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dimanche 17 janvier 2010

La République des LIBRES
14 janvier 2010

Sigmund et Théodule - de Morasse.


LE LAID RIBOT LIT « IMAGO »











Théodule Ribot (1839-1916)

Dans le vol. 78 (juillet-décembre 1914) de la « Revue philosophique de France et de l’Etranger », Alcan éditeur [on la trouve sur le site Gallica de la BNF], Théodule Ribot (le pape de la revue) se prononce sur la « psycho-analyse ». Il a lu les résumés de quelques articles du volume 2 de la revue « Imago », nos 1 à 4 de 1913. Le traducteur, N. Kostyleff, détaille les sommaires en les commentant.

À propos de Freud « et de son école », pour comprendre ce qui chiffonnait et continua de chiffonner durant 35 ans – jusqu’en 1950 ? – la science médicale et la « philosophie française » il faut relire Théodule Ribot (1839-1916). Dans le vol. 78 (juillet-décembre 1914) de la « Revue philosophique de France et de l’Etranger », Alcan éditeur [on la trouve sur le site Gallica de la BNF], Théodule Ribot (le pape de la revue) se prononce sur la « psycho-analyse ». Il a lu les résumés de quelques articles du volume 2 de la revue « Imago », nos 1 à 4 de 1913. Le traducteur, N. Kostyleff, détaille les sommaires en les commentant.

THEODULE RIBOT

« Imago » a été créée par Freud en 1912, avec Hanns Sachs et Otto Rank. Elle a pour sous-titre : « Revue pour l’application de la psychanalyse aux sciences de l’esprit ». Jusque là, elle n’était évidemment pas traduite en français.

L’article de Ribot a pour titre : « La mémoire affective et la psycho-analyse ». Ribot définit ainsi celle-ci : « un procédé qui a pour but de plonger dans l’inconscient et d’en ramener des morceaux dans le jour de la conscience ». Il ne faut pas la confondre, prévient-il avec « l’analyse psychologique proprement dite : observation intérieure, introspection ».

Pour Ribot, la « partie faible du freudisme » est l’interprétation des faits. Le grand homme lui reproche de poser « comme cause dernière et unique, l’instinct sexuel qui est censé tout expliquer (…) Dans cette voie, ils (les psycho-analystes) sont allés loin, souvent trop loin. » Et d’expliquer au lecteur que le point de départ erroné de cette thèse est l’importance donnée aux rêves puisque Freud considère que le rêve n’est qu’une apparence, une façade, « derrière laquelle la psycho-analyse découvre une logique régulatrice » ; et de résumer : les moments du rêve sont des symptômes. Ils doivent « servir à pénétrer jusqu’au fond du rêve qui est un complexe affectif enfoui dans l’inconscient, instinct sexuel, ou, sous une forme plus générale, libido, le désir. » Si Ribot voit très bien comment « du rêve à la rêverie et à l’imagination créatrice la transition se fait naturellement », il reproche aux psycho-analystes d’en trouver la source « dans quelque complexe ». Pour Ribot, c’est là l’erreur… « Les psycho-analystes ont (ainsi) pu passer facilement de l’étude médicale des complexes dans leurs rapports avec les névroses et les psychoses, à celle de la création esthétique, mythique, religieuse, métaphysique, etc. Ils s’y sont lancés avec ardeur et témérité ».

Théodule Ribot est un savant posé, mais on devine, bouillonnants, les points d’exclamation quand il énumère les thèmes déroutants : le rapprochement des « primitifs » et des « névrosés » ; le « rôle de l’érotisme dans les religions de toute espèce et chez les mystiques de tous les pays » ; « l’inceste et la déviation sexuelle dans le roman, la poésie, le théâtre (…) toujours attribués à un complexe inconscient datant de la première enfance ». L’insistance sur l’inceste déplaît (elle est « lassante »), comme est grotesque la « fantaisie » qui essaie d’expliquer « la spéculation philosophique » par « la manifestation de tendances psycho-sexuelles datant de l’enfance ». Puis vient le reproche suprême : « Le défaut capital de cette théorie de l’imagination créatrice, c’est la prétention inacceptable de vouloir tout expliquer par la seule action de l’instinct sexuel. » Certes Théodule Ribot crédite la psycho-analyse d’une étude solide de la « logique du sentiment » mais rappelle qu’il ne veut voir dans celle-ci qu’une « étape » dans l’évolution de la « faculté de raisonner ». Rien de plus…

Il reste que, jusqu’à ce que le mouvement surréaliste, Pierre-Jean Jouve et André Breton, pour des raisons littéraires, puis Marie Bonaparte, la princesse, utilisent quelques idées du freudisme, la France demeura hermétiquement close à la « science boche » (et même « juive »). Elisabeth Roudinesco et Michel Plon (« Dictionnaire de la psychanalyse », Fayard) signalent l’existence d’un professeur de médecine de Poitiers, le Pr Morichau-Beauchant (1873-1952) dont Freud dit qu’il fut : « le premier Français qui se reconnut officiellement adepte de la psychanalyse ».

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