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lundi 22 février 2010






Réforme de l'HOSPITALISATION SANS CONSENTEMENT : État clinique ou contrôle social ?

Projet de loi

Un projet de loi, réformant le texte de 1990 sur l'hospitalisation des malades mentaux sans consentement doit être prochainement présenté en Conseil des ministres. Dans la ligne du projet présenté en 2008 par Nicolas Sarkozy et de la récente circulaire du 11 janvier 2010 laissant aux Préfets la décision finale sur les sorties d’essai, le projet de réforme inquiète les psychiatres et les soignants. L’hospitalisation sans consentement restera-t-elle liée à l’analyse de l’état clinique du patient ou à une volonté prioritaire de contrôle social ?

Les hospitalisations à la demande d’un tiers (HDT) et les hospitalisations d’office (HO) sont au nombre de plus de 70.000 par an.

L'hospitalisation sans consentement en France tire ses fondements de la loi du 30 juin et du 6 juillet 1838 sur les aliénés, qui crée deux catégories de placements : le placement d'office, décidé par le préfet pour les individus dont les troubles affectent l'ordre public ou la sûreté des personnes, et le placement volontaire, décidé par le directeur de l'établissement à la demande d'un tiers pour les aliénés nécessitant un internement thérapeutique. Les malades mentaux étaient donc, dès cette date, pris en charge en fonction de la dangerosité de leur comportement.

La loi du 27 juin 1990 relative à l'hospitalisation sans consentement a introduit la possibilité, pour un malade, d'être placé à sa demande. En conséquence, le placement volontaire, rebaptisé « hospitalisation à la demande d'un tiers », est réservé aux personnes dans l'impossibilité de donner leur consentement. Le préfet est autorisé à hospitaliser d'office les personnes que l'autorité judiciaire a renoncé à poursuivre ou à condamner en raison de leur état mental et qui nécessitent des soins. Enfin, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a précisé les conditions de l'hospitalisation d'office : le critère thérapeutique de l'internement est affirmé et l'état du patient doit gravement porter atteinte à l'ordre public.

Un projet de réforme sur l’hospitalisation d’office : Initié par Nicolas Sarkozy ce projet propose 2 volets, avec -un renforcement de la sécurisation des établissements avec un meilleur contrôle des entrées et sorties des établissements et une surveillance renforcée des malades considérés comme les plus à risques à l’aide d’un dispositif de géo-localisation.

- des autorisations de sortie durcies, après un internement d’office laissées à l’arbitrage du préfet et non aux experts médicaux.

La circulaire du 11 janvier 2010, signée du Ministre de l’Intérieur et du Ministre de la Santé reprécise les modalités d’application de l’article 3211-11 du code de la santé publique sur l’hospitalisation d’office et précisément les sorties d’essai. Elle revoit les modalités de sorties, ces sorties pouvant être « accordées dans le cas d’une HO par le représentant de l’Etat dans le département et à Paris par le Préfet de police sur proposition écrite et motivée d’un psychiatre de l’établissement ». Si « l’appréciation de l’état de santé mentale de la personne revient au seul psychiatre, en revanche il appartient au Préfet d’apprécier les éventuelles conséquences en termes d’ordre et de sécurité publics ». Par ailleurs, la circulaire précise « qu’un délai inférieur à 72 heures ne saurait être admis ».

Pour de nombreux psychiatres et soignants les raisons sanitaires sont bafouées
: le préfet pourrait ainsi décider si un patient hospitalisé en HO peut bénéficier ou non de sortie d’essai acceptée par les équipes soignantes. Le Syndicat des psychiatres d’exercice public (SPEP) y voit un retour « à une psychiatrie de l’asile qui enferme, qui garde et qui contrôle ». Un communiqué commun du 17 février 2010 de l’Intersyndicale des Psychiatres Publics et du collectif Psychiatrie, sur le projet interministériel de révision de la loi sur les hospitalisations sans consentement en psychiatrie rappelle « l’attachement historique et éthique des psychiatres hospitaliers à des soins centrés sur l’état clinique des personnes et leur opposition à toute utilisation de la psychiatrie à des fins de contrôle social ». Or le projet, précise le communiqué, ajoute le recours systématique à l’avis d’un collège non exclusivement médical pour les sorties des personnes présentant des antécédents d’hospitalisation en Unité pour Malades Difficiles (UMD) ou de prononcé d’irresponsabilité pénale.

Pour certains experts médicaux, en plus de l'atteinte aux libertés individuelles, il y a atteinte au secret médical et à la déontologie médicale puisque le médecin doit fournir tous justificatifs demandés par le Préfet dans l’instruction des demandes de sortie. L'Unafam (Union nationale des amis et familles de malades psychiques), qui souligne « des avancées positives » souhaite que le collège constitué pour les décisions concernant les situations difficiles puisse « être composé exclusivement de médecins psychiatres pouvant être certificateurs, afin de respecter une cohérence des compétences requises entre l’entrée et la sortie du dispositif des soins sans consentement ».

Source : Union syndicale de la Psychiatrie ; Collectif psychiatrie, SPH, IDEPP, UNAFAM
* Gérard Dubret, chef de service, Psychiatre des Hôpitaux – CH René Dubos – 95300 Pontoise
Accéder à la circulaire du 11 janvier 2010 : Psychiatrie : circulaire du 11 janvier 2010 : Hospitalisation d’office. Sorties d’essai, mise en ligne Alexis



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