jouissance, au moins de tenter de les décontaminer socialement. C’est aussi le rêve de pouvoir traiter la jouissance mathématiquement. Aux USA, cela a donné lieu aux sentencing guidelines, ici aux peines planchers. Traitement mathématique qui provoque l’éviction de toute forme de subjectivité, que ce soit du côté de celui qui est en infraction ou du côté du magistrat.
Appréhender le crime ou le délit en termes de probabilités revient à déconsidérer l’acte. Le passage d’une expertise de la responsabilité à celle d’une expertise de la dangerosité et du risque de récidive ne correspond-il pas au passage d'un acte, dont le sujet a à répondre, à une catégorie criminologique, à un pourcentage, qui le fixent dans un déterminisme dont il ne peut se déprendre ? Enfermé dans le savoir de l’expert, le sujet est éliminé de son acte. Exclu d’une position où il aurait à répondre de lui-même, c’est à l’expert que l’on demande de le faire et, là où la responsabilité est évacuée du côté du sujet, c’est du côté du magistrat et de l’expert qu’elle fait retour.
N’y a-t-il pas lieu de s’interroger sur ces questions, quand, traditionnellement, en droit, la notion de responsabilité était liée à celle d’intentionnalité, c’est-à-dire à l’imputation d’un acte à un sujet qui doit en assumer sa causalité ? Questions d’autant plus pressantes qu’à l’heure actuelle les frontières entre la peine et le soin tendent à se confondre : une injonction de soin peut venir comme alternative à une peine privative de liberté qui prendra effet si le soin s’interrompt : soin ou peine ? Condamnation par le soin ou soin par la peine ? Quel sens, aujourd’hui, est-il donné à la peine, à la condamnation ? Et quelle place est-il fait à la maladie mentale ? Les déclarations d’irresponsabilité pénale par les experts psychiatres se font de plus en plus rares, alors que, dans le même temps, les mesures d’incitation, voire d’obligation de soins, prolifèrent et conditionnent le devenir judiciaire du condamné, tant au niveau du prononcé de la peine que de son exécution – mesures d’aménagement de peine.

Par ailleurs, la prévention de la récidive est venue se substituer à la notion d’insertion/réinsertion. Notion, certes, qui ouvre, à elle seule, un débat. Qu’est-ce qu’être inséré ? Est-ce avoir un travail ? Ne pas travailler est-il synonyme de non-insertion ? Et celui pour qui toute sa vie se résume au travail, est-il un modèle d’insertion ? Si l’insertion se définit par le fait d’être dans le lien social, alors la marginalité ne peut-elle être un mode de lien social ? La question de l’insertion pose, avant tout, la question de la position qu’occupe le sujet dans le lien social, c’est-à-dire de la façon dont il y loge sa particularité, le plus intime de lui-même, soit sa jouissance. C’est aussi la façon dont il fait place à l’Autre. En se centrant sur la notion de risque, on essaie de rationaliser, maîtriser, par le calcul, la jouissance.

Et pourtant, depuis Freud, il est impossible de méconnaître qu’avec l’humain, la violence ne peut être réduite à des comportements utilitaires. La guerre, la cruauté, sont inhérentes à la civilisation, comme manifestations de la contradiction entre les exigences pulsionnelles du sujet et les exigences sociales, et, plus fondamentalement, comme manifestation, au niveau social, de ce que Freud a mis en évidence au niveau du sujet : la pulsion de mort. Il n'y a que l'homme pour ne jamais tarir en inventions, en raffinements dans la cruauté et la violence, en pure jouissance, sans aucune autre forme d'utilité. À la suite de Freud, Lacan a repris la question de la pulsion de mort à travers le concept de jouissance, en ajoutant qu’il n'est de sujet que comme sujet social – c’est-à-dire dans un rapport à l’Autre. La jouissance est ce qui fait obstacle au lien social, sauf à être pris dans des discours qui apparaissent comme des modalités de traitement de la jouissance, sauf à apparaître dans des symptômes qui se présentent comme des modes d'inscription de la jouissance. Concevoir les modalités d’exécution de la peine sous le seul angle de l’évaluation de la dangerosité/risque de récidive fait l’impasse sur les possibilités créatrices du sujet, sur ce que le temps passé en prison aura permis de construire : un projet qui fera fonction de suppléance et lui permettra de se soutenir dans la vie, dehors.

J’exerce en Maison Centrale – prison pour détenus condamnés à de très longues peines et à perpétuité – et je ne cesse de m’étonner devant le parcours accompli par certains détenus, souvent incarcérés pour des faits terribles, mais qui ont su se saisir des espaces d’élaboration offerts et se mettre au travail.

Valérie Ricau
[1] Notamment la loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles, ainsi qu’à la protection des mineurs (plus particulièrement des dispositions relatives au suivi socio judiciaire) + Loi du 12 décembre 2005 (qui est relative au traitement de la récidive des infractions pénales et qui dit, dans son article 723-31, que le risque de la récidive doit être constaté par une expertise médicale ordonnée par le JAP ou le procureur, afin de faire apparaître ou non la dangerosité du condamné) + Loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.
[2] Ce champ de la prévention très présent au Canada a, entre autres, contribué à l’essor des termes de “facteurs de risque” et de “facteurs de protection”. Les premiers facteurs accroissent l’incidence du risque, les seconds la diminuent. La toile de fond de cette approche est donc statistique.